Ce Genevois de 33 ans converti à l'islam, prénommé Nicolas, a été jugé coupable de trois chefs d'accusation: sa participation à une association terroriste, son apologie du terrorisme et la non-dénonciation de crimes.
Sa condamnation, à Rabat, a été confirmée à la RTS par son avocat et sa famille. Le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) l'a également confirmé laconiquement vendredi. Il précise que l'ambassade de Suisse à Rabat lui apporte son soutien dans le cadre des services de protection consulaire.
Pas en lien avec les auteurs des meurtres
L'homme, qui fréquentait assidûment la mosquée du Petit-Saconnex, connaissait l'autre Suisse converti inculpé dans ce dossier, Kevin. Mais contrairement à ce dernier, avec qui il était en relation, Nicolas affirme qu'il ne connaissait pas les islamistes qui auraient décapité les deux touristes. Il connaissait en revanche des volontaires du djihad partis de Genève combattre en Syrie. C’est sur cette base et en avouant ses relations qu’il serait tombé pour complicité.
L’avocat de Nicolas va faire appel de ce verdict dès vendredi. "C’est incompréhensible", explique Me Khalil Idrissi à la RTS. "Tous les chefs d’accusation ont été retenus alors que la seule pièce de l’accusation est un PV de la police rédigé en arabe que Nicolas ne parle pas", souligne-t-il.
Un informateur du SRC?
Nicolas dit avoir fourni des informations aux Service de renseignement de la Confédération (SRC) à plusieurs reprises entre 2016 et 2017 et avoir été rémunéré en cash pour ses informations lorsqu’il fréquentait la Mosquée du Petit-Saconnex.
Contacté jeudi par la RTS, le SRC répond: "La personne que vous mentionnez n'a pas travaillé pour le SRC, mais il a effectivement été en contact avec le service dans le cadre d'entretiens préventifs courants. Le SRC ne donne pas davantage d'informations à ce sujet."
Me Khalil Drissi regrette que cette information n’ait pas été transmise aux services marocains.
Annabelle Durand
L'autre Suisse était aussi en lien avec les assaillants
Etabli depuis plusieurs années au Maroc, l'autre Suisse - prénommé Kevin - est notamment soupçonné d’avoir formé au tir certaines des personnes interpellées dans ce double meurtre.
Lors de son audition en huis clos complet, début février, cet homme qui a aussi la nationalité espagnole a tenté d’expliquer pourquoi les quatre Marocains suspectés d'être les auteurs du double meurtre l'ont dénoncé.
Kevin a reconnu devant le juge qu’il connaissait effectivement certains des terroristes présumés. "Il connaît des personnes fanatiques, oui, c'est vrai", avait confirmé son avocat à la RTS avant l'audience, précisant qu'il s'agissait du passé.
"Mon client a avoué avoir vu des vidéos de Daesh. Et il a coupé toutes relations avec ces personnes depuis un an, soit bien avant le meurtre des deux jeunes femmes", avait-il souligné.
A fin janvier, son épouse - qui vit au Maroc avec leur fils âgé de deux ans - avait affirmé à l'émission Mise au point que son mari était avec elle en Suisse lors du crime le 16-17 décembre.
La police marocaine, interrogée dans L’Illustré du 17 janvier, expliquait disposer d’éléments accablants sur son degré d’implication dans la tuerie. Elle n’a pas souhaité répondre aux questions de la RTS sur le cas de Nicolas.
Un double meurtre à caractère terroriste
Quatre Marocains sont considérés comme les auteurs de l'attaque terroriste du 16-17 décembre 2018, qui a coûté la vie à deux jeunes femmes scandinaves au Maroc.
Les corps sans vie des deux jeunes randonneuses, une Danoise de 24 ans et d'une Norvégienne de 28 ans, avaient été découverts sur un site isolé dans le Haut-Atlas. L'une d'elles avait été décapitée, selon une source proche du dossier.
Les quatre principaux suspects avaient livré à la police une série de noms de complices présumés, dont ceux des deux Suisses.
Dès le départ, les autorités marocaines avaient évoqué un acte terroriste. Une vidéo authentifiée les montrait en train de prêter allégeance à Abou Bakr al-Baghdadi, chef du groupe djihadiste Etat islamique.