Depuis le début du mois de juillet, une "handiplage" a pris place à Auvernier, sur les rives du lac de Neuchâtel. Engins adaptés pour aller dans l’eau, mais aussi stand up paddle et personnel formé sont gratuitement à disposition des personnes souffrant de handicap.
Interrogée dans le 19h30, Mégane Fuchs, responsable du site, déplore le manque d’infrastructures de ce type en Suisse: "Nous, valides, nous ne nous posons pas de questions si on veut aller se baigner ; mais pour les personnes handicapées, c’est compliqué."
Salvatore Avvenire se déplace en chaise roulante. Il est venu découvrir l’Handiplage d’Auvernier, et tester pour la première fois le stand up paddle. ""L’été dernier, je suis parti deux semaines à Lecce (en Italie) sur une plage adaptée: en plus de l’hôtel compatible avec la chaise roulante, du personnel est présent pour nous aider à entrer et sortir de l’eau. En Suisse, cela n’existe pas", témoigne-t-il.
"La Suisse a 30 ans de retard"
Cette handiplage a déjà pris place à Gland (GE) et à Estavayer-le-Lac (FR) ces deux dernières années. L’instigateur, c’est Thierry Jacquet, fondateur de Suisse Tourisme Handicap, une association qui lutte pour l’accès au tourisme pour les personnes handicapées, et qui répertorie les sites adaptés.
"La Suisse a 30 ans de retard par rapport à certains de nos voisins européens ! Il faut que les personnes à la tête des institutions touristiques, mais aussi les politiques, prennent conscience et agissent pour que les choses changent. Les solutions, on les a", déplore-t-il.
La fédération suisse du tourisme ne partage pas ce constat, mais reconnaît que des efforts doivent être fournis, notamment dans l’information. Une association a été mise sur pied dans ce sens. "Notre objectif, c’est que chaque site de prestataire touristique mette à disposition, en un clic, ses informations d’accessibilités sur Internet", explique Barbara Gisi, sa directrice.
Défi pour les prestataires
L’information, c’est le nerf de la guerre pour les personnes à mobilité réduites, qui perdent souvent des heures au téléphone ou sur Internet lorsqu’elles organisent une sortie. "On doit toujours appeler pour voir si un restaurant ou un hôtel est accessible et parfois, on a de mauvaises surprises en arrivant sur place !", explique Anne Naudin, atteinte de sclérose en plaque depuis 13 ans et membre de l'association Arc-en-ciel. "Si l'accès l’accès à l’information était simplifié et clair, ce serait plus agréable pour tout le monde: les personnes à mobilité réduite, ceux qui les accompagnent mais aussi les prestataires touristiques", constate sa fille Caroline.
Adapter son infrastructure aux personnes à mobilité réduite peut représenter un défi technique et financier, notamment pour les structures déjà existantes. Mais la loi exige que les nouvelles constructions soient adaptées: c’est le cas d’Aquatis, à Lausanne, un aquarium construit il y a 2 ans. Qualité du sol, ascenseur, WC, pentes, cet endroit est cité en exemple par les associations. Anne Naudin et sa fille Caroline souhaiteraient que bien plus de lieux soient adaptés aux personnes qui circulent en chaise roulante: "Je pense qu’en Suisse, on a les moyens de le faire. Il faut voir où l’on met les priorités", conclut Anne, qui appelle à une prise de conscience politique.
Ces prochaines années, avec le vieillissement de la population, le nombre de personnes à mobilité réduite va augmenter. Un défi pour les prestataires touristiques suisses.
Léa Jelmini/ther