Une particularité helvétique permettait à n'importe qui de mettre aux poursuites un autre citoyen, sans que celui-ci soit réellement son débiteur. Cette créance s'affichait ensuite dans le registre de l'office des poursuites et pouvait être un réel problème au moment de chercher un appartement ou de contracter un prêt.
La révision de la loi sur la poursuite pour dettes et faillite permet désormais aux victimes de commandements de payer abusifs d'empêcher que ceux-ci ne soient communiqués à des tiers. En effet, jusqu'ici, l'inscription de la poursuite - même si elle n'aboutissait ni à une saisie ni à une faillite - pouvait être consultée pendant cinq ans.
"Cela ne résout pas tout"
Pour Sébastien Fanti, avocat à Sion et préposé valaisan à la transparence et à la protection des données, cette révision législative "améliore une situation qui était extrêmement complexe, mais ne résout pas tout".
Interrogé dans l'émission Forum, il rappelle qu'il existait déjà "une possibilité pénale de déposer une plainte pour une tentative de contrainte, mais c'était une procédure aux conditions assez restrictives". "Il fallait introduire soi-même une action, effectuer une avance de frais au tribunal (...). Peu de gens entreprenaient cette démarche", détaille-t-il.
Notification supprimée après trois mois
Sébastien Fanti évoque pourtant une "révision a minima", qui donne "la possibilité, trois mois après avoir reçu une poursuite, de demander à ce qu'elle n'apparaisse pas dans votre extrait. A ce moment-là, c'est votre prétendu créancier qui va devoir (...) faire un certain nombre de démarches probatoires dans les 20 jours".
Fini donc le risque d'être pénalisé dans la recherche d'un appartement, ou une demande de prêt? "La situation très claire où l'on est victime d'une personne qualifiée de quérulent va disparaître. C'est tant mieux, car il suffisait, pour ennuyer quelqu'un dans son quotidien, pour l'empêcher de contracter un leasing, de devenir locataire (...), de lui faire notifier cette poursuite", répond Sébastien Fanti.
Une procédure "ni simple, ni rapide"
"Maintenant, puisqu'il faudra justifier de ses poursuites, les créanciers légitimes vont sans doute être un peu plus plus actifs (...). Lorsque c'est justifié, il faudra peut-être se manifester de manière un peu plus proactive vis-à-vis de ses débiteurs", nuance-t-il.
Le préposé valaisan à la transparence ajoute que, même avec ces changements, "ce n'est pas simple, ni rapide, de se débarrasser d'une poursuite" et qu'il faudra toujours "très souvent faire appel à un homme de loi, ce qui est dommageable pour les citoyens".
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Propos recueillis par Esther Coquoz/jvia