La justice a provoqué un véritable coup de théâtre vendredi
soir. Le TAF a interdit à titre superprovisionnel à l'Autorité de
surveillance des marchés financiers (FINMA) de transmettre les
données bancaires de 300 clients UBS aux autorités fiscales
américaines (IRS).
Cette décision du TAF donne raison à la plainte collective
déposée mercredi à titre préventif par huit clients de l'UBS contre
une décision de la FINMA. Ils avaient entre autres motivé leur
plainte par le fait qu'une telle décision préjugeait de l'issue
finale d'une procédure pénale aux Etats-Unis.
Données déjà transmises
Depuis, la FINMA et l'UBS ont fait savoir que les données
bancaires des 300 clients avaient déjà été fournies conformément à
l'accord. L'autorité estime avoir "respecté la loi", a déclaré
samedi son porte-parole Alain Bichsel. "Les données ont été livrées
le 18 février. Nous n'allons pas fournir d'autres noms", a t-il
précisé.
La FINMA a pris connaissance des mesures superprovisionnelles
décidées par le TAF. La transmission des données malgré une
procédure en cours à l'Administration fédérale des contributions
(AFC) n'enfreint pas la loi. "Notre devoir est de protéger les
créanciers et la stabilité du système", a affirmé Alain
Bichsel.
Le TAF donne à l'UBS et la FINMA jusqu'à mardi pour prendre
position sur sa décision. Alain Bichsel a assuré que son autorité
allait se prononcer. L'UBS s'est bornée à dire qu'elle avait déjà
transmis mercredi à la FINMA les données bancaires des 300
clients.
Autres suites judiciaires?
La livraison des données bancaires pourrait avoir d'autres
suites judiciaires. L'avocat zurichois des huit clients de l'UBS,
Andreas Rüd, se montre très critique à l'égard de la FINMA. "Une
plainte contre la Confédération en raison de l'action de la FINMA
pourrait arriver plus tard à l'ordre du jour", a-t-il
indiqué.
"À ce jour, nous n'avons aucune idée de ce qui a été transmis",
déplore-t-il. "Etaient-ce les mêmes documents que les Etats-Unis
voulaient par le biais de l'entraide judiciaire? S'agit-il à chaque
fois du dossier complet ou uniquement des noms des clients? Nous
n'en savons rien".
Par ailleurs, la FINMA estime que Peter Kurer, l'ancien juriste en
chef et actuel président d'UBS, n'a pas commis d'erreur concernant
la clientèle privée de la grande banque aux Etats-Unis. C'est ce
qui ressort des investigations menées par l'organe de surveillance,
a déclaré le président de celle-ci samedi à la Radio alémanique DRS
Eugen Haltiner.
ats/dk
Les partis réagissent vivement
Réagissant à la décision du TAF, le groupe parlementaire UDC a annoncé son intention de demander un débat urgent sur le secret bancaire lors de la session de printemps. Pour le parti, la décision provisoire de la cour est la preuve qu'il y a un problème dans la manière dont les autorités ont agi.
"Le groupe parlementaire UDC réprouve l'attitude du Conseil fédéral, de la FINMA et de l'UBS", a indiqué samedi son chef Caspar Baader. Ils se sont moqués du droit international et de la procédure d'entraide judiciaire: la décision du TAF le souligne encore une fois, a-t-il déclaré.
"La décision est logique. L'Etat de droit est défendu", a pour sa part indiqué Christophe Darbellay. "Mais sur le fond, ça ne change plus grand chose", regrette le président du PDC. "S'il s'agit effectivement de fraude fiscale, pas de problème, le secret bancaire peut être levé. Sinon, toute l'affaire deviendra beaucoup plus compliquée", a-t-il averti.
De son côté, la cheffe du groupe parlementaire socialiste aux Chambres fédérales, Ursula Wyss, s'est réjouie de cette décision, "même si elle est sans effet pour les données qui ont déjà été transmises". Elle montre que la Suisse garantit la sécurité juridique, ce qui est un signal fort face aux prochaines demandes des Etats-Unis.
Pour Fulvio Pelli, "le département américain de la Justice a convenu avec l'UBS que sa demande d'entraide judiciaire serait retirée. Le TAF n'est donc plus compétent sur la question", a indiqué le président du PRD.Il a ajouté que la FINMA statue sur la base de la Loi sur les banques, et non dans le cadre de l'entraide judiciaire. "Il est donc nécessaire de séparer strictement les deux procédures", a déclaré Fulvio Pelli.