Avec trente-neuf hommes pour sept femmes - six même, depuis l'élection de Karin Keller-Sutter au gouvernement en décembre -, le Conseil des Etats est un bastion masculin. Et une seule sénatrice en place va briguer sa réélection le 20 octobre, de quoi craindre une nouvelle baisse de la représentation féminine à la Chambre des cantons.
Après avoir atteint près de 25% au milieu des années 2000, la part de femmes au Conseil des Etats ne cesse de baisser ces dernières années, au point de passer sous la barre des 15% aujourd'hui. A Conseil national, en revanche, la proportion de femmes continue d'augmenter, atteignant un tiers des élus (65 femmes sur 200 députés au 1er janvier 2019).
Des femmes finalement plus nombreuses?
Pourtant, malgré les inquiétudes, la situation ne paraît pas si négative: la représentation féminine au Conseil des Etats devrait être au moins aussi bonne après les élections fédérales et même s'améliorer. Dans huit cantons ou demi-canton, les femmes ont de bonnes voire de très bonnes chances de remporter un siège, selon une analyse de la RTS. Et en l'état actuel des forces, trois autres femmes peuvent espérer être élues.
>> "Les chances des femmes par canton":
(Cette infographie est adaptée à la consultation sur grand écran et non sur smartphone)
1) VALAIS
Avec moins de 40% des voix en 2015, le PDC valaisan fait face à un vrai défi pour défendre son deuxième siège au Conseil des Etats. Marianne Maret, ancienne Présidente de la commune de Troistorrents et membre du Parlement valaisan, a pourtant une vraie chance d'y parvenir. Ses concurrents, le PLR Philippe Nantermod, le socialiste Mathias Reynard et l'UDC Cyrille Fauchère sont peut-être plus connus qu'elle, mais ils auront du mal à fédérer au-delà de leur propre camp lors du deuxième tour.
2) JURA
Tous les regards sont tournés vers l'ancienne ministre socialiste Elisabeth Baume-Schneider, aujourd'hui à la tête de la Haute école de travail social et de la santé (EESP) de Lausanne. Si comme beaucoup l’attendent, elle annonce sa candidature au Conseil des Etats, elle serait très bien placée pour reprendre le siège laissé par son camarade de parti Claude Hêche.
3) NEUCHÂTEL
Parmi les deux candidates du Parti socialiste, Martine Docourt Ducommun et Silvia Locatelli, une des deux est quasiment assurée d’être élue au Conseil des Etats. Une situation liée à une particularité neuchâteloise: les sièges à la Chambre des cantons sont attribués au mode proportionnel, ce qui assure presque automatiquement un siège à la deuxième force politique du canton. La campagne servira donc surtout à déterminer quelle candidate aura les faveurs du canton, la cheffe du groupe socialiste au Grand Conseil neuchâtelois - Martine Docourt Ducommun - ou l'ancienne présidente du PS cantonal - Silvia Locatelli.
4) VAUD
Pour reprendre le siège de la socialiste Géraldine Savary, deux femmes sont dans la course. Les conseillères nationales Ada Marra (PS) et Adèle Thorens (Verts). Malgré son profil perçu par certains comme "clivant", la première a pour l'instant le statut de favorite. Cela d’autant plus que le socialiste Pierre-Yves Maillard, nouveau président de l'Union syndicale suisse (USS), a renoncé à se porter candidat aux Etats. Certains spéculent sur une candidature de Roger Nordmann, chef du groupe socialiste aux Chambres fédérales. Il lui serait toutefois difficile de se lancer sans passer pour un "lady-killer".
5) BERNE
La conseillère d'Etat PBD Beatrice Simon est favorite pour reprendre le siège du sortant Werner Luginbühl. La directrice des Finances du canton de Berne est populaire et a de bonnes chances de s'imposer face aux nombreuses autres candidatures féminines du canton, notamment la conseillère nationale PLR Christa Markwalder et la présidente des Verts suisses Regula Rytz. Petite incertitude malgré tout: le conseiller national UDC Werner Salzmann sera un concurrent sérieux pour Beatrice Simon. Toutefois, le parti agrarien a traditionnellement du mal à gagner une élection majoritaire.
6) LUCERNE
Depuis 1848, le canton de Lucerne est un des bastions du PDC. La conseillère nationale Andrea Gmür devrait donc être en mesure de défendre le siège laissé vacant par son collègue de parti Konrad Graber. Le PS lucernois tentera malgré tout sa chance avec son président David Roth. Une concurrence plus sérieuse pourrait malgré tout émerger. Le conseiller national UDC Franz Grüter réfléchit également à se lancer dans la bataille.
7) BÂLE-VILLE
La conseillère d'Etat socialiste Eva Herzog a d'excellentes chances de succéder à sa collègue de parti Anita Fetz. La responsable du Département des finances est positionnée au centre gauche et peut compter sur une grande popularité. Ses chances sont si importantes que la droite n'a pour l'instant pas encore réussi à trouver un ou une candidate pour la défier.
8) THURGOVIE
Parmi les sept sénatrices siégeant à Berne, la PDC Brigitte Häberli-Koller est la seule à être de nouveau candidate en 2019. En tant que sortante, sa réélection pour un troisième mandat à la Chambre haute est très vraisemblable.
9) GENÈVE
Deux femmes pourraient avoir une chance de prendre un des deux sièges au Conseil des Etats. La première est l'écologiste Lisa Mazzone. Il n'est pas exclu qu'elle parvienne à défendre le siège laissé vacant par son collègue de parti Robert Cramer. Ses chances ont augmenté avec les ennuis actuels du PLR genevois qui pourraient handicaper son candidat Hugues Hiltpold, pourtant favori sur le papier. Deuxième (petite) chance pour un siège féminin: la démocrate-chrétienne Béatrice Hirsch. Dans le cadre d’un deuxième tour, elle pourrait éventuellement s'imposer comme candidate de compromis pour priver la gauche de sa double représentation à la Chambre des cantons. A noter encore la candidature de l'UDC Céline Amaudruz. Ses chances dans un scrutin majoritaire sont toutefois relativement faibles.
10) ARGOVIE
La course aux Etats est très ouverte dans le canton d'Argovie. Les femmes y ont des chances d’outsider. Dans le cadre d'un second tour, la présidente du PDC argovien Marianne Binder pourrait enlever le siège laissé vacant par la socialiste Pascale Bruderer. Entre le candidat du PS Cedric Wermuth, très marqué à gauche, et l'UDC Hansjörg Knecht, elle a une (petite) chance de fédérer une majorité derrière elle en tant que candidate du compromis. L’argument "femme" pourrait lui donner un avantage supplémentaire par rapport aux candidats du PBD et des Vert'libéraux qui peuvent aussi mettre en avant leur positionnement centriste.
11) BÂLE-CAMPAGNE
Le sénateur socialiste Claude Janiak, 70 ans, représente le demi-canton de Bâle-Campagne depuis 1999. Celui qui figure parmi les doyens du Parlement n'a pour l'heure pas annoncé ses intentions en vue des prochaines élections fédérales. En cas de retrait, il pourrait laisser son fauteuil à une femme. En effet, les conseillères nationales écologiste Maya Graf et PLR Daniela Schneeberger seraient de sérieuses candidates pour reprendre son siège.
Pierre Nebel et Didier Kottelat