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Explosion du nombre de permis d'acquisition d'armes en Suisse

Les Suisses sont de plus en plus nombreux à vouloir posséder une arme
Les Suisses sont de plus en plus nombreux à vouloir posséder une arme / 19h30 / 2 min. / le 20 janvier 2019
Le nombre de permis d'acquisition d'armes délivrés par les cantons est en forte hausse en Suisse. A quelques mois de la votation sur la révision de la loi sur les armes, les chiffres prennent une dimension très politique.

En 2017, près de 14'000 permis d'acquisition d'armes - nécessaires pour obtenir un pistolet, un revolver ou un fusil semi-automatique - ont été accordés en Suisse romande, selon un décompte réalisé par la RTS auprès des cantons. Pour toute la Suisse, le chiffre s'établit entre 45'000 et 55'000, a estimé la NZZ.

Même s'il s'est stabilisé dernièrement, le nombre d'autorisations délivrées a explosé ces dernières années; aucun canton romand n'échappe à cette tendance. Seule incertitude: Genève. Les autorités cantonales genevoises n'ont en effet pas été en mesure de nous fournir des statistiques solides avant 2017.

A Berne, 4314 permis ont été attribués en 2017 contre 3087 en 2014, soit une augmentation de près de 40 %. Sur la même période, la croissance atteint 38% en Valais, 31% à Fribourg et 27% dans le canton de Vaud. Neuchâtel et le Jura sont les moins touchés, avec des hausses respectives de 18% et 13%. Et par rapport à 2010, l'évolution est encore plus nette.

Un regain d'intérêt difficile à expliquer

Cedric Schafroth, gérant du stand de tir sportif Shooting Range 45 à Corminboeuf (FR), note un changement récent dans le profil de la clientèle de son établissement, corollaire selon lui de cet engouement pour les armes. "Ce ne sont plus les vieux messieurs de l'armée qui viennent tirer. Nous avons beaucoup de filles et de couples qui découvrent ce loisir", relève-t-il dans le 19h30.

Les experts peinent toutefois à expliquer ce regain d'intérêt pour les armes à feu, d'autant plus que le sentiment de sécurité est au plus haut en Suisse, comme en témoigne la dernière étude sur la sécurité publiée en mai 2018 par l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich. Certains évoquent l'effet du battage médiatique autour des armes ainsi que les efforts de promotion des associations de tir.

Pour le porte-parole de la police cantonale neuchâteloise, cette envolée du nombre de demandes de permis d'acquisition est plutôt une bonne nouvelle. "Plus on a de demandes de permis, mieux on maîtrise qui a demandé une arme et qui en possède", affirme Pierre-Louis Rochaix. "On peut donc imaginer que le marché blanc augmente et que le marché gris diminue", ajoute-t-il, relevant par ailleurs que 10% à 15% des permis octroyés ne sont pas utilisés.

La loi sur les armes en toile de fond

Reste que, au-delà des aspects techniques et sécuritaires, la question des armes est éminemment politique. Le 19 mai, le peuple va en effet devoir se prononcer sur la révision de la loi sur les armes. Cette dernière, combattue par référendum, vise à durcir les conditions de détention de certaines armes, notamment les fusils semi-automatiques. Elle découle des nouvelles mesures antiterroristes de l'Union européenne.

"Quand on se penche dans l'histoire, on se rend compte que dès que l'on a eu des renforcements de la loi sur les armes, il y a également eu une diminution des droits des citoyens. Et ça, nous ne le voulons pas", estime Robin Udry, secrétaire général de Pro Tell, le lobby des armes. Et le Valaisan de dénoncer une loi "inutile": "Aujourd'hui, il y a déjà des contrôles et on constate qu'il n'y a pas de problèmes avec les armes en Suisse."

A l'inverse, la socialiste vaudoise Brigitte Crottaz, qui défend la révision de la loi, regrette la prolifération des armes en Suisse et déplore à ce titre la hausse du nombre de permis octroyés. "Les statistiques l'ont prouvé: plus il y a d'armes, plus il y a de suicides, principalement, mais aussi d'homicides. Donc plus on augmente le nombre d'armes, plus on aura de problèmes à l'avenir", argumente la conseillère nationale.

Des millions d'armes en circulation

Selon les estimations, entre 2,3 et 3,4 millions d'armes à feu sont en circulation en Suisse, ce qui place les Helvètes parmi les peuples les plus armés au monde. Pourtant, contrairement aux Etats-Unis, le pays n'a plus connu de tuerie de masse depuis la fusillade du Parlement de Zoug, qui avait fait 15 morts en septembre 2001.

Le nombre de morts est même en baisse constante depuis la fin des années 1990, indiquent les chiffres de l'Office fédéral de la statistique. En 1998, les armes à feu avaient fait 466 victimes en Suisse, dont 413 suicides. En 2015, ce chiffre avait diminué de plus de moitié pour atteindre 231 victimes. Sans compter les personnes ayant mis fin à leurs jours, il ne restait cette année-là plus que 20 décès.

A titre de comparaison, les armes à feu ont fait pas moins de 37'200 morts aux Etats-Unis en 2016, dont 23'800 suicides, selon une vaste étude publiée l'été dernier dans le Journal of the American Medical Association.

Reportage TV: Fanny Zürcher

Adaptation web: Didier Kottelat

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L'enquête humoristique du Daily Show en Suisse

Intriguée par la différence entre le nombre de morts par arme à feu en Suisse et aux Etats-Unis, l'émission satirique américaine The Daily Show s'est rendue en Suisse pour comprendre la spécificité helvétique, rencontrant notamment l'ancien conseiller fédéral Samuel Schmid lors d'une fête de tir.

Le reportage humoristique en deux épisodes, intitulé "La Suisse: tant d'armes à feu, pas de fusillade de masse", a été diffusé le mois dernier dans l'émission phare de la chaîne Comedy Central. Il a été visionné des centaines de milliers de fois sur les réseaux sociaux, suscitant de vives réactions.

>> Les deux reportages du Daily Show (en anglais):