Dans un arrêt publié en fin d'année dernière, le Tribunal fédéral a limité le droit d'expression des cantons dans les campagnes de votation. Il a par exemple jugé inadmissible que la Conférence des directeurs cantonaux des finances donne son avis, dans un communiqué de presse, sur l'initiative populaire Monnaie Pleine.
Nécessaire adaptation des gouvernements
Pour le paquet qui lie la réforme de la fiscalité des entreprises et le financement des retraites (RFFA), soumis à votation le 19 mai prochain, les cantons doivent donc s'adapter.
"Cela veut dire concrètement que le canton de Neuchâtel peut s'exprimer par la voix de son gouvernement, que le gouvernement peut m'autoriser à prendre position comme ministre en charge des questions financières et que l'ensemble des gouvernements peuvent - au sein d'une conférence des gouvernements cantonaux - s'exprimer également", explique le ministre neuchâtelois des Finances Laurent Kurth. "Mais qu'en revanche, la conférence des directeurs des Finances suisses, elle, ne peut pas s'exprimer à ce stade du projet."
Son collègue vaudois Pascal Broulis ou encore le président de la conférence Charles Juillard se sont sentis muselés par le Tribunal fédéral. Ils songent à interpeller le Parlement pour qu'il fixe dans la loi le droit d'expression des cantons avant une votation.
"On est dans une judiciarisation de la démocratie directe"
"Je pense qu'il n'y a pas d'autre réaction possible par rapport à cette décision du Tribunal fédéral", renchérit le Valaisan Christophe Darbellay lundi dans La Matinale.
Les conférences cantonales "sont les interlocuteurs principaux de la Confédération, du Conseil fédéral, des Chambres fédérales lorsqu'on élabore des politiques", rappelle le conseiller d'Etat. "Elles ont une importance prépondérante dans le débat politique et je ne comprends pas que le Tribunal fédéral - qui doit dire le droit - commence à dicter le droit. On est dans une judiciarisation de la démocratie directe."
Rendre aux cantons leur pleine compétence
Le conseiller national PDC Dominique de Buman assure qu'il soutiendrait cette initiative. "Je ne doute pas qu'il y ait une majorité - dans les deux Chambres - pour rendre aux cantons leur pleine compétence de participation au débat démocratique suisse", estime-t-il. "Nous sommes une confédération d'Etats et pas seulement un Etat décentralisé. Les cantons ont leur propre personnalité juridique, leur propre souveraineté, sous réserve des compétences fédérales. Mais on ne peut pas simplement bâillonner les cantons dans leur droit d'expression par rapport à des débats d'intérêt national."
Alexandra Richard/oang