Dans un rapport publié fin février, l'ONG indique que le lobbyisme en Suisse pêche par un manque de transparence. "Il y a une absence totale de législation et nous aimerions contrecarrer le poids excessif de certains intérêts particuliers", assure Eric Martin.
Le président de l'ONG qui combat la corruption demande la création d'un registre des lobbyistes en Suisse. "Chaque personne y indiquerait la nature de son mandat et si elle est rétribuée. Lorsque vous êtes parlementaire et que vous chassez les mandats, vous perdez en indépendance. C'est normal que le public le sache."
Pour Eric Martin, "les plus grands lobbyistes, ce sont les parlementaires eux-mêmes". Il révèle qu'en moyenne chaque parlementaire a entre sept et neuf mandats accessoires.
"Domaine délicat"
Si des propositions de réforme du système ont été faites par le passé, aucune n'a passé la rampe. "Nous sommes dans un domaine délicat. Si nous consultons les données existantes, nous voyons qu'il y a 2000 liens d'intérêt. Près de 1700 organisations sont représentées au Parlement", signale celui qui a fait toute sa carrière au service de la Confédération.
"Il est indispensable de connaître la nature des mandats. Si vous êtes rétribué, cela réduit votre indépendance. En tant que parlementaire, vous êtes censé représenter l'intérêt public. Si vous avez des mandats grassement payés, qui représentent le double voire le triple de votre indemnité de parlementaire, vous allez voter différemment au Parlement", martèle Eric Martin.
Phénomène de mode?
La demande de transparence des autorités est de plus en plus présente dans notre société. "Nous avons la loi fédérale sur la transparence de l'administration publique, qui donne à chaque citoyen le droit d'accéder à des documents internes. Mais ce n'est pas toujours facile de les obtenir, certains offices sont plus réticents que d'autres. Il y a un culte du secret. Ceci dit, nous vivons dans un temps où les citoyens aiment bien savoir comment les décisions sont prises", explique le président de Transparency Suisse.
"C'est un phénomène qui va au-delà de la mode. Une démocratie a besoin de transparence, elle donne confiance aux citoyens. Lorsque vous avez des scandales qui éclatent, ça ébranle la foi des citoyens dans le bon fonctionnement de nos institutions."
Propos recueillis par Ludovic Rocchi
Adaptation web: Guillaume Martinez
Le cas de Pierre Maudet
Pour le président de Transparency Suisse, l'affaire du conseiller d'Etat genevois Pierre Maudet constitue "plus qu'un malaise". Eric Martin demande que des mesures soient prises. "Il faudrait un code de conduite qui indique jusqu'à quel montant vous pouvez accepter une récompense et qui dise ce qui est acceptable ou non."
"Chaque grande entreprise a un tel code. Pourquoi les Parlements en Suisse n'en n'ont pas? Nous demandons des codes de conduite et de déontologie pour les parlementaires et les lobbyistes", déclare Eric Martin.