Le groupe parlementaire UDC, qui s'est réuni jeudi en conclave
dans les usines Jura à Niederbuchsiten (SO), n'a ainsi voulu ni
"tuer le père" ni renoncer à proposer aux autres partis d'élire
celui que l'Assemblée fédérale a évincé du gouvernement il y a près
d'un an.
Sans illusions
Devant la presse, les responsables du parti ont d'ailleurs tenus
à vanter les qualités de Christoph Blocher. Tout en considérant que
sa candidature n'était pas un alibi, le tribun zurichois ne se fait
toutefois pas trop d'illusions. "Il est clair que le Parlement ne
veut pas de moi". "Si je ne suis pas élu, je serai toujours à
disposition du parti", a-t-il affirmé.
En optant pour un ticket Christoph Blocher plus un autre candidat,
environ deux tiers des membres du groupe se sont ralliés à la
proposition de son comité directeur. Le choix du deuxième poulain a
toutefois donné un peu de fil à retordre.
Lors d'un premier tour, le Zurichois Ueli Maurer a obtenu 26 voix
contre 12 au Bernois Adrian Amstutz et 7 au Schaffhousois Hannes
Germann. Lors d'une 2e tour, 44 voix sont allées à Ueli Maurer
contre 16 à Adrian Amstutz.
Le président du groupe Caspar Baader a expliqué avoir retiré sa
candidature en début de séance au profit d'Ueli Maurer et que ce
dernier a accepté de se lancer dans la course sous la pression du
parti.
Au final, le ticket Blocher-Maurer a été soutenu par 60 voix sans
opposition. C'est une véritable double candidature qui représente
les valeurs de l'UDC et la meilleure solution pour le parti et la
Suisse, a affirmé Caspar Baader.
Maurer jauge l'ampleur de la tâche
Donné favori par de nombreux
observateurs pour reprendre le siège laissé libre par Samuel Schmid
mais pas officiellement candidat, Ueli Maurer a quant à lui
justifié sa valse hésitation. La condition pour qu'il accepte de
figurer sur le ticket était d'y être avec Christoph Blocher.
"Je n'aurais pas accepté avec une autre constellation". Et
l'ex-président du parti de souligner l'ampleur de la charge qui
l'attend. "Il faut beaucoup de force". Le Département fédéral de la
défense est en mauvais état. Il ne sera pas facile d'être le seul
UDC au Conseil fédéral. Les critiques des autres partis ne
manqueront pas.
Ueli Maurer a assuré que ce n'était pas le prestige qu'il
l'attirait et que sa famille soutenait sa candidature. Il ne voit
pas non plus de problème personnel à siéger avec Eveline Widmer
Schlumpf, que l'UDC a exclue de ses rangs pour avoir accepté son
élection au gouvernement.
En attendant le verdict du Parlement
Si le parti compte sur
son ancien président pour retourner au gouvernement après un an
d'opposition, en attendant d'être représenté par les deux ministres
"auquel il a droit", le dernier mot reviendra toutefois à
l'Assemblée fédérale, qui tranchera le 10 décembre.
Les autres formations, qui ont fait clairement connaître leur
opposition à un retour de Christoph Blocher, semblent donner de
signaux rassurants à Ueli Maurer, le jugeant apte à collaborer.
Elles pourraient néanmoins tenter le forcing jusqu'au bout en
élisant un autre UDC.
Les démocrates du centre n'entendent pas plancher sur cette
hypothèse pour l'instant. Les candidats non retenus par le groupe
ont assuré qu'ils n'accepteraient pas une élection au Conseil
fédéral, a souligné Caspar Baader.
ats/jeh
Les prétendants déçus
Sur la liste des candidats UDC figuraient:
-Caspar Baader (BL)
-les conseillers nationaux Adrian Amstutz et Andreas Aebi (tous deux bernois)
-Bruno Zuppiger (ZH)
-Pirmin Schwander (SZ) qui est également président de l'ASIN
-le conseiller aux Etats schaffhousois Hannes Germann
-les conseillers d'Etat Rita Fuhrer (ZH) et Jean-Claude Mermoud (VD)
-Erich Hess (Jeunes UDC/BE).
La voie semble libre
L'ancien président de l'UDC Ueli Maurer semble bien parti pour siéger au Conseil fédéral.
"Ueli Maurer a des chances d'être élu par le Parlement" au Conseil fédéral, a indiqué le président du PDC Christophe Darbellay.
Opposé au retour de Christoph Blocher, le groupe PDC/PEV/Verts libéraux auditionnera néanmoins les deux candidats de l'UDC le 9 décembre, a-t-il annoncé.
Le groupe n'entendra aucun autre prétendant de l'UDC ou d'un autre parti.
Selon Christophe Darbellay, Ueli Maurer est d'un côté l'idéologue et le président de parti, de l'autre une personne capable de pragmatisme et de collaborer.
Mais pour le PDC, le respect de la concordance et de l'Etat de droit n'est pas négociable.
Si Ueli Maurer n'est pas personnellement acquis à la voie bilatérale, il devra porter les décisions du gouvernement.
Pour le PRD aussi, le double ticket de l'UDC n'est en réalité qu'une seule candidature.
Le groupe libéral-radical invitera Christoph Blocher, mais simplement pour lui signifier qu'il n'a aucune chance d'être élu, a déclaré Gabi Huber, cheffe du groupe.
Pour Gabi Huber, Ueli Maurer est en revanche "un candidat valable". Il sera entendu par le groupe parlementaire du PRD pendant la première semaine de décembre.
Du côté de PS, la cheffe du groupe Ursula Wyss trouve aussi que présenter un seul nom serait revenu au même.
Le groupe PS auditionnera Ueli Maurer le 9 décembre.
Le groupe du PS va aussi entendre le candidat des Verts Luc Recordon. Mais ses chances d'être élu par l'Assemblée fédérale "évaluées de façon réaliste" semblent faibles, a poursuivi Ursula Wyss.
Les Verts semblent ainsi bien seuls.
Selon leur secrétaire général Hubert Zurkinden, ils n'auditionneront très probablement ni Christoph Blocher, ni Ueli Maurer et invitent les autres partis à n'élire aucun des deux.
La balle est dans le camp du PS et du PDC, assurent les Verts.
Reste à savoir si les deux partis vont "de nouveau se prosterner devant l'UDC".