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Raconter son cancer sur les réseaux sociaux: un rempart contre la solitude 

Lucie vient d’apprendre qu'elle a le cancer, Marriah, amputée d’une jambe, vit avec depuis longtemps et Jolann comme Victorine sont en rémission. Tous les quatre ont moins de 30 ans quand ils apprennent qu’ils sont malades. Habitués des réseaux sociaux, ils se sont saisis de cet espace d’expression, chacun à sa manière, pour raconter leur maladie et les épreuves qu’ils affrontent. Le documentaire "Les vivants" disponible sur le Play RTS témoigne avec délicatesse et humour du besoin de raconter aux autres pour se raconter à soi.

Au début, je me suis mise sur les réseaux, surtout pour passer le temps. Tu es “enchaînée” à l’hôpital et tu n’as pas le choix : c’est une question de vie ou de mort.

Victorine Boyer

Victorine a traversé deux cancers entre 27 et 30 ans. "J’ai commencé à faire des vidéos et à parler de la maladie sur les réseaux parce que je cherchais une personne à qui me référer pour savoir ce qui allait se passer pour moi, au quotidien. Je voulais voir une personne qui emmène sa caméra en chimio et qui me montre comment ça se passe."

Les gens se sont mis à partager des expériences et à se donner des conseils entre personnes malades et proches de personnes atteintes de la maladie.

Victorine Boyer

Parce qu’elle ne trouve pas suffisamment de réponses à ses questions, Victorine décide de raconter en vidéo, et avec une touche d'humour, les étapes de sa maladie. "J’ai pris les gens avec moi pour leur montrer ce que je vivais. J'ai eu tellement de messages d'encouragement, c'était fou! Mais le plus génial, c'est que les gens se sont mis à partager des expériences et à se donner des conseils entre personnes malades et proches de personnes atteintes de la maladie."

Raconter à d'autres pour se raconter à soi, pour intégrer ce qui nous arrive. C'est fondamental.

Alexandra Spiess, thérapeute de famille, responsable As'trame Genève

"Quand Victorine met presque un peu un côté sympa dans tout ça, elle essaie aussi probablement de lutter contre d'autres affects:  la peur, l’effarement", analyse Alexandra Spiess, thérapeute auprès de familles dont un des membres est malade. "Ce que j'ai appris au contact des familles, c'est qu'une nouvelle aussi grave, le choc du diagnostic, provoquent un état de sidération, ce qui se passe n’est pas acceptable. Raconter à d'autres pour se raconter à soi, pour intégrer ce qui nous arrive, c'est fondamental." Et même si les échanges sur les réseaux sociaux ne remplacent pas un suivi thérapeutique, Alexandra Spiess y voit une utilité positive : "C'est un rempart contre la solitude car les traitements isolent beaucoup et la vie des malades et de leur proches est comme figée dans le temps de la maladie."

>> Alexandra Spiess, thérapeute de famille, responsable As'trame Genève :

Docu réactions "Les vivants"
Docu réactions "Les vivants" / Docu réactions / 4 min. / le 25 avril 2024

Pulsion de vie

Loin de tomber dans le voyeurisme, le film "Les vivants" mêle avec beauté et délicatesse les images documentaires et les vidéos personnelles postées sur les réseaux sociaux. Les protagonistes du film se racontent à la fois à la caméra des réalisatrices et sur les réseaux. Les deux récits, parfois dissonants, se répondent et témoignent d’une pulsion de vie qui emporte tout sur son passage.  

RTS Les documentaires, Muriel Reichenbach

"Les vivants" de Hélène Lam Trong et Jérémy Bulté

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