Les autorités argoviennes s'étaient vu recommander un suivi en
matière de stupéfiants pour le meurtrier présumé de Lucie. A la
libération conditionnelle de ce dernier en août 2008, le centre
fermé du Arxhof (BL) estimait que le jeune homme devait être soumis
à des tests d'urine réguliers.
Le directeur de l'établissement, Renato Rossi, ignore en revanche
quelles suites les autorités argoviennes avaient donné à cette
recommandation, a-t-il déclaré dans une interview publiée mercredi
dans la Basler Zeitung. Rien ne laissait supposer que l'ex-détenu
âgé de 25 ans pouvait récidiver, estime Renato Rossi.
"Il ne s'est pas illustré négativement, avait des contacts avec
ses co-détenus et a terminé son apprentissage de cuisinier au
Arxhof", affirme Rossi. "Jamais nous n'avons vécu un telle forme de
récidive en 18 ans d'existence".
Tentative de meurtre en 2004
Le jeune Suisse avait été condamné en 2004 par la justice
argovienne pour tentative de meurtre à l'âge de 19 ans. Sous
l'emprise de stupéfiants, il avait agressé sauvagement une collègue
de travail en frappant notamment sa tête contre le sol à plusieurs
reprises. L'autorité d'enquête avait commandé une expertise
psychiatrique à la clinique de Königsfelden.
La possibilité d'un internement du coupable avait en outre été
étudiée. L'établissement psychiatrique avait alors constaté des
"problèmes de drogues et des troubles dans le développement de la
personnalité", indique Josef Sachs, responsable du secteur
juridique de la clinique, dans une interview accordée au Blick.
Selon lui, les perspectives d'un succès de la thérapie étaient
bonnes à l'époque, en raison de l'état et du jeune âge du
condamné.
Mardi, le meurtrier présumé de Lucie a avoué avoir tué
l'adolescente fribourgeoise de 16 ans. Il s'était rendu lundi à la
police municipale zurichoise. Dimanche soir, la police argovienne
avait découvert le corps sans vie de la jeune fille dans la salle
de bain de l'appartement du suspect, à Rieden, dans la commune
d'Obersiggental (AG).
Un chauffeur de taxi interrogé
Un chauffeur de taxi qui a conduit à de nombreuses reprises le
meurtrier de la jeune fille au pair a été interrogé mercredi par
les enquêteurs. Si les déclarations qu'il a faites à la presse sont
exactes, il aurait dû s'annoncer depuis longtemps à la police, a
relevé mercredi Rudolf Woodtli, porte-parole de la police cantonale
argovienne.
"Nous sommes très intéressés par ce monsieur et par ce qu'il va
nous dire", a ajouté le porte-parole. Le chauffeur de taxi a
déclaré à plusieurs médias qu'il avait conduit le meurtrier
plusieurs fois à Zurich pour acheter de la cocaïne. Il lui a
également prêté son appareil photo. Le futur meurtrier lui avait
expliqué qu'il avait deux jeunes filles à la maison "qui voulaient
du sexe" (lire ci-contre), et qu'il voulait faire
des photos.
Le chauffeur avait ensuite reconduit les filles traumatisées. Des
photos de cette nuit se trouvaient encore sur l'appareil photo
lorsqu'il l'a récupéré. Si ses déclarations sont exactes, le
chauffeur de taxi aurait dû se rendre immédiatement à la police, a
souligné Rudolf Woodtli.
On ne sait pas pourquoi il ne l'a pas fait. Durant ces prochains
jours, les enquêteurs vont interroger des personnes proches du
meurtrier. De nouvelles informations sur l'avancement de l'enquête
seront publiées jeudi lors d'une conférence de presse à Aarau
(AG).
ats/mej
Couac dans la transmission des données
La police aurait peut-être pu retrouver plus tôt le meurtrier de Lucie. Mais un malentendu dans la procédure visant à obtenir les données du téléphone portable de la jeune fille a entravé l'enquête.
La procureure schwyzoise Christina Müller avait demandé vendredi au DFJP de lui fournir les données du téléphone portable de Lucie. Elle souhaitait savoir avec qui Lucie, ou son ravisseur, avait eu des contacts depuis sa disparition mercredi dernier.
Mais les données n'ont été transmises que mercredi soir, comme l'a indiqué Christina Müller à la TSR.
La procureure a expliqué que le président du Tribunal cantonal de Schwyz, Martin Ziegler, est intervenu auprès des autorités fédérales compétentes afin que les données ne soient pas transmises.
De son côté, Martin Ziegler s'est défendu d'une telle intervention. Selon lui, les données ne sont pas parvenues à temps en raison d'un malentendu entre tous les acteurs impliqués.
Témoignage d'une "rescapée" dans la presse
Le Blick relatait mercredi un témoignage effrayant, celui d'une jeune fille de 15 ans, Ramona, qui a échappé au meurtrier de Lucie en janvier dernier. Elle a aussi été abordée par Daniel H., qui lui proposait de faire des photos.
C'était à la gare centrale de Zurich, le 24 janvier. Avec une amie de son âge, elles le suivent. Cet homme les emmène dans son appartement, le même que celui où Lucie a été retrouvée. Ensuite, il les laisse seules durant une heure.
Les deux jeunes filles prennent peur. Ramona appelle sa mère, qui les encourage à quitter ce lieu, par n'importe quel moyen. Enfermées à l'intérieur Mais elles s'aperçoivent alors que Daniel les a enfermées.
A son retour, il les oblige à prendre de la cocaïne, puis veut avoir des relations sexuelles avec elle. Mais elles refusent. Il repart et revient avec une caméra. Les deux adolescentes menacent alors d'appeler la police et cela marche. Daniel H. renonce et les laisse partir.
Affolées, les deux jeunes filles regagnent Zurich tôt le lendemain matin. Elles ne veulent pas raconter les détails de cette nuit d'horreur à leurs parents. Ceux-ci ont renoncé à porter plainte.