Banques, cliniques privées ou entreprises, qui finance les campagnes des élus romands?
Affiches, sites web, publicités et tous-ménages font partie des outils indispensables pour gagner une élection. En Suisse romande, il faut investir pour la campagne d’une personne à une élection fédérale entre 19'000 francs et 220'000 francs.
Pour trouver de pareilles sommes, les élus et leurs partis doivent recourir massivement aux donations de privés et d'entreprises.
UBS verse 630'000 francs par année de dons
A Genève, les partis politiques peuvent compter sur le soutien des banques. Pour les campagnes électorales, le PDC Genève a récolté 130'000 francs de dons pour les fédérales et 155'000 francs de dons pour les cantonales. L'essentiel des donateurs sont des particuliers, mais les plus gros sont la banque Lombard Odier, Pictet et Mirabaud et le groupe AEVIS actif dans les cliniques privées et les services d’ambulances.
Le PLR genevois avec un budget de 660'000 francs pour les fédérales ne donne pas les noms de ses donateurs. Du côté de l’UDC, Céline Amaudruz a pu compter sur UBS pour sa campagne au Conseil national. L’élue ne donne pas de chiffre.
De son côté, la banque explique: "En 2017, UBS a soutenu les partis qui lui en ont fait explicitement la demande et qui remplissent ses critères d’octroi (entre autres, le soutien à l’économie de marché) pour un montant total de 630'000 francs."
Les socialistes, des règles et des exceptions.
Au niveau du Parti socialiste, le budget des campagnes vient principalement des cotisations des membres. Toutefois, à Fribourg, le parti a récolté plus de 46'000 francs de dons exceptionnels pour soutenir Christian Levrat lors du second tour au Conseil des Etats. Le PS Fribourg ne transmet pas les noms des donateurs.
Dans la majorité des cantons, le PS a édicté des règles strictes: interdiction de campagnes personnelles et de dons d’entreprises. En 2011 et en 2015, dans le canton de Vaud, Géraldine Savary a pu déroger à la règle, avec un comité de campagne conjoint avec le Vert Luc Recordon. Après avoir accepté l’argent du milliardaire Frédéric Paulsen, la socialiste a annoncé qu'elle ne se représenterait pas en 2019 au Conseil des Etats.
Autre exception, en Valais, les élus socialistes ont tous leur comité de campagne personnel. Pas moins de 59'226 francs ont ainsi été récoltés par Mathias Reynard. Dans ce canton, les candidats doivent trouver eux-mêmes plusieurs milliers de francs. Pour le Conseil d’Etat, il faut compter entre 59'982 et 115'125 francs. Plusieurs politiciens ont dû faire des emprunts pour payer la note.
Le PDC Valais a pour sa part mis en place un système de Club économique. Une structure où politiciens et entreprises se voient plusieurs fois par année. Les entreprises payent un droit d’entrée pour ce club sélect. Ce type de structure se retrouve d'ailleurs dans plusieurs partis de droite dans toute la Suisse romande.
PLR, la nouvelle génération plus transparente
Du côté PLR, officiellement le parti est opposé à doter la Suisse d’une législation sur le financement des campagnes électorales. Pourtant, des élus comme Philippe Nantermod ont joué la carte de la transparence. Il a envoyé le tableau Excel de ses comptes de campagne: 109'000 francs, avec comme principaux donateurs un garage et des membres de sa famille.
La même transparence se retrouve chez d’autres élus, comme Raphaël Comte (Neuchâtel) ou Frédéric Favre (Valais), toujours des jeunes. Une différence de génération, puisque les ténors du parti Christian Lüscher (GE) et Olivier Feller (VD) sont catégoriquement contre toute transparence, avec un refus net à toute demande.
Dans le canton de Neuchâtel, tous les partis, à l’exception de l’UDC, ont édicté des règles strictes pour leurs élus. Les Verts et les socialistes ont l’interdiction de faire campagne seuls. Ils ne peuvent pas recevoir de dons d’entreprise. En 2015, le PS neuchâtelois a par exemple refusé un don d’une petite PME.
>> Sujet développé dans Mise au Point à 20h10
François Ruchti
Méthodologie
Le questionnaire a été envoyé à tous les élus fédéraux du Conseil national et du Conseil des Etats, ainsi qu'aux élus cantonaux du Conseil d’Etat des cantons romands, excepté Berne. La demande portait sur les comptes de campagne et les noms des 5 plus grands donateurs.
Au total, 90% des élus romands ont répondu. Les Verts ont été transparents à 100%, alors qu’aucun élu MCG, ni le parti, a répondu. Ces chiffres ont été donnés sur une base volontaire.
Les élus qui ont répondu aux deux questions sont "transparents", ceux qui ont répondu à une question "partiellement transparent", et ceux qui n'ont pas répondu ou ont refusé sont considérés comme "opaques".