Dans plusieurs filiales du canton de Lucerne et de la ville de Lausanne, les guichetiers de La Poste se renseignent sur la couverture d'assurance maladie des clients. Les collaborateurs proposent même les conseils de l'assureur Concordia, seule caisse sélectionnée pour ce projet pilote.
La mission du géant jaune est-elle vraiment de promouvoir des assurances? Le patron de La Poste Roberto Cirillo n'y voit pas d'inconvénients. "Nous sommes intéressés à développer les services que nous pouvons apporter à partir du réseau que nous avons. Nous faisons des tests pour comprendre quels sont les besoins de la population", indique-t-il mercredi soir dans l'émission Forum. Le projet pourrait donc être étendu à d'autres secteurs que celui des assurances.
Dans une "double logique", le directeur général, nommé fin 2018, assure que les potentielles entreprises partenaires ont elles aussi besoin du réseau de La Poste. "Ce sont des entreprises qui se retrouvent dans une migration de leurs services en ligne. Pourtant, une partie importante de la population a encore besoin d'un contact humain", explique Roberto Cirillo.
"On touche le fond"
Dans le cadre d'un débat organisé sur le plateau de Forum, Yannis Papadaniel, responsable santé à la FRC, critique la démarche. Selon lui, la tâche des employés de La Poste n'est pas de conseiller en matière d'assurance.
"Il y a une contradiction. D'un côté il y a un démantèlement des offices de poste et on délègue les tâches à des acteurs dont ce n'est plus le métier, notamment dans des épiceries. De l'autre côté, on recherche de nouveaux débouchés et on attend des collaborateurs qu'ils exercent une tâche qui au départ n'est pas la leur", signale Yannis Papadaniel.
L'élu socialiste vaudois Nicolas Rochat Fernandez, membre de la commission parlementaire chargée des questions postales, n'approuve pas non plus le projet du géant jaune. "On touche le fond avec cette nouvelle idée. Je pense en priorité au personnel qui à l'heure actuelle a déjà un cahier des charges très lourd", déclare-t-il dans Forum.
Une seule caisse
Une autre problématique relevée par la FRC concerne la caisse Concordia, la seule incluse dans le projet. "La population veut une information claire et pas des courtiers qui ont des arrangements. Il faudrait une activité de conseil qui couvre l'ensemble de l'offre disponible en Suisse pour pouvoir faire un choix éclairé sur la base d'informations objectives. Or, le projet ne concerne que La Poste et une seule caisse maladie", souligne Yannis Papadaniel.
Roberto Cirillo répète pourtant qu'il ne s'agit que d'une phase pilote. "Il a fallu choisir un partenaire. L'objectif est de comprendre quelle est la demande dans le marché pour pouvoir développer ces services de manière ouverte", déclare-t-il.
Face à la situation financière du géant jaune (voir encadré), le directeur général estime que le développement des activités de La Poste est "absolument nécessaire". "Nous avons besoin de continuer à explorer les activités qui sont en ligne avec les compétences de nos collaborateurs pour maintenir le service public auto-financé."
Guillaume Martinez
Moins de lettres
La Poste affiche des résultats en baisse au premier semestre 2019. Son bénéfice consolidé s'est élevé à 193 millions, soit 25 de moins par rapport à l'exercice précédent, indique le géant jaune jeudi. Cette baisse est due au recul des produits d'intérêts chez PostFinance et du volume de lettres.
Le volume de lettres envoyées a en effet chuté de 5,5%, confirmant la tendance observée depuis plusieurs années. PostMail est toutefois parvenue à stabiliser son résultat semestriel grâce à l'optimisation des processus de traitement du courrier.
"La diminution volume de lettre est quelque chose de réel qui touche de manière profonde le système de La Poste", a déclaré mercredi dans Forum le directeur général Roberto Cirillo.