C'est une surdose de kétamine qui a mis fin l'an dernier à la vie de Matthew Perry. L'acteur américain connu pour son rôle de Chandler Bing dans la série Friends n'a jamais caché ses problèmes de toxicomanie.
On comprend pourquoi l'usage de ce produit comme psychotrope - phénomène observé dans le milieu de la nuit en Suisse - est de plus en plus décrié et inquiète le milieu médical.
"On ne sait plus qui on est"
Consommatrice, Camille* sait de quoi il en retourne, comme elle le raconte au micro du 19h30. "Ça fait très très très très peur, parce que, justement, on n'a plus d’égo, on n'a plus d’identité, on ne sait plus qui on est..."
La première fois, je me souviens d’être rentrée à la maison en flottant sur un nuage dans les rues
Ce que la jeune femme décrit, c'est un "K-Hole": "K" pour "kétamine" et "Hole" pour "trou" en anglais. Overdose pour certains, voyage cosmique pour d’autres, la description qu'elle en fait, bien loin des effets euphoriques d'une première expérience, ne fait pas rêver.
"La première fois que j’ai pris de la kétamine, en 2009, j’étais aux études. On m’en a proposé à une soirée", poursuit-elle. "Voilà, j’ai essayé et je me souviens d’être rentrée à la maison en flottant sur un nuage dans les rues, à la tombée de la nuit."
Depuis, elle en consomme régulièrement lorsqu’elle va en club ou en festivals électro. La consommation de kétamine à des fins récréatives est une tendance en augmentation chez les jeunes en Suisse.
Anesthésiant conçu dans les années 1960
La kétamine a été conçue dans les années 1960 comme un anesthésiant. Ses effets secondaires hallucinatoires limitent son utilisation.
"Effectivement, on l’utilise d'abord en chirurgie vétérinaire comme anesthésiant", explique Jalel Araiedh, médecin au service de médecine des addictions au CHUV à Lausanne. "Et il y a actuellement des essais cliniques en cours depuis plusieurs années dans le monde dans le traitement de la dépression."
Dans une récente interview, Elon Musk a d'ailleurs révélé qu'il en prenait régulièrement, prescrit par son médecin, pour traiter son "état d'esprit négatif".
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Mais lorsqu’on la détourne de son objectif médical pour l'utiliser à des fins récréatives, cette substance comporte des risques à court et long termes.
Il peut y avoir un impact au niveau du corps, sur la vessie notamment. On peut arriver jusqu’à se faire opérer et changer de vessie.
"Sur une consommation unique, le risque est de faire une surdose, que les gens décrivent comme tomber dans un trou noir", poursuit le médecin. "Ils ne sont plus conscients de ce qu'il se passe autour d’eux. Ils entrent dans un état de vulnérabilité extrême qui les rend vulnérables aux autres, mais aussi à leur environnement. Les risques de la consommation répétée, c’est de rentrer dans une dépendance. Il peut également y avoir un impact au niveau du corps, sur la vessie notamment. On peut arriver jusqu’à se faire opérer et changer de vessie."
Pour protéger les consommateurs et faire de la prévention, le programme NightLife Vaud a mis en place une permanence dans laquelle les utilisateurs peuvent tester leurs produits, comme le souligne sa responsable Yana Scheurer.
"La première mesure, c’est toujours de venir tester dans un 'drug checking' en Suisse sa substance avant de la consommer pour savoir exactement ce qu’elle contient. Et ensuite, pouvoir adapter le dosage tout en ayant une approche prudente, ce qui veut dire diminuer la dose en consommant moins au départ."
La Grande-Bretagne est le pays le plus durement touché par le phénomène de la kétamine. Mais dans une récente étude des eaux usées de villes européennes, on retrouve tout de même quatre villes suisses dans le top 20 des taux de consommation de kétamine.
*Nom connu de la rédaction
Guillaume Carel/fgn