L’augmentation est spectaculaire: en 20 ans, la part des nouvelles lois – ou des révisions de lois – basées sur une impulsion de l’étranger a été multipliée par trois. Alors qu’elle était de 7,4% sur la période 1987-1996, elle atteint 21,9% sur la période 2007-2015. C’est ce que montre une étude réalisée par Pascal Sciarini, Julien Jaquet et Frédéric Varone, chercheurs à l'Université de Genève, qui porte sur les lois susceptibles d’être soumises au vote populaire.
Plus en plus de dépendance à l'international
"On perd un peu le contrôle sur les règles que l’on souhaite développer", explique Pascal Sciarini, professeur de Sciences politiques à l’Université de Genève. "Les directives européennes sont par exemple des règles que la Suisse n’a pas pu contribuer à élaborer puisqu’elle n’est pas membre de l’Union Européenne. Donc du point de vue formel la Suisse reste indépendante, mais d’un point de vue substantiel elle est de plus en plus dépendante de ce qui est décidé sur les plan international ou supranational."
Une évolution problématique selon le Conseiller national UDC Yves Nidegger: "Selon la Constitution, le législateur officiel est le parlement que nous allons élire en octobre. Mais le législateur réel, c'est un consortium d'Etats puissants qui édictent des directives, font des listes noires et donnent des diktats. C'est un problème démocratique évident", dénonce le Genevois.
Faire valoir ses intérêts
Chef du groupe socialiste aux chambres fédérales, Roger Nordmann estime pour sa part que Berne doit s’impliquer de manière importante dans l’élaboration des lois qui s’imposent comme des standards internationaux ayant un impact sur la Suisse.
"En ce qui concerne les décisions de l'Union Européenne, la façon d'avoir le plus d'influence c'est d'être membre de l'UE", illustre le Vaudois. "Et pour les autres organisations (…) il faut être là pour faire valoir nos intérêts et faire avancer la résolution des problèmes. S'isoler dans son coin et se plaindre parce que les autres Etats agissent n’est pas une façon d'exercer sa souveraineté".
La globalisation du droit suisse montre l’importance croissante des acteurs étrangers sur la politique du pays: "le lancement d’un processus marque fortement de son empreinte ce qui va se passer par la suite", analyse Pascal Sciarini. "Des études montrent que les décisions prises tout en amont du processus sont celles qui influencent le plus le contenu des règles adoptées".
Linda Bourget