Cette nouvelle enquête intervient dans un climat politique de plus en plus critique vis à vis de cette pratique, puisque la Commission de gestion du Conseil national et le Contrôle parlementaire de l'administration se sont tour à tour inquiétés de cette détention administrative de migrants mineurs, qui consiste en la privation de liberté de personnes qui doivent être renvoyées de Suisse en cas de refus de leur demande d'asile.
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Berne, Zurich et le Valais concernés
L'enquête de Terre des hommes révèle qu'au moins huit cantons, dont Berne, Zurich et le Valais (seul canton de Suisse romande) ont détenu des migrants mineurs. En l'occurrence 40 entre 2015 et 2017.
Des chiffres toutefois lacunaires, selon l'organisation. Certains cantons ne lui ont pas répondu. De plus, Terre des hommes soupçonne que de nombreux mineurs sont pris pour des adultes.
Autre ombre au tableau: ces chiffres cantonaux ne correspondent pas à ceux de la Confédération en la matière. Entre 2015 et 2017, elle a comptabilisé de son côté une centaine de cas. L'ampleur exacte du phénomène reste par conséquent très floue.
Des mineurs de moins de 15 ans sous les verrous
Ces jeunes ont souvent entre 15 et 18 ans et seraient le plus souvent enfermés en milieu carcéral avec un parent, selon les autorités cantonales. Mais Terre des hommes n'a pas pu vérifier ces affirmations. L'organisation relève par contre que des mineurs de moins de 15 ans ont également été emprisonnés, ce qui est illégal en droit suisse, même si les cantons le font en tout dernier ressort, et ce pour éviter de séparer le mineur de ses parents.
Selon l'ONG, la Suisse ne respecte ainsi pas les obligations légales qui découlent de la convention internationale sur les droits de l'enfant. Elle considère aussi que ce type de détention est néfaste pour la santé physique et psychique des mineurs.
En conformité, selon Berne
Du côté des autorités fédérales, le Secrétariat d'Etat aux Migrations rejette ces accusations en bloc par la voix de sa porte-parole Emmanuelle Jaquet: "Après avoir examiné la conformité des mesures de contrainte aux droits de l'enfant le Conseil fédéral a estimé que les garanties conférées par cette convention étaient respectées. Les prescriptions légales en Suisse qui encadrent la décision et l'examen de la détention sont conformes au droit international et à la convention relative aux droits de l'enfant", explique-t-elle à la RTS.
Terre des hommes relève enfin dans son rapport les bonnes pratiques dans quelques cantons, notamment Genève et Neuchâtel qui ont banni explicitement la détention de migrants mineurs dans leur législation.
Marc Menichini/jzim
Une pratique abandonnée en Valais
Invité lundi dans l'émission Forum, le conseiller d'Etat valaisan en charge de la Sécurité Frédéric Favre a confirmé que son canton a jusqu'à récemment gardé pour pratique "de ne pas séparer un jeune de ses parents (...) surtout ceux qui étaient proches de la majorité".
"C'est toujours la même problématique, garder sous contrôle des gens qui doivent être renvoyés. Donc on doit trouver un bon compromis entre la sécurité de ces gens, le fait de devoir les garder avant leur renvoi, pendant les démarches administratives".
Le canton a toutefois abandonné la pratique en édictant une directive. "Pour moi il est inadmissible d'avoir des mineurs détenus administrativement", a précisé Frédéric Favre.
>>Le débat entre le conseiller d'Etat valaisan Frédéric Favre et Valentina Darbellay, chargée de projet à Terre des Hommes: