Dans son enquête publiée mercredi, l'ONG SOS villages d'enfants en Suisse révèle que 75% des sondés jugent que les droits de l'enfant ne sont pas suffisamment respectés dans l'espace numérique.
"Toute publication d'une photo d'un enfant ou d'un adulte peut constituer une atteinte à la personnalité", met en garde Juliette Ancelle, avocate spécialisée dans le numérique, au micro de Forum mercredi soir. Bien que ceci ne soit "pas automatique".
Décision des parents ou des enfants, si en âge de la prendre
Dans le cas d'un enfant de deux mois par exemple, le principe est de s'en remettre "aux parents", explique Juliette Ancelle. "Mais plus l'enfant avance en âge, plus il aura la capacité de dire 'non je ne souhaite pas que cette photo soit publiée'." Les parents doivent donc respecter sa décision.
Plus l'enfant avance en âge, plus il aura la capacité de dire 'non je ne souhaite pas que cette photo soit publiée'
Cependant, pour l'avocate, les attaquer en justice parce qu'ils ont publié une photo sans l'autorisation de l'enfant ou parce qu'ils n'ont pas respecté son choix est "extrême". Elle estime que pour cela, il faudrait qu'ils aient aussi "violé leur devoir de protection de leur enfant, en les ridiculisant ou en les maltraitant. Ça arrive".
"En revanche, on peut constater que de plus en plus d'enfants à l'âge adulte ne souhaitent pas qu'il y ait cette conservation d'une empreinte numérique et qu'on retrouve des photos d'eux bambins", relate l'invitée de la RTS. "Il y a un travail pour favoriser le retrait de ces images en ligne." Elle cite notamment le droit à l'oubli inscrit dans le règlement européen de protection des données.
"Ne pas publier ou flouter"
Pour Juliette Ancelle, "il y a beaucoup de bon sens à avoir et de sensibilisation à faire" pour mettre tout le monde d'accord. "Le plus simple est de ne pas publier ou de flouter les visages" pour laisser leurs enfants décider plus tard s'ils souhaitent que leur image soit publiée. Elle conseille aussi l'usage des émojis pour cacher le visage et de "mettre un minimum d'information sur l'enfant", par exemple de ne pas mentionner son nom ou de ne pas mettre de lien vers son compte de réseaux sociaux.
L'important est de "toujours se poser la question: 'est-ce que mon enfant sera d'accord dans dix ans de voir cette image sur internet?'", conclut-elle.
Propos recueillis par Renaud Malik
Adaptation web: Julie Marty
Existence d'un cadre législatif
La protection des données en Suisse est soumise à un cadre législatif. Elle permet par exemple "à des enfants devenus adultes de dire qu'ils s'opposent à des traitements de leurs données personnelles", souligne Juliette Ancelle.
Bien que le droit à l'oubli n'existe pas en Suisse, il existe une jurisprudence "qui permet de mettre en oeuvre un certain droit à l'oubli".
Il existe également un site internet pour encadrer "la présence des enfants en ligne avec les réseaux sociaux avec beaucoup de recommandations et de sensibilisation. J'invite tous les parents à le visiter, car il est très bien fait", ajoute l'avocate spécialisée qui cite "Jeunes et médias".