La loi révisée sur le CO2 doit
servir de base à la politique climatique de la Suisse à partir de
2013. "C'est l'instrument le plus important en notre possession
pour réduire les émissions de CO2", a déclaré mercredi devant la
presse le ministre de l'environnement Moritz Leuenberger.
La Suisse contribue ainsi à un effort international. Selon le
conseiller fédéral, vouloir réduire de 20% les émissions par
rapport à 1990, c'est "beaucoup". Bien d'autres pays n'en font pas
autant.
Une réduction de 30% pas exclue
La Suisse a aligné son objectif de réduction sur celui de
l'Union européenne et est prête à le pousser à 30% si d'autres pays
industrialisés en font autant. Cela dépendra notamment des
résultats de la Conférence des Nations Unies sur le climat de
décembre prochain à Copenhague.
Selon le Conseil fédéral, les mesures proposées ont des "effets
modérés" pour l'économie nationale. Elles ne devraient pas
entraîner de baisse significative de la croissance.
La révision totale de la loi reprend en outre les mesures prises
par le Parlement pour promouvoir l'assainissement énergétique des
bâtiments.
Dès 2010, une partie des recettes de la taxe sur le CO2 au maximum
200 millions de francs par an - sera utilisée à cette fin. Un tiers
de la somme au plus sera mis à disposition pour l'encouragement des
énergies renouvelables.
Un compromis difficile
Moritz Leuenberger a qualifié ce texte de compromis «entre des
opinions qu'un monde sépare» et a pressé les Chambres de légiférer
sans attendre. Il prévoit qu'au moins la moitié des réductions
d'émissions soit le fait de mesures prises en Suisse, le reste
pouvant se monnayer via des certificats achetés à l'étranger.
Le ministre de l'environnement s'est montré optimiste, estimant
qu'on n'assistera pas à un partage 50/50. Dans l'optique d'un seuil
à 20%, 13 à 14% pourraient être atteints grâce aux mesures prises
en Suisse, selon lui.
Cela n'a pas manqué de fâcher les organisations environnementales
et la gauche pour qui l'entier des compensations doit se faire en
Suisse. Elles estiment l'objectif de 20% trop bas pour éviter que
le réchauffement climatique ne dépasse les 2 degrés (lire
ci-contre).
Ces mesures devraient entrer en vigueur en 2013. D'autres, qui
sont reprises dans le projet, feront l'objet de révisions
partielles de la loi et seront prises avant.
agences/sbo
Vers une taxe sur les carburants?
Pour arriver au but fixé, le Conseil fédéral propose de maintenir la taxe sur le CO2 frappant les combustibles à son niveau actuel de 36 francs par tonne de CO2.
Suivant l'évolution des prix du pétrole, la taxe pourrait être relevée en deux étapes, si nécessaire.
Les entreprises qui s'engagent à réduire leurs émissions continueraient de pouvoir être exemptées. La taxe pourrait en outre être étendue aux carburants si cela s'avère nécessaire pour atteindre les objectifs.
Au grand dam de l'Union suisse des arts et métiers, le centime climatique (1,5 ct par litre), pratiqué actuellement à titre volontaire par l'économie, devrait être abandonné.
Obligation sera faite aux producteurs et importateurs de carburants fossiles de compenser au moins un quart des émissions générées.
L'impact sur le prix de l'essence à la pompe dépendra du marché. Actuellement, cela correspondrait à 2-3 ct par litre.
Les écolos dénoncent un manque de courage
Le Conseil fédéral recommande de rejeter l'initiative «pour un climat sain» de la gauche et des milieux écologistes. Il estime que fixer dans la constitution un objectif d'au moins 30% de réduction d'ici 2020 sur le territoire suisse ne laisserait pas assez de flexibilité.
Les promoteurs de l'initiative, parmi lesquels le WWF, les Verts, le PS, l'Association transports et environnement (ATE) ou Greenpeace, demandent une réduction d'au moins 30% à l'horizon 2020. Ils ont exprimé leur déception.
A leurs yeux, l'initiative est plus que jamais nécessaire après cette décision du Conseil fédéral. Pour l'ATE, le gouvernement cède face au lobby automobile.
Le Conseil fédéral affirme que son approche est plus complète que l'initiative car la loi couvrira toutes les émissions de gaz à effet de serre réglementées, les puits de carbone ainsi que l'adaptation aux changements climatiques.
Le gouvernement entend aussi répondre à l'initiative des jeunes Verts contre les 4x4 en imposant des valeurs limites d'émissions de CO2 pour les nouvelles voitures mises sur le marché, dès 2012.