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Les actes pédophiles ne seront plus prescrits

L'initiative de Marche Blanche a été acceptée de justesse.
L'initiative de la Marche Blanche a été acceptée de justesse.
Les Suisses veulent que les victimes de pédophiles puissent porter plainte durant toute leur vie. Désavouant les autorités, 51,9% des votants ont accepté l'initiative de la Marche Blanche. Seuls six cantons l'ont rejetée.

Concernant les autres objets fédéraux, la retraite flexible n'a pas passé la
rampe et la modification de la loi sur les stupéfiants a été acceptée contrairement à l'intiative sur le cannabis . Enfin, le droit de recours limité a été
balayé par le peuple suisse ( tous les résultats fédéraux et cantonaux dans le dossier TSR ).

L'émotion a primé

Quant à l'imprescriptibilité, faisant primer l'émotion sur les
arguments juridiques, un peu plus de 1,2 million d'électeurs ont
estimé que les personnes ayant été abusées sexuellement dans leur
enfance doivent pouvoir réclamer justice en tout temps. Voir la carte des résultats par canton . Quelque 1,1 million de citoyens ont
glissé un "non" dans l'urne. Au final, environ 87'000 voix ont fait
pencher la balance.



A l'exception de l'UDC, les grands partis et le Conseil fédéral
misaient sur le contre-projet adopté en juin par le Parlement. Ce
dernier a révisé le code pénal de sorte que le délai de
prescription coure à partir de la majorité des victimes. Celles-ci
auraient ainsi pu faire condamner leur abuseur jusqu'à ce qu'elles
aient fêté leurs 33 ans.

Victoire à l'arraché

Vingt cantons, dont trois romands, ont refusé de se contenter de
cette solution. Le soutien le plus net à l'imprescriptibilité des
actes pédophiles a été enregistré à Schwyz et à Schaffhouse, avec
57,8% de "oui" dans les deux cas. Ils sont talonnés par St-Gall
(57,4%) et le Tessin (57,2%).



Cette initiative a divisé la Suisse romande. Les cantons
catholiques l'ont approuvée: le "oui" a atteint 56,2% en Valais,
55% à Fribourg et 52,4% dans le Jura. Par contre, Vaud (60,1% de
"non"), Genève (57,1%) et Neuchâtel (55,2%) l'ont rejetée. Idem
pour Berne (51,3%) et les demi-cantons alémaniques de Nidwald
(52,3%) et d'Appenzell Rhodes-Intérieures (53,2%).



ats/jeh

LE CONSEIL FEDERAL EST PLUTOT
SATISFAI
T



Le Conseil fédéral a encaissé une défaite partielle lors des
votations de dimanche, avec le "oui" à l'imprescriptibilité des
actes pédophiles. La concrétisation de l'initiative de la Marche
Blanche ne sera pas simple, a averti Eveline Widmer-Schlumpf. La
conseillère fédérale, accompagnée de ses collègues Pascal Couchepin
et Moritz Leuenberger devant la presse, a fait contre mauvaise
fortune bon coeur à l'issue du scrutin.

En acceptant ce texte, les citoyens ont montré clairement que
les pédophiles ne devaient pas pouvoir se cacher derrière la
prescription, a relevé la ministre de la justice. "Visiblement, nos
arguments pratiques et juridiques n'ont pas convaincu la majorité
face à ce sujet très émotionnel".



La conseillère fédérale s'est engagée à ce que le nouvel article
constitutionnel ne reste pas "lettre morte" au niveau du code
pénal.



Pascal Couchepin ne s'est en revanche pas privé de sourire en
commentant les résultats des trois objets relevant du Département
fédéral de l'intérieur. Le rejet de l'initiative demandant la
retraite flexible dès 62 ans est "clair".



"Le peuple a aussi approuvé une politique de la drogue qui a fait
ses preuves", a déclaré Pascal Couchepin. L'initiative pour la
dépénalisation de la consommation de cannabis ne cadre pas avec la
politique globale adoptée en matière de stupéfiants.



Enfin, Moritz Leuenberger s'est réjoui de l'échec de l'initiative
radicale qui voulait limiter le droit de recours des organisations
écologistes. "Ce refus constitue une reconnaissance de la
protection de l'environnement et un signe de confiance à l'égard de
ces organisations".

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Les réactions: une longue tâche

Le oui inattendu à l'initiative pour l'imprescriptibilité des actes de pornographie enfantine signifie avant tout beaucoup de travail pour le Parlement. Il s'agit de rendre le texte effectivement applicable, selon ses opposants.

Visiblement très surprise de son "incroyable" victoire, la présidente de Marche blanche, Christine Bussat, espère être associée à la mise en oeuvre de son initiative qu'elle admet incomplète. "On a fait une erreur, que le Conseil fédéral devra corriger, en n'incluant pas les atteintes graves à l'intégrité physique contre les enfants dans notre texte", a-t-elle dit. En revanche, elle reste persuadée que le terme de "puberté", largement critiqué par les opposants, est approprié.

Pour le PDC, le PRD, le PS et les Verts, opposés à l'initiative, le Parlement a désormais la tâche de fixer un âge clair pour les victimes d'abus imprescriptibles.

Mais il faudra aussi définir ce qu'est "un acte d'ordre sexuel ou pornographique", soulignent la PDC Barbara Schmid-Federer et le socialiste Carlo Sommaruga.

Cela prendra du temps, regrette l'Association suisse pour la protection de l'enfant. Et en attendant, les victimes ne sont toujours pas plus protégées, a déploré l'ancienne présidente Andrea Burgener Woeffray, favorable au contre-projet qui aurait pu entrer immédiatemment en vigueur.

Le PS et les Verts estiment qu'il faut désormais tout mettre en oeuvre pour accélérer les dénonciations afin d'éviter que des procès aient lieu 40 ans après des faits. Les efforts doivent être renforcés pour briser la loi du silence autour des abus sexuels, ont dit Carlo Sommaruga et Luc Recordon.

Certaines incohérences dans la législation suisse devront être revues, puisque l'abus d'un enfant peut désormais apparaître comme un délit plus grave que le meurtre d'un enfant, estime aussi Yvan Perrin, vice-président de l'UDC, seul parti favorable à l'initiative. Le Neuchâtelois se félicite toutefois du message clair envoyé aux abuseurs: "vous ne serez jamais en paix", a-t-il dit sur les ondes de la RSR.

Le score serré de dimanche a laissé quelques regrets aux opposants. "Il est dommage que les partis et les élus ne se soient pas davantage engagés", a noté Carlo Sommaruga.

Le porte-parole du PRD, Damien Cottier, et le PDC Maurice Chevrier ont mis en cause le nombre d'objets pour justifier l'absence de campagne sur ce sujet compliqué juridiquement et très émotionnel.