Formellement, la commission des affaires juridiques proposera au
plénum de ne pas entrer en matière, a-t-elle indiqué jeudi. La
bataille sur l'ampleur de la répercussion de l'inflation sur les
loyers aura finalement eu raison du projet.
Le compromis passé fin 2007 entre locataires et propriétaires
prévoyait un taux de 100%. En décembre 2008, le Conseil fédéral
avait finalement opté pour une répercussion à 90%.
Pour éviter une spirale de hausses, il proposait d'exclure les
coûts de logement (loyers et certains frais d'entretien) et
d'énergie (chauffage, électricité, eau chaude) de l'indice de
calcul.
Locataires contre bailleurs
La gauche et les défenseurs des locataires auraient aimé aller
en encore plus loin et baisser le taux à 80%. Quant à la droite et
aux bailleurs, ils tenaient à un ajustement à 100%. Ils ont obtenu
une courte victoire en commission. Avant d'enterrer le projet,
cette dernière s'était en effet ralliée, par 15 voix contre 11, à
une répercussion à 100%.
L'affaire était mal emmanchée depuis le début des discussions en
commission, qui n'était entrée en matière sur le projet que par 13
voix contre 11. Une courte majorité avait refusé de demander au
Conseil fédéral une nouvelle version correspondant mieux au
compromis de 2007, voire à un nouveau compromis à négocier. Idem
d'une proposition de renvoi visant à ne pas lier les loyers aux
taux d'intérêt ou au renchérissement.
Eviter les excès
La réforme visait à éviter les fluctuations de loyers
excessives. Elle prévoyait que le caractère abusif ne pourrait être
déterminé qu'immédiatement après la conclusion du contrat de bail.
L'adéquation des loyers initiaux aurait été déterminée à l'aide de
loyers comparatifs fixés par un instrument mis au point par
l'Office fédéral du logement.
Un changement de propriétaire n'aurait plus été un motif
d'augmentation. Les hausses dues à des «prestations
supplémentaires» du bailleur seraient restées admises. En revanche,
il aurait été interdit de relever les loyers pendant une année à la
suite de travaux ayant entraîné une plus-value, à moins que les
transformations n'aient été annoncées à la conclusion du bail.
Propriétaires satisfaits
Les propriétaires saluent la décision de la commission
d'enterrer le projet du Conseil fédéral qui s'est entretemps écarté
du compromis négocié fin 2007 entre représentants des bailleurs et
des locataires. Malgré ses faiblesses, le droit actuel est plus
juste que le projet gouvernemental, écrit la Fédération des
propriétaires dans un communiqué.
Selon elle, la commission des affaires juridiques a eu fin nez de
proposer au plénum de ne pas entrer en matière. Sans quoi on
risquerait de se retrouver face à une opposition durable et
stérile, politiquement coûteuse, qui aboutirait finalement au statu
quo après référendum.
ats/sbo
L'ASLOCA déçue, mais pas inquiète
Les locataires peuvent eux aussi vivre avec la décision de la commission. Ceux-ci auraient certes préféré que le Parlement reprenne à son compte le projet du Conseil fédéral. Mais devant le projet modifié par la droite parlementaire et les milieux immobiliers, l'ASLOCA avait déjà brandi la menace du référendum.
Concrètement, il n'y a toutefois pas lieu de s'inquiéter du rejet du projet gouvernemental. Pour un certain temps au moins, vu la conjoncture et la tendance à la baisse des taux hypothécaires, les effets du droit actuel sur les loyers ne sont plus aussi problématiques que par le passé, écrit la Fédération romande de l'Association suisse des locataires.
Le risque d'augmentation des loyers est loin d'être au rendez-vous. Mais pour en obtenir une baisse durable, seul un effort considérable de construction de nouveaux logements bon marché, notamment via les plans de relance, y parviendra.