Pour le sociologue des religions, Noël n'est plus à proprement parler une "fête religieuse", mais un moment qui tient du "sacré" à travers les liens familiaux. Pour lui, le côté commercial de cette célébration est atténué par le don. "Noël, c'est le moment des cadeaux, on dépense sans compter, on invite des gens qui sont proches (...), et ces cadeaux disent la qualité de la relation (...) au fond, si quelque chose est sacré à Noël, ce n'est pas le petit Jésus, c'est plutôt la famille", affirme-t-il.
S'il confesse que Noël peut être un "calvaire" dans certains cas, il estime que les individus tentent le plus souvent de "tourner autour du pot" et de ne pas se blesser, dans l'espoir de passer un moment agréable. Le maître d'enseignement à l'Université de Lausanne considère par contre que le moment de la messe ou du culte est devenu "optionnel" et fait désormais partie d'une simple "conviction personnelle".
La fin du christianisme comme socle culturel
En Suisse, si les catholiques romains représentent toujours la majorité de la population, les sans confession sont désormais plus nombreux que les protestants. Pour Philippe Gonzalez, ces chiffres confirment des changements sociétaux forts: "Le christianisme n'est plus le socle culturel autour duquel nous organisons notre vie collective alors qu'il l'était il y a encore 50 ans (...), cela pose un certain nombre de problèmes par rapport à l'identité du pays (...), non seulement on a une augmentation des sans religion mais aussi un plus grand panorama religieux, notamment avec la présence de l'islam".
Cette présence de l'islam peut conduire à "des formes de durcissement identitaire autour de valeurs religieuses, sans pour autant que l'on soit soi-même croyant", ajoute-t-il.
La religion importante d'un point de vue collectif
Malgré cette baisse du sentiment religieux, les sondages montrent que près de trois quarts des Suisses estiment que les valeurs chrétiennes font partie du pays et qu'elles restent importantes.
Interrogé pour savoir si cela était contradictoire, le sociologue estime que si la religion reste importante, c'est avant tout dans une optique collective: "Il est important qu'il y ait une église au milieu du village, mais pas pour moi".
Pour lui, ce besoin de religion pour le collectif représente "le marqueur de la frontière d'une identité (...), au moment où l'intégration de l'islam dans nos sociétés nous pose beaucoup de questions sur ce qu'est la différence et quels sont les accords qu'on peut composer avec des gens d'une autre communauté".
"La religion a deux potentialités (...) elle est à la fois un puissant élément qui permet de marquer une identité mais elle permet aussi, lorsqu'elle est travaillée, d'aller vers le prochain, car la problématique du prochain est présente dans toutes les religions" conclut-t-il.
Propos recueillis par David Berger
Adaptation web: Tristan Hertig