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Pionnière ou retardataire, la Suisse face aux revendications LGBT

La Pride est de retour en Suisse romande cette année. Organisée dans les différents cantons latins à tour de rôle, elle se tient samedi après-midi à Genève, où plus de 30'000 personnes ont participé à la Marche des fiertés. L'occasion de revenir sur l'évolution des droits LGBT en Suisse.

La Suisse n'est pas à l'avant-garde de la protection des droits des lesbiennes, gays, bi, trans, intersexes et queer (LGBTIQ). Ce constat a été dressé au printemps par l'association ILGA-Europe. La Confédération se retrouve à la 27e position sur 49 de ce classement des pays européens, loin derrière la majorité des Etats d'Europe occidentale.

Intitulé Rainbow Europe, le rapport recommande notamment de garantir un meilleur accès aux traitements de transition pour les personnes trans, ainsi que l'égalité entre couples hétérosexuels et homosexuels en matière de mariage.

Sur ce dernier point, la Suisse est à bout touchant. Un projet de mariage civil pour les couples de même sexe était en consultation jusqu'à fin juin à Berne. Il a séduit les Verts, les Verts'libéraux et les partis gouvernementaux, sauf l'UDC qui reste réticente.

>> Les détails dans le 19h30 :

Mariage pour tous: le vent tourne à Berne pour davantage de droits pour la communauté LGBT.
Mariage pour tous: le vent tourne à Berne pour davantage de droits pour la communauté LGBT. / 19h30 / 2 min. / le 5 juillet 2019

>> Lire aussi : Le mariage pour tous séduit tous les partis, à l'exception de l'UDC

Une autre réforme récente n'a pas encore été prise en compte par Rainbow Europe: celle de l'extension de la norme anti-raciste. Le Parlement a accepté fin 2018 que l'homophobie soit combattue en Suisse au même titre que le racisme. L'Union démocratique fédérale (UDF) s'oppose toutefois à cette révision par référendum.

"En réalité, la Suisse n'est pas tant à la traîne", relativise Thierry Delessert, chercheur à l'Université de Lausanne et spécialiste de l'histoire de l'homosexualité. Le rapport d'ILGA-Europe considère la Suisse comme un pays unitaire, souligne l'historien, alors que les grandes villes du Plateau se démarquent des régions périphériques en expérimentant des politiques publiques plus libérales. Par exemple en matière de reconnaissance des requérants persécutés chez eux pour leur orientation sexuelle.

>> Écouter à ce sujet le reportage de Vacarme :

Les militants de Shams plaident pour la dépénalisation de l’homosexualité. [Association Shams - Mounir Baatour]Association Shams - Mounir Baatour
La lente reconnaissance des droits des homosexuels (3/5) / Vacarme / 26 min. / le 23 novembre 2016

De la dépénalisation en 1942 au partenariat en 2007

A une époque, la Suisse a pu être perçue comme pionnière. Alors que chez ses voisins la répression envers les gays faisait rage, la Suisse a dépénalisé l'homosexualité en 1942. Une dépénalisation partielle, à partir de l'âge de 20 ans, libérale en approche seulement, insiste Thierry Delessert. Les autorités y voyaient un moyen de prévenir le développement d'un militantisme similaire à celui que connaissait l'Allemagne avant 1933. En résumé, elles ne voulaient pas que Zurich devienne le nouveau Berlin, capitale européenne de l'homosexualité avant la guerre, explique le chercheur.

C'est 50 ans plus tard, en 1992, que le code pénal a été réformé. L'âge de consentement pour les relations homosexuelles a été abaissé à 16 ans, comme chez les hétérosexuels. Ont suivi d'autres étapes dans l'évolution des droits LGBT dans les années 2000.

Parmi les grandes étapes souvent citées, il y a aussi celle du partenariat enregistré, approuvé en votation fédérale en 2005. Militante LGBTIQ, Lorena Parini s'en souvient. "Personnellement, ce n'est pas quelque chose qui m'a enthousiasmée", raconte celle qui est aussi politologue. "Parce qu'il s'agit d'un dispositif à part, un contrat fait entre deux personnes de même sexe, soit en quelque sorte un coming out forcé."

"Effectivement, il s'agit d'une loi à part dans le code civil", abonde Thierry Delessert. Une loi qui au final consacre le mariage hétérosexuel. Car à travers plusieurs clauses, le partenariat diffère nettement du mariage, notamment avec l'interdiction de la procréation médicalement assistée aux couples homosexuels.

"C'est essentiel d'être dans l'espace public"

Au-delà des réformes, ce sont les moments festifs qui ont le plus marqué certains militants homosexuels suisses. A l'image des Prides, comme la Marche des fiertés organisée samedi à Genève. "Il y a un effet communautaire dans ces moments, on est ensemble. Alors qu'au quotidien on doit parfois se cacher, lors d'une manifestation on n'a plus à le faire", confie Lorena Parini.

Et de rappeler l'importance pour les personnes LGBT d'être visibles. "C'est essentiel d'être dans l'espace public, justement pour contrer le fait que nous étions davantage dans l'ombre il y a quelques années et pour montrer la fierté de notre communauté."

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A cet égard, le mouvement qui a fait naître la Gay Pride aux Etats-Unis, après une rafle policière dans le bar "Stonewall Inn" à New York en 1969, a connu un fort retentissement en Suisse également. "Deux ans après 1969, en 1971, a été fondé le tout premier groupement 'révolutionnaire' à Zurich, qui a essaimé à Bâle", indique Thierry Delessert. Pour ce qui est de la Suisse romande, ce n'est qu'au début des années 1980 qu'a eu lieu la première manifestation homosexuelle.

Puis en 1997, Genève a accueilli la première véritable Gay Pride romande, en plein âge d'or des squats et des milieux alternatifs. "Depuis, les Prides ont sûrement pris de l'ampleur", estime Lorena Parini. "Il y a aussi plus d'entreprises et d'institutions qui s'y intéressent et qui les soutiennent." L'universitaire appelle toutefois à conserver l'atmosphère festive de ces manifestations et éviter qu'elles ne deviennent trop policées. "Car c'est cela aussi le sel de notre communauté."

Article web de Tamara Muncanovic

Témoignage recueilli par Julie Conti

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Plus de 30'000 personnes à Genève

Genève avait pris les couleurs de l'arc-en-ciel, samedi. Selon la police, la Marche des fiertés a rassemblé environ 35'000 personnes. Elles manifestaient pour la fin des discriminations liées à l'orientation sexuelle et les mêmes droits pour tous.



Cette "pride" de la Suisse latine avait fait escale la dernière fois au bout du lac en 2011. Elle est organisée chaque année dans un canton différent.

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