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Turquie: le barrage d'Illisu prend l'eau

Le barrage d'Ilisu menace la cité millénaire d'Hasankeyf.
Le barrage d'Illisu menace Hasankeyf, une cité millénaire.
Le financement du barrage d'Ilisu en Turquie est compromis. Selon des sources gouvernementales allemandes, les conditions posées pour obtenir les garanties au risque d'exportation des gouvernements suisse, allemand et autrichien n'ont pu être remplies.

La Frankfurter Rundschau a rapporté dans son édition
électronique que le gouvernement allemand se retirerait du projet à
l'expiration d'un délai fixé au 6 juillet. Les résultats de
l'enquête indiqueraient que la Turquie n'est pas prête à remplir
les quelque 150 conditions posées à l'obtention des garanties de
crédit.



Dans les premières consultations menées avec Berlin, Berne et
Vienne auraient également déjà signalé leur accord de se retirer du
projet.

Décision "politique" à prendre

Il ne manque désormais plus qu'une décision politique, a
renchéri Christine Eberlein, de la Déclaration de Berne (DB).
Interrogée par l'ATS, Ch.Eberlein a déclaré avoir reçu une
confirmation officielle de ce retrait lors d'un voyage en Turquie
il y a deux semaines.



L'Assurance suisse contre les risques à l'exportations (ASRE) n'a
pas voulu confirmer la décision de retrait, de même que ses
homologues, la Banque de contrôle autrichienne (OeKB) et le
Ministère allemand de l'Economie. Selon ce dernier, aucune décision
n'aurait été prise jusqu'à présent.



Interrogée par l'ATS, une porte-parole de l'ASRE a de son côté
déclaré que l'institution suisse "examine encore la réalisation des
conditions posées, et ceci, jusqu'à la fin du délai".

Satisfaction des ONG

Quoi qu'il en soit, les organisations de défense de
l'environnement se sont d'ores et déjà félicitées de cette décision
de principe des trois pays. La Déclaration de Berne (DB) a salué
dans un communiqué la "sensation" que constitue ce retrait. Les
défenseurs turcs de l'environnement se sont eux aussi félicités de
la décision de la Suisse, de l'Autriche et de l'Allemagne.



La campagne contre le barrage d'Ilisu a remporté un succès, s'est
réjoui un porte-parole de l'association Doga Dernegi, qui fait
campagne depuis des années contre ce projet.

Le délai de six mois quasi écoulé

Berne, Berlin et Vienne avaient décidé à la fin décembre de
suspendre travaux et livraisons de leurs entreprises oeuvrant au
projet turc de barrage controversé d'Ilisu. Ils avaient donné six
mois à Ankara pour remplir ses engagements, faute de quoi ils se
retireraient du projet.



La Confédération avait accordé des garanties contre les risques à
l'exportation à hauteur de 225 millions de francs aux quatre
entreprises helvétiques impliquées dans ce projet. L'Autriche et
l'Allemagne avaient également accordé des garanties similaires à
leurs sociétés.



Malgré les menaces de retrait des trois pays européens, la Turquie
n'entend pas renoncer à construire son barrage. La presse turque a
rapporté mardi que les responsables du projet avaient décidé de
poser les bases de la digue le 30 juillet prochain.



ats/bri

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Projet controversé

Le barrage d'Ilisu doit être construit sur le cours du Tigre dans le sud-est anatolien. Haut de 135 mètres et long de 1820 mètres, le barrage d'Ilisu devrait disposer d'une capacité de 10'400 milliards de mètres cubes. Il devrait produire 1200 mégawatts (MW), soit 3% des besoins énergétiques de la Turquie.

Le barrage est devisé à 1,5 milliard de francs. Il s'insère dans le cadre du Projet d'Anatolie du Sud-Est (GAP), qui prévoit l'irrigation de 1,7 million d'hectares de terres arides à partir de 22 barrages principaux sur le Tigre et l'Euphrate. Le GAP devrait permettre la création de 3,8 millions d'emplois et générer quelques centaines de millions de francs.

Revers de la médaille, plus de 50'000 habitants devraient être déplacés par l'inondation de dizaines de localités. Ankara assure que tout a été mis en place conformément aux lignes directrices édictées par la Banque mondiale.

De même, le futur lac d'Ilisu provoquera l'ensevelissement du site assyrien de Hasankeyf. Le gouvernement turc prévoit de reconstruire les principaux monuments de cette cité et de bâtir un parc archéologique et un musée.

Les opposants au projet jugent toutefois ces efforts insuffisants. La stratégie d'Ankara ne donne aucune perspective d'avenir aux déplacés, critique la Déclaration de Berne (DB).

En matière culturelle, les mesures de sauvegarde, notamment pour le site de Hasankeyf, sont jugées techniquement et financièrement irréalistes. Par rapport à l'environnement, la DB accuse notamment Ankara de ne pas avoir pris en compte les zones de protection des oiseaux existant actuellement sur le Tigre.