Les conservateurs de l'UDC et du PDC ainsi que certains
libéraux-radicaux ont d'abord tenté d'enterrer purement et
simplement la nouvelle législation élaborée par la commission des
affaires juridiques. Le refus d'entrée en matière a échoué de peu
(89 voix contre 98 et 5 abstentions).
Se limiter au minimum
Par 99 voix contre 92 et 2 abstentions, la Chambre du peuple a
en revanche accepté de renvoyer le projet en commission avec mandat
de se limiter aux seules modifications rendues absolument
nécessaires par l'arrêt publié en 1994 par la Cour européenne des
droits de l'homme. Ce dernier constatait que la législation suisse
ne respectait pas l'égalité des sexes.
Le code civil, qui fait concorder nom de l'époux et nom de
famille, n'accorde en effet qu'à l'épouse le droit de garder son
nom suivi de celui de son mari. La possibilité pour l'époux de
porter un double patronyme, impossible il y a quinze ans, est
certes désormais accordée mais elle n'est pas ancrée dans la
loi.
Les orateurs de gauche, du PLR et du PBD, soutenus par la
conseillère fédérale Eveline Widmer Schlumpf, ont dénoncé le renvoi
en commission. Depuis l'échec de la précédente réforme il y a huit
ans, toutes les variantes ont été étudiées. Il ne devrait rien
ressortir de nouveau.
Réforme contestée
La réforme soumise au National aurait donné la possibilité aux
fiancés de garder chacun leur nom de célibataire ou de choisir
celui de l'un ou de l'autre comme patronyme commun. Il en serait
allé de même pour les partenaires homosexuels.
L'option de porter un double nom sans trait d'union aurait
disparu. Il n'y aurait en outre plus eu de limite de temps pour
reprendre son nom de célibataire après un divorce. Idem en cas de
décès.
Le nom à donner aux enfants lorsque des parents mariés ont
conservé chacun leur patronyme était la question la plus
controversée. Plusieurs options étaient proposées. La majorité de
la commission voulait que les fiancés soient tenus de choisir le
nom des futurs enfants lors de la conclusion du mariage.
Une forte minorité gauche-PLR souhaitait que les époux déclarent
lors de la naissance de leur premier enfant le nom que portera ce
dernier et les suivants. En cas de divergence, l'enfant aurait reçu
le nom de célibataire de la mère.
Autant de solutions impraticables et qui «nuiraient à l'unité de
la famille», selon la droite conservatrice. «Cette réforme tient du
grand bazar où l'on négocie», change et échange, a critiqué Maurice
Chevrier (PDC/VS), y voyant un «égalitarisme dogmatique et
idéologique».
Alors que la famille traditionnelle connaît une crise sans
précédent, il faudrait la cimenter plutôt qu'attiser la discorde, a
lancé le Valaisan. Et d'affirmer que deux fiancés qui ne peuvent
pas s'entendre sur le nom de famille devraient plutôt renoncer au
mariage. Pour lui, un patronyme est un ancrage dans l'histoire et
le temps.
ats/ant
Garder le même nom de la naissance au décès
L'imposition du patronyme de l'époux comme nom de famille n'est pas une tradition si helvétique que cela, a tenté de faire valoir Susanne Leutenegger Oberholzer (PS/BL), à l'origine de la réforme.
Cette coutume vient de Prusse. Le droit zurichois a ancré cet usage en 1804. La Suisse romande n'a suivi qu'en 1907 avec l'entrée en vigueur du code civil suisse.
La Bâloise a plaidé en vain la nécessité pour chacun d'avoir la possibilité de garder le même nom de la naissance jusqu'au décès.
«Le patronyme fait partie de l'idendité personnelle». Et d'évoquer son cas personnel pour souligner l'inégalité du droit actuel. Née Leutenegger, elle a dû s'appeler Oberholzer à son mariage. Puis la loi lui a donné le droit d'opter pour Leutenegger Oberholzer, patronyme qu'elle a conservé après son divorce.
Quant à son collègue homonyme Filippo Leutenegger (PLR/ZH), lui aussi divorcé, il a gardé le même nom tout au long de sa vie, a-t elle expliqué.