L'Irakien de 24 ans a été renvoyé en Suède à bord d'un vol
spécial, affrété par les autorités zurichoises jeudi matin.
Accompagné de plusieurs policiers, il a été remis aux autorités
suédoises, a expliqué sans plus de précisions Brigitte
Hauser-Süess, porte-parole du Département fédéral de justice et
police (DFJP).
L'expulsion a eu lieu après deux tentatives avortées. Le 2 mars,
le jeune homme embarqué sur un vol de ligne se débat et crie si
fort que le pilote exige son départ de l'avion. Il y a une semaine,
un premier vol spécial organisé à Kloten est suspendu in extremis
par la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf qui veut
permettre un dernier entretien entre Fahad et son avocate.
Soulagé d'être hors de prison
Depuis, l'Irakien se trouvait en détention à Zurich "dans des
conditions inacceptables", dénonce son avocate Elise Shubs. La
bénévole a eu un court contact téléphonique avec Fahad à son
arrivée en Suède. "Il était plus que soulagé de ne plus être en
prison", raconte-t-elle. Un réseau est en train de se mettre en
place là-bas pour l'aider.
A son arrivée, Fahad a été accueilli par la section suédoise
d'Amnesty International, précise Fernand Melgar, le réalisateur de
"La Forteresse", qui se dit également soulagé de savoir son ami
hors de prison. "Notre priorité est d'obtenir des garanties que la
procédure suédoise se déroule cette fois-ci correctement, pas comme
la première fois", souligne Elise Shubs. Elle se réfère notamment
au fait que l'avocate choisie par Fahad avait été refusée par les
autorités suédoises.
La Suède est compétente dans ce dossier car elle est le premier
pays dans lequel l'Irakien a déposé une demande d'asile. C'est la
raison pour laquelle l'Office fédéral des migrations (ODM) n'a pas
voulu entrer en matière sur la demande déposée ultérieurement en
Suisse, indique le DFJP dans un communiqué. Saisi d'un recours du
jeune homme, le Tribunal administratif fédéral a confirmé la
décision de renvoi de l'ODM le 23 mars.
Menacé en Irak
A cette date, Fahad a été arrêté en vue de son expulsion. Deux
jours plus tard, l'ODM a émis une interdiction d'entrée sur le
territoire suisse à l'encontre de l'Irakien. Selon Eveline
Widmer-Schlumpf, le protagoniste du documentaire "La Forteresse"
n'entre pas dans la catégorie des cas de rigueur. Même si son
dossier a été médiatisé et que le sujet est émotionnel, il n'y a
pas de raison de le traiter différemment des autres
requérants.
La médiatisation du cas a permis une prise de conscience en
Suisse: "on ne peut pas faire n'importe quoi" en matière d'asile,
estime Fernand Melgar. Le cinéaste a lancé une pétition en faveur
de Fahad, qui a récolté plus de 6000 signatures depuis le début de
l'affaire, jusqu'à mardi soir.
Melgar et Amnesty International (AI) ont alerté l'opinion
publique, convaincus que la vie du jeune homme est menacée dans son
pays d'origine.
ats/mej
Rappel du contexte
Fahad a travaillé comme traducteur pour les forces américaines en Irak et a été accusé de traîtrise par les milices islamistes, affirme AI. Près de 300 traducteurs ont été tués depuis le début du conflit en Irak. La section suisse d'AI demande à Berne de suivre attentivement le déroulement de la procédure d'asile en Suède.
"Il est du devoir de la Suisse de prendre des mesures pour la sécurité du traducteur irakien si la Suède devait décider de le renvoyer dans son pays d'origine", souligne Amnesty International (AI). Et de rappeler que la Suède, contrairement à la Confédération, n'a pas suspendu ses renvois vers le centre et le sud de l'Irak.
Pour AI, la Suisse devrait même envisager un retour du requérant d'asile sur son territoire. La Suède, comme la Suisse, respecte ses obligations internationales.