Modifié

Le flou autour de la surveillance des télécommunications pointé par un audit

La surveillance des communications est toujours plus compliquée, notamment en raison du cryptage des données. [Photononstop/AFP - Jacques Loic]
Le flou autour de la surveillance des télécommunications pointé par un audit / La Matinale / 1 min. / le 7 mai 2019
La surveillance des communications s'avère utile dans le cadre d'enquêtes pénales, mais son coût est toujours plus élevé. Le Contrôle fédéral des finances s'inquiète aussi du flou qui règne en la matière, dans un audit publié lundi.

Il est impossible, depuis des années, de connaître les coûts exacts de la surveillance pénale, déplore le Contrôle fédéral des finances (CDF). Le risque, face à cette situation, est que des autorités pénales se privent d'une surveillance pour éviter les dépenses.

Les cantons sont en première ligne en la matière, puisqu'ils font partie de ceux qui déposent les demandes pour localiser un téléphone, écouter une conversation sur Skype ou intercepter un SMS: ils dépensent pour cela plus de 10 millions de francs chaque année.

Les autorités pénales cantonales passent par un service mis en place par la Confédération, qui touche une partie du versement. D'ailleurs, Berne voudrait que ce service couvre ses frais à près de 70%, ce qui ferait baisser les coûts à sa charge. Mais cette demande est jugée peu réaliste par le CDF.

Des services plus compliqués et plus coûteux

Si le coût de cette surveillance augmente, c'est parce qu'elle est toujours plus compliquée - notamment en raison du cryptage des données. Il faut aussi, parfois, faire recours à des interprètes. La pratique évolue et les enquêteurs y font donc moins recours, ce qui fait que le prix des services prennent l'ascenseur.

Dans le cadre de cette surveillance, les cantons - via le service de l'Etat - demandent aux opérateurs de collaborer. En échange, Swisscom, Sunrise Salt et les autres reçoivent des indemnités, qui se sont montées à près de 9 millions de francs en 2017.

Cette question est hautement politique: les opérateurs pourraient offrir ce service gratuitement comme cela se fait dans certains pays voisins, rappelle l'audit.

>> Des réactions sous la Coupole :

Swisscom annonce un chiffre d'affaires en légère hausse en 2018. [Keystone - Melanie Duchene]Keystone - Melanie Duchene
Les opérateurs mobiles reçoivent chaque année près de 9 millions pour collaborer avec la justice / La Matinale / 2 min. / le 10 mai 2019

"Des coûts assez exorbitants"

Invité mardi de La Matinale, le président de la Conférence des procureurs de Suisse (CPS) Fabien Gasser dit ressentir au quotidien la pression liée à ce coût des écoutes. "Nous parler de budget, de restrictions budgétaires, c'est quelque chose dont on n'a pas l'habitude", reconnaît le procureur général fribourgeois. "Mais ici, on commence à parler de coûts qui sont assez exorbitants."

Le magistrat rappelle que l'accès à ce type de surveillance est très utile dans un certain nombre d'affaires comme des homicides, des incendies ou certains trafics de stupéfiants. Et dans ce type de cas très graves, le Ministère public ne va pas renoncer à une écoute, précise-t-il, "parce que c'est vraiment le cœur de notre mission."

En revanche, dans d'autres affaires, "ça peut nous inciter à ne pas donner suite à certaines informations [enquêtes], parce qu'on n'a pas les moyens d'engager des écoutes téléphoniques. On va fermer les yeux (...), on va sacrifier peut-être ce genre d'enquête-là."

>> Regarder l'interview de Fabien Gasser dans La matinale :

Le procureur fribourgeois Fabien Gasser. [RTS]
Fabien Gasser commente le rapport sur le coût de la surveillance des conversations téléphoniques (vidéo) / La Matinale / 5 min. / le 7 mai 2019

Camille Degott/oang

Publié Modifié