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La nouvelle affiche de l'UDC fait polémique jusque dans ses rangs

Polémiques autour de l'affiche UDC avec la pomme véreuse: débat entre Oscar Freysinger et Céline Vara
Polémiques autour de l'affiche UDC avec la pomme véreuse: débat entre Oscar Freysinger et Céline Vara / Forum / 11 min. / le 19 août 2019
L'UDC a présenté dimanche son affiche de campagne en vue des fédérales, sur laquelle des vers censés figurer les adversaires du parti grignotent une pomme marquée de la croix suisse. L'image divise au sein même de l'UDC.

L'UDC a présenté dimanche, à deux mois des élections fédérales d'octobre, sa nouvelle affiche de campagne. On y voit une pomme censée représenter la Suisse, grignotée par cinq vers portant les couleurs de l'Union européenne et des principaux adversaires politiques de l'UDC -PS, Verts, PLR et PDC. "La gauche et les gentils doivent-ils détruire la Suisse?", interpelle le slogan dans sa version germanophone.

Tandis que le texte en français, légèrement édulcoré, martèle: "Des vers pour notre pomme? Non merci!"

"Cela rappelle des heures très sombres"

Depuis dimanche, l'affiche fait l'objet de critiques acerbes sur les réseaux sociaux alémaniques. Pour certains, l'image est grossière, écoeurante, et témoigne d'un manque d'idées neuves.

D'autres estiment en outre qu'elle présente des similitudes "de très mauvais goût" avec des éléments de propagande nazie. Sur Twitter, plusieurs internautes ont ainsi souligné que, dans les années 1930, l'imagerie du parasite et même spécifiquement de la pomme infestée de vers avait été utilisée dans le but de déshumaniser les juifs.

"Cela rappelle des heures très, très sombres", a ainsi twitté un internaute en réaction à l'affiche de campagne de l'UDC. "Comparer ses adversaires politiques à des animaux, et même à de la vermine, sent très fort la propagande nazie", a renchéri un autre.

"Qui devrait nous prendre au sérieux?"

Des voix critiques se font également entendre dans le monde politique, au sein bien sûr des autres formations, mais aussi jusque dans les rangs de l'UDC. Plusieurs élus cantonaux et nationaux du parti ont ainsi pris position contre ce visuel qu'ils jugent "maladroit", "excessif" et contre-productif. C'est le cas du conseiller national Claudio Zanetti (UDC/ZH) qui l'a étrillé sur Twitter.

"Sur ces images, ce ne sont ni la gauche, ni les gentils que l'on voit. C'est de la vermine qu'on éradique. Qu'attendez-vous de ces images indescriptibles? Qui devrait nous prendre au sérieux?"

Interrogé par le site Nau.ch, le conseiller national Thomas Hurter (UDC/SH) a déclaré la trouver "à côté de la plaque et insensible". La "médisance pure" à l'égard des adversaires politiques ne correspond "pas à notre style helvétique", a estimé l'élu, ajoutant que le message était incompréhensible.

L'ancien président de l'UDC schaffhousoise Pentti Aellig a quant à lui directement interpellé le président du parti Albert Rösti.

"Cher Albert, à Schaffhouse, 35% de l'électorat vote pour l'UDC car nous nous abstenons de recourir à ce genre d'affiches. Pensez à toutes les commissions supra-partisanes et aux apparentements de listes - et stoppez cette campagne."

Côté romand, les élus fédéraux UDC contactés lundi par la RTS ont semblé globalement moins critiques, à l'exception du conseiller national Jean Pierre Grin, qui a dit trouver le message "un peu choquant". Le Vaudois estime que l'affiche de campagne devrait plutôt délivrer un message positif.

La "belle pomme" suisse "évidée"

Interrogé dimanche dans le Sonntagsblick, le président du parti Albert Rösti a défendu la campagne en soutenant qu'elle avait pour but de mettre en évidence les menaces qui pèsent sur le pays, en particulier "l'accord-cadre avec l'UE" et "les excès du débat sur le climat": pour lui, "la belle pomme suisse est en train d'être évidée".

Le conseiller national UDC bernois Werner Salzmann a pour sa part avancé dans le Tages-Anzeiger que la controverse résultait d'une mauvaise interprétation de l'image des vers: selon lui, il ne s'agirait pas de vermine, mais d'"êtres vivants qui appartiennent au cycle de la nature".

Ce n'est pas la première fois que des supports de campagne de l'UDC défraient la chronique. En 2007, le visuel des moutons noirs avait fait l'objet d'un vaste débat. En 2009, c'est l'affiche anti-minarets qui avait été interdite de placardage dans plusieurs villes suisses.

Pauline Turuban

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