Ne reposant sur aucun texte législatif, ce système se base sur le modèle arithmétique 2-2-2-1, qui attribue, au sein du Conseil fédéral, deux fauteuils aux trois principales formations politiques et un seul à la quatrième. "Le terme 'magique' signifie surtout qu'on ne comprend pas très bien comment cela fonctionne, mais c'est un système qui marche et qui permet d'éviter les blocages politiques", indique l'historien Dominique Dirlewanger dans le 19h30.
"Cela oblige tous les partis à renoncer à mener une politique d'opposition, car ils savent qu'ils doivent converger vers les autres pour trouver des solutions", précise de son côté le politologue et historien Axel Marion (PDC/VD) dans l'émission Forum mercredi. "Plus de 80% de la sphère politique suisse est comprise dans ce système et cela garantit une stabilité unique dans le monde, ou en tout cas en Europe."
60 ans de concordance
La formule magique remonte au 19 décembre 1959, lorsque les radicaux doivent céder leur troisième siège au Conseil fédéral aux socialistes. "Cela marque la transition entre un modèle monocolore avec l'hégémonie du parti radical jusqu'au début du XXe siècle, et l'intégration des forces d'opposition", explique Dominique Dirlewanger.
Axel Marion ajoute: "Le fait que cette démarche s'est pérennisée durant 60 ans sous des formes diverses, démontre que c'était la bonne idée du moment."
Une règle mise à mal
Restée inchangée durant 44 ans, cette configuration (2 PLR, 2 PS, 2 PDC, 1 UDC) connaît sa première modification en 2003 lors de l'élection de Christoph Blocher au gouvernement. Le tribun zurichois permet en effet à l'UDC d'obtenir un siège supplémentaire au Conseil fédéral au détriment du PDC (2 PLR, 2 PS, 2 UDC, 1 PDC).
Quatre ans plus tard, le Parlement exclut le tribun zurichois et élit sa collègue de parti Eveline Widmer-Schlumpf. L'UDC, qui bannit sa nouvelle conseillère fédérale, se scinde alors en deux et les dissidents créent le PBD. Ce sont alors 2 PLR, 2 PS, 2 PBD et 1 PDC qui constituent l'exécutif fédéral.
L'équilibre se rétablit toutefois progressivement à partir de 2008 avec l'élection d'Ueli Maurer puis avec celle de Guy Parmelin en 2016 (2 PLR, 2 PS, 2 UDC, 1 PDC).
Mathieu Henderson
Une expression d'origine alémanique
L'expression "formule magique" apparaît pour la première fois dans la Neue Zürcher Zeitung le 26 novembre 1959.
Elle sera ensuite reprise en Suisse romande quelques jours plus tard par la Gazette de Lausanne.