La convention révisée a été paraphée jeudi à Washington lors
d'une réunion d'experts suisses et américains. Dans un communiqué
diffusé vendredi, le Département fédéral des finances (DFF) précise
que le texte "est encore confidentiel". Cette convention permet
d'échanger des renseignements fiscaux au cas par cas et sur demande
"concrète et fondée", a souligné le DFF.
De son côté, le secrétaire au Trésor américain Timothy Geithner a
indiqué que le traité accroîtrait la capacité des Etats-Unis "à
faire respecter ses lois fiscales" et qu'il contribuerait "à mettre
fin à l'ère des comptes extraterritoriaux et des comptes
d'investissements utilisés pour échapper à l'impôt". Barack Obama
s'était engagé à lutter contre les paradis fiscaux et l'évasion
fiscale. L'accord sera signé officiellement "dans les mois qui
viennent", a ajouté T.Geithner dans son communiqué.
Le Parlement doit approuver
Le texte sera soumis pour avis aux cantons et aux associations
économiques concernées. Le Conseil fédéral décidera ensuite de la
signature, avant que la convention révisée de double imposition
(CDI) soit rendue publique. La CDI ne pourra entrer en vigueur
qu'après avoir été approuvée par le Parlement. L'ensemble de la
procédure devrait durer plusieurs semaines, a précisé à l'ATS Beat
Furrer, de l'Administration fédérale des contributions.
Le paraphe entre Berne et Washington a été annoncé à l'issue d'une
deuxième ronde de discussions entre des experts des deux pays
entamée mardi aux Etats-Unis. Les autorités fiscales suisses et
américaines s'étaient réunies une première fois à Berne à la fin
avril.
Sixième accord révisé
Les Etats-Unis sont le sixième Etat à
parapher une CDI comportant une clause d'assistance administrative
avec la Suisse. L'Etat américain succède au Danemark, à la Norvège,
à la France, au Mexique et à un autre pays non nommé par le
DFF.
Le 13 mars, le Conseil fédéral a décidé que la Suisse
réexaminerait sa collaboration internationale en matière fiscale et
reprendrait les standards de l'OCDE (Organisation de coopération et
de développement économiques) relatifs à l'assistance
administrative. Le but est de permettre à la Suisse de pratiquer
l'échange de renseignement bancaire, au cas par cas, en réponse
"aux demandes concrètes et fondées" d'autres pays.
Douze conventions nécessaires
Sommée de se conformer aux standards de l'OCDE en matière de
transparence et d'échange d'informations fiscales, la Suisse subit
une grosse pression depuis des mois, sur fond de crise financière.
Le DFF a répété à plusieurs reprises que la Suisse entendait signer
douze CDI aux normes de l'OCDE d'ici la fin de l'année afin d'être
rayée de la "liste grise" des paradis fiscaux.
Hans-Rudolf Merz doit participer à une rencontre informelle avec
les pays membres de l'OCDE mardi prochain à Berlin. Il pourra
informer ses collègues des progrès helvétiques. Sa collègue de
l'économie, Doris Leuthard, représentera la Suisse lors de la
rencontre ministérielle annuelle de l'OCDE qui débute un jour plus
tard à Paris.
ats/afp/bri
Le cas UBS évoqué
L'annonce du paraphe intervient alors que l'UBS est dans la
ligne de mire du fisc américain qui souhaite obtenir des
informations sur 52'000 clients. T.Geithner et H-R.Merz pourraient
avoir trouvé un terrain d'entente sur ce sujet. Le cas UBS a été
évoqué en marge des négociations, a reconnu Roland Meier,
porte-parole du DFF, interrogé par l'ATS vendredi.
A fin avril à Washington,
le président de la Confédération Hans-Rudolf Merz avait défendu la
grande banque lors d'une rencontre avec le ministre des finances
américain Timothy Teithner. Le conseiller fédéral avait proposé de
mettre fin à la procédure civile lancée contre l'UBS lors de la
signature de la CDI. Hans-Rudolf Merz avait indiqué que, selon lui,
T.Geithner était conscient que le nouvel accord risquerait d'être
refusé par le peuple suisse si les Etats-Unis maintiennent leur
plainte contre l'UBS.
Pour l'Association suisse des banquiers, l'annonce d'un accord
entre les deux pays "est une bonne nouvelle" qui devrait permettre
de résoudre les problèmes judiciaires d'UBS.
Le numéro un mondial de la gestion de fortune avait été contraint
en février de livrer les noms d'environ 300 clients, en plus de
verser une amende de 780 millions de dollars. Mais le fisc
américain exige toujours les noms de 52'000 clients
supplémentaires, soupçonnés de fraude. Le groupe n'a offert aux
autorités américaines que la possibilité d'un examen restreint des
données de clients, leurs noms et numéros de compte étant rendus
anonymes.
Les banquiers privés veulent des limites claires
L'Association des banquiers privés suisses (ABPS) estime indispensable de fixer des limites dans les accords de révision de double imposition. Elle exige notamment d'exclure tout effet rétroactif dans l'application des nouvelles conventions.
"Cela s'apparenterait à une trahison et les conséquences de la perte de confiance qui s'ensuivrait s'étendraient bien au-delà de la place financière", a averti le président Konrad Hummler lors de l'assemblée générale de l'ABPS, qui s'est tenue vendredi à St-Gall.
Les banquiers privés attendent au tournant les autorités politiques helvétiques et les experts chargés des négociations. "Ils ont le devoir de clarifier le plus rapidement possible ce qui est désormais légal et ce qui ne l'est pas", a affirmé K.Hummler.
C'est de toute façon au peuple "qu'il reviendra, par le biais du référendum, de juger sur pièce de la qualité des premières conventions de double impositions révisées", rappelle l'association dans son rapport annuel.
L'ABPS exige en outre d'exclure les recherches indéterminées de preuves ("fishing expeditions"). Pour l'association, il convient également de prévoir des délais transitoires suffisants, en envisageant notamment des formes d'amnistie fiscale.
Konrad Hummler concède que l'adaptation de la Suisse aux normes de l'OCDE va augmenter la pression en faveur de l'échange automatique d'informations. Les grands Etats présentent une volonté marquée "de récupérer des capitaux investis par les ressortissants à l'étranger, afin de pouvoir les taxer davantage", ajoute-t-il en précisant qu'il est exclu que la Suisse cède du terrain sans obtenir de contreparties.