La révision de la loi sur les entraves techniques au commerce a
passé la rampe par 95 voix contre 73 et 11 abstentions. La décision
a été plus controversée qu'au Conseil des Etats, où elle n'avait
suscité aucune opposition.
Doris Leuthard, fervente partisane du Cassis de Dijon, s'est
étonnée du ton «émotionnel et contradictoire» du débat. La Suisse a
besoin de marchés ouverts, a affirmé la conseillère fédérale. La
récession actuelle prouve encore une fois combien l'économie
helvétique est tributaire des exportations.
La reprise du principe de Cassis de Dijon devrait apporter une
croissance du PIB de 0,5%, a renchérit Christophe Darbellay
(PDC/VS) au nom de la commission. Pour lui, «c'est une modeste
révolution technique». Elle bénéficiera pleinement aux
consommateurs et aux PME suisses.
Un projet trop «néolibéral»
Une minorité emmenée par l'UDC et les Verts a contesté la vision
positive défendue par les orateurs du PDC, du PS, du PLR et des
Verts libéraux. Principale objection soulevée par les opposants,
l'absence de réciprocité pour les producteurs suisses.
La prétendue baisse des prix, estimée à quelque 2 milliards de
francs par an, va entraîner un recul de la TVA et exercer une forte
pression sur les producteurs suisses, a critiqué Hans Kaufmann
(UDC/ZH). Louis Schelbert (Verts/LU) a fustigé un projet par trop
«néolibéral». Faute de réciprocité, la Suisse perd un atout en vue
de futures négociations. Et de contester les risques pour la
qualité des produits.
Une minorité emmenée par Jean-Claude Rennwald (PS/JU) a demandé le
renvoi du projet au Conseil fédéral, avec pour mission de négocier
la réciprocité avec l'UE. Pour accéder au grand marché, on s'aligne
encore une fois sur Bruxelles sans contrepartie, a fustigé le
syndicaliste. A ses yeux, il faudrait discuter la réciprocité dans
l'optique d'une adhésion. Sa proposition de renvoi a nettement
échoué.
Pas de négociations possibles
Demander la réciprocité est une fausse bonne idée, a dit
Christophe Darbellay. «Cela aurait eu un sens il a quinze ou vingt
ans, mais aujourd'hui, les normes de l'UE sont quasiment analogues
à celles en vigueur en Suisse».
Tout le monde aurait préféré la réciprocité, a admis Charles Favre
(PLR/VD). Mais vu que Bruxelles n'est pas prêt à discuter, il faut
se contenter d'une approche pragmatique dans l'intérêt des
consommateurs et des PME. Si on voulait obtenir la pareille, on
devrait négocier avec chaque Etat membre de l'UE, puisque le Cassis
de Dijon s'applique aux produits venant de tous les pays européen,
a rappelé Hans-Jürg Fehr (PS/SH).
En plus, toutes les exceptions fixées, par exemple contre les
oeufs de poule en batterie, seraient supprimées, a renchéri Doris
Leuthard. Avec son application unilatérale, la Suisse peut choisir
elle-même quels domaines elle entend protéger, d'après la
conseillère fédérale.
Une autre tentative de renvoi de l'UDC, qui visait à «trouver une
solution au problème de la discrimination des producteurs
indigènes», a été rejetée par 98 voix contre 78. Lors des travaux
en commission, on n'a trouvé aucun exemple de discrimination, si ce
n'est celui d'une célèbre colle au tube rouge et jaune, a affirmé
Susanne Leutenegger Oberholzer (PS/BL).
ats/sbo
Le principe du Cassis de Dijon
La jurisprudence «Cassis de Dijon» remonte à un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) de 1979 concernant la commercialisation de cette liqueur française en Allemagne.
Selon cette jurisprudence, tout Etat membre de l'UE est tenu d'accepter sur son territoire des produits importés depuis un autre Etat membre s'ils sont fabriqués et commercialisés légalement dans l'Etat exportateur.
Ce projet, qui constitue un des volets du paquet de mesures destinées à stimuler la croissance, est censé dynamiser la concurrence en Suisse.
Il devrait permettre d'abaisser les coûts pour les entreprises et les prix pour les consommateurs.
Révision de la loi sur la sécurité des produits
Dans la foulée, la majorité a approuvé par 115 voix contre 51, issues de l'UDC, la révision totale de la loi sur la sécurité des produits.
Ce projet, lié au Cassis de Dijon, vise à garantir que les exigences suisses correspondent à celles du marché européen. L'ensemble des produits seront concernés. Les compétences des autorités de contrôle seront élargies.
Par ailleurs, le producteur ou l'importateur sera désormais tenu, après la mise sur le marché, de prendre les mesures appropriées pour identifier les dangers et en informer les autorités.