Les passeports rouges à croix blanche contiendront-ils, dès
2010, deux empreintes digitales et une photographie du visage
enregistrés sur une puce électronique? Des deux objets soumis à
votation d'ici un peu plus de dix jours, le sort du passeport
biométrique est le plus incertain.
Selon le second sondage réalisé par l'institut gfs.bern pour le
compte de SRG SSR idée suisse, un peu moins de la moitié des
Suisses (49%) s'apprêtent en effet à dire oui aux nouveaux
documents de voyage.
Cela représente une légère progression (+2%) par rapport au
premier sondage rendu public le 8 avril dernier. A l'opposé, le
camp du non a perdu du terrain dans une proportion exactement
comparable, passant de 39% à 37%. Quant aux indécis, ils sont
toujours 14%.
"L'issue du vote reste ouverte. Attention, cela ne signifie pas
qu'on aura un résultat très serré, mais véritablement que tout est
encore possible", a indiqué mercredi Claude Longchamp, directeur de
gfs.bern. D'autant que les deux objets ne semblent pas passionner
les électeurs: seuls 40% des votants auraient pris part au scrutin
s'il avait eu lieu à fin avril, précise l'institut de sondage.
Campagne sur internet
Une discussion intensive, "la plupart du temps critique" selon
gfs, a pourtant eu lieu dans les médias concernant le passeport
biométrique. Reflétant les débats houleux du Conseil national - où
le projet avait finalement été adopté par 94 voix contre 81 - elle
a servi de chambre de résonance aux arguments qui avaient conduit
les opposants à lancer le référendum.
Sur le plan politique, c'est parmi les sondés qui se disent
proches des partis bourgeois que le oui en faveur du passeport
biométrique est le plus clair. Il atteint 69% chez les
sympathisants du PRD. Ceux du parti socialiste (49% de oui) et des
Verts (34%) sont plus sceptiques, bien que le oui ait aussi
progressé dans leur camp depuis le premier sondage.
Fait inhabituel, les Verts dominent cette campagne, constate
l'institut gfs. Sur le passeport biométrique comme d'ailleurs sur
la médecine complémentaire, le parti écologiste est ainsi celui qui
dispose de la plus importante capacité de mobilisation, selon
Claude Longchamp. Autre aspect nouveau à relever, la campagne a
pris de l'importance sur Internet, touchant les jeunes de la
génération "Facebook".
La peur du fichage
Au niveau des arguments, ceux avancés
notamment par les jeunes de plusieurs partis, soucieux de mettre en
garde contre les risques de piraterie informatique, peinent à
convaincre. Les doutes exprimés ces derniers temps par certains
experts quant à la sécurité des données biométriques n'ont pas non
plus échaudé l'opinion publique.
Ainsi, 64% des sondés sont convaincus que le nouveau document sera
plus sûr. Les craintes liées à la dérive vers un Etat policier
porté au fichage, induites notamment par le fait que le projet
prévoit la mise en place d'une banque de données centralisée, ont
pour leur part quelque peu reculé.
Aujourd'hui, 60% des personnes interrogées invoquent cet argument,
contre 64% lors du premier sondage. Même tendance pour ce qui est
de l'atteinte à la sphère privée: 56% des sondés y faisaient
référence il y a un mois, contre 49% à l'heure actuelle.
Oui à la médecine complémentaire
Second objet soumis au peuple le 17 mai prochain, l'inscription de
la médecine complémentaire dans la Constitution récolte un large
soutien. A ce propos, 69% des sondés prévoient de glisser un oui
dans l'urne, alors que 19% d'entre eux se disent défavorables et
12% indécis.
Par rapport au premier sondage, l'acceptation de l'objet a
progressé de 2%. "Cet objet n'a pas réellement été politisé. [...]
La bataille autour de ses enjeux n'a pas vraiment pris", constate
l'institut gfs.
Du point de vue politique, la médecine complémentaire peut compter
sur le soutien de l'électorat de tous les partis, y compris celui
de l'UDC, le seul des partis gouvernementaux qui prône pourtant le
non.
Plus que sur un débat argumenté, c'est sur la popularité de la
médecine complémentaire que se fondera le plus que probable oui qui
sortira des urnes le 17 mai prochain, ceci dans les trois parties
du pays. Plébiscitées en Suisse alémanique (71% de oui), les
pratiques alternatives sont également soutenues en Suisse romande
(68%) et au Tessin (52%).
En matière de santé, pas de frontières linguistiques donc, les
individus "veulent pouvoir se décider librement", fait remarquer
Claude Longchamp. "Les arguments médicaux, scientifiques ou
politiques n'ont aucune influence, assure-t-il. Les citoyens
veulent faire place nette et voir une fois pour toutes réglé le
problème du remboursement des pratiques alternatives par
l'assurance maladie de base."
Carole Wälti, swissinfo.ch
(avec la collaboration de Sonia Fenazzi)
Les chiffres principaux
Passeports biométriques:
49% de oui, 37% de non, 14% d'indécis.
Médecine complémentaire:
69% de oui, 19% de non, 12% d'indécis.
Le sondage s'est déroulé du 27 avril au 2 mai 2009.
1216 personnes d'âge et de profil socio-économique différents issues des trois régions linguistiques ont été interrogées par téléphone.
Marge d'erreur: +/- 2,9%.
Les deux objets du vote
Le 17 mai prochain, les citoyens suisses se prononceront sur deux objets.
Le premier a trait aux nouveaux passeports biométriques. Une modification de la loi sur les documents d'identité a en effet été attaquée par référendum.
Le texte soumis à votation a pour but d'introduire dans la législation suisse l'usage de passeports et de documents de voyage pour les personnes étrangères contenant des données biométriques (photographie du visage et 2 empreintes digitales).
Ce type de documents est obligatoire dans l'Espace Schengen et le deviendra très prochainement aux Etats-Unis.
S'agissant d'un référendum facultatif, cet objet ne requiert que la majorité du peuple.
Le second est un contre-projet élaboré par le Parlement à une initiative sur les médecines complémentaires qui a été retirée.
Le texte vise à inscrire la prise en compte des médecines alternatives dans la Constitution, et, plus largement à faire en sorte qu'elles soient mieux prises en considération dans le système de santé suisse.
S'agissant d'une modification constitutionnelle, cet objet requiert la double majorité du peuple et des cantons.