Une centaine de cadres de Swiss Post Solutions (SPS), une filiale de La Poste employant 7500 collaborateurs dans 24 pays, se sont rendus les 21 et 22 janvier à Hô-Chi-Minh-Ville, au Vietnam, pour une conférence annuelle, indique le Blick mercredi. Les participants venaient du monde entier, mais essentiellement d'Europe, relève le quotidien alémanique.
L'organisation de ce séminaire à 10'000 kilomètres de la Suisse ne pose aucun problème à la maison-mère. "SPS est une entreprise internationale et il est logique que ces conférences se déroulent sur les différents sites de la société", comme ce fut le cas ces dernières années en Suisse ou en Allemagne, affirme Oliver Flüeler, porte-parole de La Poste.
Selon une estimation citée par le Blick, la conférence d'Hô-Chi-Minh-Ville aurait coûté au moins 200'000 francs. La Poste ne confirme pas ce chiffre, mais précise que "le coût total de la réunion de cette année correspond à celui des années précédentes et est normal pour des voyages de cette taille".
Des séminaires (quasi) uniquement en Suisse
Dans les autres sociétés parapubliques, la pratique est plus restrictive. Une seule des entreprises contactées - Swisscom, les CFF, RUAG, Skyguide et la SSR (qui chapeaute la RTS, ndlr) - admet avoir tenu des séminaires de cadres hors de Suisse. Il s'agit de RUAG, qui dispose de filiales dans une dizaine de pays, notamment européens.
Il n'y a pas de "grands voyages" chez RUAG.
"Au niveau du groupe, il y a généralement une fois par an une réunion des cadres supérieurs (environ 70 personnes). Ces séminaires ont lieu en Suisse ou dans les pays voisins comme l'Allemagne ou l'Autriche", indique l'entreprise d'armement, détenue à 100% par la Confédération. "Il n'y a pas de "grands voyages" chez RUAG", précise la porte-parole Kirsten Hammerich.
Pas de transparence sur les chiffres
Toutes les autres entreprises organisent leurs séminaires de cadres en Suisse uniquement, sur un ou deux jours, et le plus souvent dans leurs propres locaux, affirment-elles. "Nos rencontres annuelles de cadres ont toujours lieu en Suisse et le voyage aller-retour se fait en train spécial", indique ainsi Frédéric Revaz, porte-parole des CFF.
Nous ne nous sentons pas vraiment concernés par le sujet.
En fonction du nombre de participants, Swisscom explique pour sa part louer parfois des espaces adaptés, "du type de l'Arena à Genève". Mais "ce n'est en aucun cas comparable au cas touchant La Poste, et il n'existe aucun équivalent chez Swisscom", souligne la porte-parole Alicia Richon. "Nous ne nous sentons pas vraiment concernés par le sujet", conclut-elle.
Aucune des entreprises contactées n'a souhaité communiquer le coût des séminaires de cadres.
Didier Kottelat et Rouven Gueissaz
Un contexte difficile pour La Poste
La Poste a récemment dû faire face à de nombreuses affaires, au premier rang desquelles figure la fraude aux subventions publiques dans sa filiale CarPostal. Cette dernière a accepté en septembre de rembourser plus de 205 millions de francs aux collectivités publiques flouées durant plus de 10 ans.
Ce scandale a provoqué une vague de départs. La direction de CarPostal dans son ensemble a été remerciée, tandis que la directrice générale de La Poste Susanne Ruoff a été poussée à la démission. Son poste est tenu ad interim par Ulrich Hurni, en attendant l'entrée en fonction de son successeur Roberto Cirillo en avril.
Parallèlement, La Poste doit gérer les mauvais résultats de sa filiale PostFinance, qui a annoncé en juin vouloir supprimer jusqu'à 500 postes d'ici 2020. L'entreprise est par ailleurs en pleine restructuration. Fin 2016, elle a annoncé vouloir réduire de 1400 à 800 ou 900 le nombre de bureaux de poste.
Rapport sur la gouvernance attendu
Après l’affaire CarPostal ou le piratage de données chez RUAG, ce nouveau cas chez Swiss Post Solutions relance le débat sur la gouvernance des sociétés parapubliques.
"La question de la gouvernance est importante. Le Conseil fédéral a mandaté un contrôle externe et il va falloir faire le bilan et regarder si les entreprises proches de la Confédération fonctionnent bien, de même que leur surveillance", estime Edith Graf-Litscher (PS/TG), présidente de la commission des transports et des télécommunications du Conseil national.
Le rapport du Conseil fédéral doit être publié ce printemps. Il pourrait bien remettre les pendules à l’heure sur la transparence au sein des entreprises proches de la Confédération.