La droite a réussi à s'imposer sur toute la ligne: la réforme ne
prévoit plus que des économies, à hauteur de 800 millions de francs
par an. Il s'agit là d'une «amélioration modeste dont l'AVS aura
besoin pour faire face aux turbulences à venir», a jugé Guy
Parmelin (UDC/VD).
Veste retournée
Les radicaux ont finalement fait bloc avec les démocrates du
centre et quelques PDC. Initialement, ils avaient pourtant prôné le
renvoi du projet au Conseil fédéral en vue d'obtenir une nouvelle
version comprenant une retraite flexible vers le haut aussi.
Quant à Pascal Couchepin, il s'est montré mitigé face au résultat
des délibérations. «C'est à vous de juger si cette révision a des
chances devant le peuple», privée comme elle l'est d'un coup de
pouce social pour une retraite anticipée, a prévenu le ministre de
l'intérieur.
Menaces de référendum
Socialistes, Verts et une partie des démocrates-chrétiens ont
brandi - en vain - la menace de la sanction populaire tout au long
du débat. «On ne peut pas relever l'âge de la retraite des femmes
sans attribuer le moindre franc à la retraite flexible», a critiqué
Thérèse Meyer (PDC/FR). Le peuple a refusé un projet quasiment
identique par 70 % des voix le 16 mai 2004.
En clair, la droite a choisi une nouvelle fois de foncer dans le
mur, a renchéri Hugo Fasel (PCS/FR) au nom des Verts. Pour le
président de l'Union syndicale Paul Rechsteiner (PS/SG), cette
révision est «mort-née». «C'est du pur démantèlement social sur le
dos des rentiers, des femmes et des travailleurs à bas revenu».
Indignation et satisfaction
Même indignation du côté de Travail.Suisse. Sans corrections
substantielles de la part du Conseil des Etat, l'organisation
faîtière des syndicats chrétiens annonce qu'elle «lancera le
référendum» et prédit qu'elle «gagnera la votation».
L'Union suisse des arts et métiers affiche a contrario une «grande
satisfaction». «Compte tenu des perspectives de financement peu
encourageantes, il est important que les économies résultant du
relèvement de l'âge de la retraite des femmes soient utilisées pour
la consolidation de nos assurances sociales», écrit l'USAM.
Retraite à 65 ans
Le relèvement de l'âge de la retraite des femmes de 64 à 65 ans
a été adopté par 120 voix contre 69 de gauche. Cette mesure devrait
entraîner des économies de 620 millions par an. Un régime
transitoire est censé atténuer le choc pour les femmes en passe de
partir à la retraite.
Avec leur espérance de vie plus élevée, les femmes touchent l'AVS
plus longtemps. Il n'y a aucune raison de ne pas instaurer
l'égalité entre les sexes dans ce secteur, a déclaré Marianne
Kleiner (PRD/AR).
Pas de flexibilité
Mais pas question d'investir tout ou partie des deniers épargnés
au détriment des femmes dans des mesures pour aider les
travailleurs à bas revenu à prendre une retraite anticipée. La
droite a balayé tous les modèles de flexibilisation proposés. Même
la variante la meilleur marché, qui visait à attribuer à la
retraite à la carte 400 des 800 millions d'économies réalisés grâce
à la 11e révision de l'AVS, a été rejetée par 97 voix contre 86 et
11 abstentions.
Dans ces conditions, les modèles exigeant des investissements
allant de 800 millions à 1,4 milliard n'ont eu aucune chance. Quant
à l'idée de Pascal Couchepin d'accorder une rente-pont à certaines
catégories de personnes défavorisées, elle a été enterré
tacitement.
Indexation des rentes
Autre sujet de mécontentement pour la gauche, l'indexation des
rentes vieillesse risque de ne plus avoir lieu automatiquement tous
les deux ans. Par 130 voix contre 64, la Chambre du peuple a décidé
de lier le rythme du renchérissement au niveau du Fonds de
compensation de l'AVS.
A l'avenir, le taux de couverture minimal du Fonds devrait être
porté à 70 % des dépenses de l'AVS, contre 100 % aujourd'hui. Mais
si ce niveau n'est pas atteint, les rentes ne seront pas adaptées.
Il n'y aurait une hausse que si l'inflation dépasse 4 %.
Dans la foulée, la Chambre du peuple a recommandé au peuple de
rejeter l'initiative populaire de l'USS pour une retraite flexible,
par 123 voix contre 66. Ce texte, qui demande l'octroi d'une rente
complète dès 62 ans pour les revenus inférieurs à 120 000 francs,
constitue la seule réponse à la révision de l'AVS imposée par la
droite, selon Paul Rechsteiner.
ats/het/tac
AI : hausse de la TVA acceptée
Le National a fini par accepter mardi une hausse de la TVA pour renflouer les caisses de l'assurance invalidité. Il a opté pour une augmentation linéaire de 0,4 point pendant 7 ans, se montrant moins généreux que le Conseil des Etats en décembre.
Cette hausse, proposée par Pierre Triponez (PRD/BE), a été adoptée par 95 voix contre 86 et 9 abstentions. La majorité de droite s'est ainsi écartée de l'augmentation temporaire de la TVA, de 0,5 point pour le taux usuel et de 0,2 point pour les deux autres (biens de première nécessité et hôtellerie), défendue par le gouvernement et le Conseil des Etats.
La gauche, une partie des radicaux et des démocrates-chrétiens ont plaidé en vain pour que le National se rallie à la Chambre des cantons. «Pour éviter l'hémorragie de l'AI, nous devons à la fois faire des économies, mais aussi trouver de nouveaux financements», a relevé Claude Ruey (PLS/VD).
La gauche se voulait plus généreuse avec un hausse de 0,7 point, car «l'AI a besoin d'argent et qu'il s'agit d'éviter à tout prix un endettement supplémentaire». Nous tenons avant tout à défendre les prestataires de l'AI, «otages du débat politique et régulièrement menacés», a souligné Silvia Schenker (PS/BS)
L'UDC n'a pas eu plus de succès. Le parti refuse purement et simplement de revoir la TVA à la hausse pour couvrir le déficit annuel de l'assurance invalidité, qui s'élève à environ 1,5 milliard de francs.
Le problème de la dette de l'AI, qui dépasse 10 milliards, doit encore être réglé. Pour éviter que le trou mette en péril, à terme, les versements des rentes vieillesse, un fonds autonome devrait être créé pour cette assurance. Cinq milliards de francs puisés dans les caisses de l'AVS lui seraient attribués lors de sa création.
Le National a donné son feu vert mardi au principe de découpler le fonds AVS de celui de l'AI lors du débat d'entrée en matière.
Mercredi, la gauche comme la droite tenteront d'amener des corrections au projet adopté au Conseil des Etats. L'UDC, qui ne veut pas «piocher dans le fonds de l'AVS», va tenter encore une fois de renvoyer le projet au Conseil fédéral.
En mars 2007, la Chambre du peuple avait refusé le projet visant à renflouer l'AI pour des raisons tactiques. La droite avait posé son veto au motif que le conseil avait peu avant renoncé à limiter dans le temps la hausse de la TVA. La Chambre des cantons s'était alors attelée à l'élaboration d'un compromis.