Des rues qui se transforment en torrent, des bouches d'égout en geyser et une population médusée filmant ces scènes au smartphone. Les récentes inondations dans les centres-villes de Genève, Sion ou Lausanne ont marqué les esprits.
C'est surtout la vitesse et l'intensité de ces orages d'été qui impressionnent. La nuit du 11 juin 2018, il est tombé 41 millimètres d'eau dans les rues de Lausanne en seulement 10 minutes (un record en Suisse).
Et les dégâts engendrés ont un coût: 32 millions à Lausanne pour l'orage du siècle. En 2018, les crues ont causé pour 158 millions de dégâts, principalement dans les villes de Frauenfeld (TG), Baden (AG) et Yverdon-le-Bains (VD). La concentration d'habitants et de commerces au même endroit fait grimper la facture.
Des orages d'été plus intenses
Et ce n'est que le début. Selon les scénarios climatiques, présentés par la Confédération en novembre 2018, à l'avenir il y aura moins de précipitations en été, mais elles seront plus intenses. "Les précipitations extrêmes, qui ne surviennent qu'une fois tous les 100 ans environ, se renforceront elles aussi considérablement. L'augmentation des événements de précipitations extrêmes sera de 10 à 20% d'ici le milieu du siècle et de l'ordre de 20% d'ici la fin du siècle", peut-on lire dans la brochure officielle.
S'il y a des inondations en campagne, les matériaux qui composent le sol des villes rendent les milieux urbains plus fragiles face à ces pluies torrentielles. L'eau ne s'infiltre pas dans le sol et glisse très rapidement sur les surfaces imperméables (goudron, asphalte, béton). Il y a un effet toboggan.
Des tuyaux trop petits
Le réseau d'égout, qui doit absorber l'eau de pluie, est très rapidement saturé car les tuyaux sont sous-dimensionnés. C'est dans la conception même du système, selon Philippe Hohl, chef de la division eau à l'Etat de Vaud: "C'est dans les règles de l'art. Il est toléré que tous les 10 ou 15 ans, il y ait des débordements en milieu urbain. Il y a des réflexions en cours pour peut-être redimensionner les collecteurs et améliorer la récolte des eaux de surface. Il faut également favoriser l'infiltration d'eau dans le sol, en mettant plus de surfaces perméables en ville."
Pour Frédéric Jordan, directeur du bureau hydrique ingénieurs à Lausanne, il s'agit d'être créatif et de trouver des solutions au cas par cas, "l'idée n'est pas de construire des tuyaux toujours plus gros, c'est une course sans fin et les prix vont exploser. Il est plus intéressant de mettre en place des solutions agiles".
Miser sur l'infiltration
La loi suisse prévoit que la solution à privilégier est l'infiltration de l'eau dans le sol pour l'empêcher de couler sur les chaussées. "On peut par exemple poser de grands toits végétalisés qui peuvent retenir entre 20 et 30 millimètres de pluie. Les parkings sont aussi des surfaces idéales pour retenir l'eau, mais il faut placer un maximum de dalles perméables."
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Un autre système en vogue, hérité des expériences menées dans les villes du sud de la France, est le réaménagement des routes, chaussées et trottoirs pour créer un canal d'évacuation de l'eau en cas de débordement du système classique. Bref, la rue devient une rivière qui guide l'eau vers des lieux sécurisés.
Prévenir
Les habitants et les autorités locales sont en première ligne. Un travail est actuellement mené par les météorologues suisses sur les avertissements faits à la population. La rapidité de l'alerte peut permettre de mettre en place des mesures rapides et flexibles pour protéger son environnement direct, notamment en protégeant les sous-sols et les entrées des immeubles.
Pascal Wassmer