Les problèmes d'alcool touchent tous les domaines de l'existence et le travail n'y échappe pas. Selon les associations organisatrices de l'événement - le Groupement romand d'études des addictions, la Croix-Bleue, Addiction Suisse et Fachverband Sucht - environ 2% des salariés présentent une consommation problématique d'alcool, avec généralement de lourdes conséquences: difficultés personnelles pour les collaboratrices et les collaborateurs touchés, mise en danger de la sécurité, baisse de performance et charges élevées pour l'entreprise.
La perte de productivité des employés ayant une consommation d'alcool abusive se monte à environ 15%. Conséquence: les coûts liés à la consommation abusive d'alcool se montent à 2,1 milliards de francs par année pour les entreprises.
Les absences au travail injustifiées de courte durée sont quatre à huit fois plus fréquentes chez ces personnes. En outre, d'après les organisateurs de cette Journée nationale, 15 à 25% des accidents du travail sont dus à la consommation d'alcool ou d'autres substances psychoactives et la probabilité de provoquer un accident est trois à quatre fois plus élevée chez les personnes ayant un problème d'alcool.
Tous les secteurs professionnels sont concernés: "Certains sont plus à risque disons, comme la gastronomie, l'hôtellerie, les métiers en contact avec des personnes, par exemple l'enseignement, mais aussi les domaines de la santé", constate Célestine Perissinotto, chargée de projet au GREA, dans le 12h30.
L'importance des collègues de travail
Face à ces différents constats, la Journée nationale sur les problèmes liés à l'alcool cherche à sensibiliser les responsables d'entreprises aux difficultés spécifiques auxquelles sont confrontées les personnes qui ont une consommation problématique d'alcool.
Les collaborateurs et les chefs sont très importants pour repérer une situation
"Ce n'est pas un sujet facile à aborder dans le cadre du travail pour les personnes concernées, d'une part parce qu'il s'agit de quelque chose de l'ordre du privé, de tabou, mais c'est aussi un problème collectif. Les entreprises qui ont mis en place un concept de prévention sont peu nombreuses en Suisse", souligne Célestine Perissinotto.
L'experte relève l'importance de l'entourage professionnel pour mettre en lumière ces situations: "Les collaborateurs, mais aussi les directeurs d'entreprises, les chefs, sont très importants, car c'est à eux de pouvoir repérer une situation et de pouvoir accompagner la personne."
Savoir reconnaître les signes avant-coureurs
Pour cela, il est nécessaire de reconnaître certains signes avant-coureurs. "Cela peut être assez variable: des absences répétées, non excusées, des sautes d'humeur, un manque de concentration, de fiabilité, des choses qui ne marchent plus", explique Markus Maury, porte-parole d'Addiction Suisse, dans l'émission On en parle.
Il est important de ne pas confronter frontalement son employé
Mais alors, que doit faire une entreprise dans une telle situation? "L'important, déjà, c'est de créer un climat de confiance et de bienveillance au sein même de la boîte. Autrement, les employés n'oseront jamais dire quelque chose s'ils ont un problème", conseille Markus Maury.
Et de poursuivre: "Si un employeur soupçonne qu'un employé a un problème avec l'alcool, il est important de ne pas le confronter frontalement, de ne pas poser un diagnostic, parce que ce n'est pas son rôle (...) L'important, c'est aussi de commencer avec les faits qu'on observe, dire qu'on constate une baisse de qualité du travail, des absences répétées."
L'intérêt de la prévention
Si les grandes entreprises ont les moyens de mettre en place des concepts de prévention, il n'en va pas de même pour les plus petites, qui ne disposent souvent pas de ressources suffisantes. "Pour ces entreprises, nous avons un site avec des petits films qui montrent comment faire, qui donnent des conseils", relève Markus Maury.
Quoi qu'il en soit, les entreprises ont tout intérêt à prendre le taureau par les cornes en mettant en place des programmes de prévention, estime Célestine Perissinotto.
"Cela est valable à tous les niveaux, que ce soit sur des questions d'addiction ou de santé en général. Une étude réalisée il y a plusieurs années montrait que les entreprises qui avaient décidé de faire de la prévention jugeaient ces programmes comme étant efficaces, avec un effet positif aussi bien sur le climat de travail, mais aussi une diminution des absences et des accidents du travail", conclut-elle.
Jérémie Favre