Alors que les coûts des prestations médicales ne cessent d'augmenter, en se répercutant sur les primes des assurés, le Conseil fédéral propose au Parlement un paquet de neuf mesures. Tous les acteurs obtiendront notamment des instruments pour contribuer à la maîtrise des coûts dans l'assurance obligatoire des soins.
"Prendre conscience des coûts"
Le projet prévoit ainsi que les fournisseurs de soins seront tenus d'envoyer systématiquement une copie de la facture aux patients après chaque traitement. Ces derniers pourront ainsi mieux contrôler si les prestations indiquées correspondent au traitement reçu et pourront prendre conscience des coûts.
"Très clairement la responsabilité du contrôle incombe aux assureurs", souligne le conseiller fédéral Alain Berset dans l'émission Forum. Mais, précise-t-il, "c'est quelque chose de très favorable en matière de transparence que les patients - notamment après un séjour à l'hôpital - puissent recevoir la facture, regarder si cela correspond à ce qu'ils ont souvenir d'avoir reçu comme prestations (...) Cela permet aussi à tout un chacun de voir quels sont les coûts qui sont générés, de prendre conscience de ce que cela représente."
Le projet prévoit également la possibilité de mener des projets-pilotes novateurs qui exploreraient les pistes pour réduire les coûts même s'ils sortent de la loi sur l'assurance maladie. Cela permettrait par exemple de tester de nouveaux modèles d'assurance ou de mener des essais en soins intégrés.
Haro sur le prix des génériques
Le Conseil fédéral veut aussi agir sur les prix des génériques, via un système de prix de référence applicable aux médicaments dont le brevet a expiré. Au moins trois médicaments contenant la même substance active devront coexister sur le marché. Le prix sera fixé en fonction du prix à l'étranger et du volume du marché de la préparation d'origine. L'assurance obligatoire ne remboursera que ce prix. Si un médicament plus cher est délivré, l'assuré devra payer la différence.
"Nous avons des prix des génériques qui sont à peu près deux fois plus élevés que dans les pays qui nous entourent et c'est un domaine sur lequel on n'a pas encore fait grand-chose", souligne Alain Berset. "On a beaucoup agi sur les médicaments protégés par des brevets (...) On a beaucoup agi dans d'autres domaines, dans le domaine ambulatoire. Il faut maintenant agir sur les génériques." Mais pour cela, le conseiller fédéral souligne que le gouvernement a besoin du soutien du Parlement, parce qu'il faut modifier la loi.
Ce système devrait permettre de réaliser des économies de 300 à 500 millions de francs par année, soit entre un sixième et un quart du marché des génériques.
Organisation tarifaire nationale
Dans le domaine des soins ambulatoires, le Conseil fédéral veut instaurer une organisation tarifaire nationale, comme cela existe déjà pour les soins stationnaires. "Cela permettra d'éviter les blocages comme avec le TARMED", a précisé le Fribourgeois.
Le gouvernement veut aussi obliger les fournisseurs de prestations et les assureurs à conclure des conventions nationales. Celles-ci devront prévoir des mesures correctives pour les augmentations injustifiées de coûts.
Des économies à long terme de plusieurs centaines de millions de francs par année sont attendues. Mais il n'y aura pas de baisse brutale des coûts, avertit Alain Berset qui annonce déjà une prochaine étape: "Il y aura un autre paquet que nous mettrons en consultation en janvier, on va continuer à amener des mesures chaque année."
ats/ebz
"Si demain nous n'avons plus qu'un seul générique, cela sera problématique."
Interrogé dans La Matinale de la RTS, Michel Matter, vice-président de la FMH, estime qu'il est important de garantir la liberté thérapeutique et un accès égalitaire aux médecins, sans que ce ne soit fait en fonction de la capacité financière. "Il est important de pouvoir traiter les gens et d'avoir le choix des traitements", souligne-t-il. "Si demain nous n'avons plus qu'un seul générique, cela sera problématique."
Le médecin critique frontalement la proposition du tarif dégressif, qui allouerait un budget global pour les soins sur l'année. "Avec ce système, il vaut mieux avoir un problème en janvier plutôt qu'au mois de novembre, parce qu'à ce moment-là, vous êtes probablement moins bien traité, on le voit en Allemagne, ça pose énormément de problèmes et je ne comprends pas qu'en Suisse on puisse imaginer rationner les soins."
>> Ecouter l'interview complète de Michel Matter dans La Matinale: