"Aujourd'hui, nous avons besoin d'un nouvel élan", écrivent les coordinatrices et coordinateurs de la grève des femmes dans leur manifeste. Cinq mois jour pour jour avant la mobilisation nationale du 14 juin, ces féministes mettent en avant leurs revendications principales, allant de l'égalité dans le monde du travail au refus de la violence, de la liberté de choix en matière de sexualité à la lutte contre le modèle patriarcal.
"Le manifeste vient expliciter davantage le pourquoi d'une mobilisation", indique dans La Matinale de la RTS Valérie Borloz, une des coordinatrices romandes du mouvement. "Nous avons voulu que ce texte couvre une multitude de thématiques parce que les raisons qu'ont les femmes d'être en colère sont aujourd'hui multiples."
Des revendications dans l'espace public et dans l'espace privé
Parmi les raisons de cette colère: les inégalités dans le monde du travail. Le manifeste exige "un salaire égal pour un travail de valeur égale, ainsi qu'une révision de la loi sur l'égalité, comprenant des contrôles et des sanctions". Et aussi la fin des discriminations en matière d'assurances sociales. Car en moyenne, les rentes des femmes sont inférieures de 37% à celles des hommes, rappelait l'an dernier le Bureau fédéral de l'égalité.
"La question de l'égalité salariale est l'une de nos priorités, car nous ne l'avons toujours pas atteinte", explique au 19h30 Michela Bovolenta, également coordinatrice du mouvement. "Nous dénonçons aussi la valorisation moindre des métiers féminins et le piège du temps partiel dans lequel les femmes se retrouvent, avec de tous petits salaires et de toutes petites rentes."
Concernant la sphère privée, les collectifs demandent un plan national de lutte contre les violences sexistes, la violence domestique faisant un mort tous les 15 jours en Suisse. Le manifeste appelle également à davantage de liberté de choix en matière de sexualité et une meilleure éducation à la sexualité féminine.
Les féministes veulent d'ailleurs voir du changement dès l'école, "reflet de la société patriarcale", demandant que les enseignants soient formés à la promotion de l'égalité. Le tout dans un esprit solidaire avec les femmes du monde entier et les autres catégories "oppressées" de la population.
"La grève, une solution d'ultime recours"
Du côté des milieux économiques, on comprend l'impatience face aux disparités salariales. Mais on dénonce la coloration anti-libérale donnée à ce manifeste, ainsi que l'appel à la grève.
"En soi, l'outil de la grève représente une solution d'ultime recours en Suisse", estime Cristina Gaggini, directrice romande d'Economiesuisse. "Je ne vois pas de raison d'y recourir aujourd'hui si ce n'est à des fins électorales en cette année d'élections fédérales."
La responsable rappelle que depuis 1991 et la précédente grève nationale, la situation des femmes a évolué, notamment grâce à la démocratie directe, citant l'exemple de l'assurance maternité acceptée en votation populaire en 2004.
Les Suissesses jugeront-elles cette évolution suffisante? Les collectifs organisant la grève n'annoncent pas d'objectif chiffré pour la mobilisation du 14 juin prochain. Mais ils espèrent que la participation sera à la hauteur du renouveau actuel du féminisme, dans le sillage notamment du mouvement #metoo.
Texte web: Tamara Muncanovic
Reportage TV: Andrea Gringeri et Pierre Jenny