C’est un message fort aux cantons: on ne peut pas indéfiniment faire des économies sur le dos des bénéficiaires de subsides. L'injonction vient du Tribunal fédéral (TF), avec dans son viseur le canton de Lucerne.
Selon le TF, le seuil d'accès aux subsides à l'assurance maladie dans le canton de Lucerne pour 2017 est trop bas. Ces dernières années, Lucerne a en effet plusieurs fois durci les critères donnant accès à une aide pour payer les primes maladie des enfants et jeunes adultes.
En 2008, un revenu net de 100'000 francs y donnait droit. Puis on est passé à 75'000 francs. Puis à 54'000 francs en 2017.
La Suisse romande concernée
L’autonomie des cantons pour déterminer un revenu bas ou moyen n’est pas sans limite, a tranché le TF. "Cela montre clairement que l’aide au paiement des primes utilisée comme mesure d’économies doit être limitée", souligne Guido Graf, ministre lucernois de la Santé, mis sous pression par le Parlement de son canton. "Le peuple a droit à des réductions, particulièrement les familles avec enfants, et ça ressort nettement de ce jugement."
La Suisse romande est concernée de près par cette décision. En 2017, 534'000 Romands touchaient une aide pour payer leurs subsides. Pour cause de difficultés budgétaires, des cantons comme Neuchâtel ou le Valais ont eux aussi réduit le nombre de bénéficiaires.
Jurisprudence pour les autres cantons
"Le jugement du Tribunal fédéral fait office de précédent pour les autres cantons", confirme Thomas Gächter, professeur du droit des assurances sociales à l'Université de Zurich. "Ces dernières années, beaucoup d’entre eux ont quasi systématiquement réduit leur participation aux coûts des assurances maladie."
Plus largement, la décision du TF relance la discussion sur les coûts de la santé et leur prise en charge par la société. "Les aides pour les primes agissent provisoirement comme des calmants administrés aux citoyens", observe Tilman Slembeck, professeur à l'Université des sciences appliquées de Zurich. Avec comme corollaire d'éviter le débat sur les économies à faire dans la santé. "On n’a pas osé affronter les questions éthiques et elles reviennent maintenant sur le tapis".
Ultimatum du PS
Selon le PS, d'autres cantons, dont Berne, Argovie ou le Valais, violent la décision du TF. Le parti accorde aux cantons concernés un délai d’un mois pour réexaminer leurs limites, a-t-il déclaré lundi devant la presse. Dans le cas contraire, il intentera une action en justice contre les cantons qui rechigneraient ou tarderaient à appliquer cette décision.
David Berger/SRF/kkub