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Droits de l'homme: la Suisse épinglée par l'ONU

Amnesty fustige notamment la campagne de l'UDC contre les minarets.
L'ONU juge la campagne d'affichage des initiants "discriminatoire".
Le comité des droits de l'homme de l'ONU s'est déclaré vendredi préoccupé par l'initiative anti-minarets et «la campagne d'affiches discriminatoire» qui l'accompagne. Il a demandé à la Suisse d'assurer activement le respect de la liberté de religion.

Au terme de sa session, le comité des droits de l'homme, chargé
de veiller sur le respect par les Etats du Pacte de l'ONU sur les
droits civils et politiques, a fait plusieurs recommandations à la
Suisse. La Suisse présentait son rapport pour la première fois
depuis 2001.



"Le comité est préoccupé par l'initiative visant à interdire la
construction de minarets et par la campagne d'affiches
discriminatoire qui l'accompagne", affirment les 18 experts de
l'ONU dans leurs conclusions.



La Suisse "doit assurer activement le respect de la liberté de la
religion et combattre fermement les incitations à la
discrimination, à l'hostilité et à la violence", ajoute le comité
de l'ONU.



Il demande de renforcer les compétences de la commission fédérale
contre le racisme pour qu'elle puisse enquêter sur tous les cas de
discrimination raciale et d'incitation à la haine ou de créer un
mécanisme indépendant habilité à entamer une action légale dans de
tels cas.



Les autorités doivent renforcer leurs efforts pour promouvoir la
tolérance et le dialogue culturel dans la population et enquêter
sur toutes les menaces visant les minorités, y compris la
communauté juive. Le comité s'inquiète à cet égard de "la forte
hausse des incidents antisémites".

La police montrée du doigt

Les experts s'inquiètent également des informations sur les
brutalités policières commises lors d'arrestations ou pendant la
détention, "en particulier contre des demandeurs d'asile et des
migrants". Ils dénoncent "l'absence dans la plupart des cantons de
mécanismes indépendants pour enquêter sur les plaintes déposées
contre la police".

Le comité déplore en
outre la faible proportion de représentants des minorités dans les
forces de police. Il demande à la Suisse de s'assurer que tous les
cantons créent un mécanisme indépendant habilité à recevoir et à
enquêter sur toutes les plaintes pour usage excessif de la force,
mauvais traitements ou d'autres abus commis par la police.



Tous les responsables doivent être poursuivis et punis et les
victimes doivent être indemnisées. La Confédération doit également
créer une banque de données statistique sur les plaintes déposées
contre les forces de police et accroître ses efforts pour que les
minorités y soient représentées de manière adéquate.



Les experts de l'ONU demandent également l'amélioration des
conditions de vie dans les prisons "pour résoudre la question
urgente de la surpopulation, en particulier dans la prison de
Champ-Dollon" à Genève.

Protéger les droits des immigrés

Ils s'inquiètent aussi des conditions restrictives mises à une
assistance juridique des demandeurs d'asile lors de l'examen de
leur requête et des "conditions de vie inadéquates" de ceux dont la
demande a été rejetée.



La Confédération "doit protéger les droits fondamentaux des
personnes dont la demande d'asile a été rejetée et leur fournir des
conditions de vie et des soins adéquats".



Le principe de non-refoulement pour les personnes risquant des
persécutions dans leur pays par les groupes non étatiques doit être
pleinement respecté. La présence d'observateurs indépendants doit
être assurée lors du renvoi d'étrangers par les cantons.



ats/bkel

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Nombreuses recommandations

Parmi les autres recommandations, le comité de l'ONU demande à la Suisse de lever ses dernières réserves au Pacte, de ratifier son protocole facultatif, de créer une institution nationale des droits humains avec un large mandat et des ressources financières et humaines adéquates.

Les experts recommandent en outre d'intensifier les efforts pour lutter contre la violence à l'encontre des femmes, de mettre un terme à la détention d'armes à feu des militaires à domicile, de créer un registre national des armes à feu.

Ils demandent enfin de renforcer la législation sur l'aide au suicide et d'indemniser les victimes des castrations et stérilisations forcées conduites entre 1960 et 1987.

L'attitude du CF jugée "troublante"

Un expert du comité des droits de l'homme de l'ONU a affirmé vendredi ne pas comprendre la position du gouvernement suisse sur l'initiative anti-minarets.

Lors d'une conférence de presse suivant la publication des observations du comité sur le rapport de la Suisse, l'expert de l'ONU, Nigel Rodley (Grande-Bretagne) a estimé que le Conseil fédéral aurait dû déclarer irrecevable l'initiative visant à interdire la construction de minarets.

"Lors des débats, la position de la délégation suisse a été extrêmement troublante", a déclaré l'expert, interrogé par un journaliste.

La délégation du Conseil fédéral a reconnu que si l'initiative était acceptée le 29 novembre, elle serait contraire à plusieurs droits de l'homme, tels que la liberté religieuse et l'interdiction de la discrimination.

En même temps, la délégation a justifié le refus du Conseil fédéral de considérer l'initiative irrecevable, sous prétexte qu'une initiative est déclarée nulle seulement lorsqu'elle ne respecte pas les règles impératives du droit international et les normes du jus cogens.