Tous les cantons ont dit non et une majorité d'entre eux l'a
fait à plus de 70%. Le texte a enregistré son meilleur résultat à
Genève, qui ne l'a repoussé que du bout des lèvres (51,8%). Suivent
Bâle-Ville (53,1%) et Vaud (59,5%).
Soutien des romands
En moyenne, les cantons romands ont davantage soutenu le texte
du GSsA que le reste du pays. Le Jura le rejette par 61,1%,
Neuchâtel par 62,8% Dans la majorité des cantons, le taux de refus
dépasse les 70%. C'est notamment le cas à Fribourg (71%), en Valais
(70,8%) et à Berne (70,3%). Le plus fort rejet a été enregistré à
Nidwald, siège de la société Pilatus (88%), suivi d'Uri (84,4%) et
d'Obwald (80,9%).
Cette initiative a fait un meilleur résultat que la précédente,
rejetée par 77,5% des votants en 1997. Mais elle n'a pas réussi à
égaler le très bon score de l'initiative sur laquelle les Suisses
ont voté en 1972. Ce texte n'avait été repoussé que par 50,3% et
huit cantons (FR, BS, BL, AG, TI, VD, NE, GE) l'avaient
accepté.
Menace sur les emplois
En pleine crise économique, la menace de pertes d'emplois -plus
de 10'000, selon l'industrie de l'armement- l'a finalement emporté
sur les considérations humanitaires et les couacs à répétition lors
de vente armes. Les mesures de compensation prônées par
l'initiative pour atténuer le choc dans les régions privées de ce
débouché n'ont pas convaincu.
Plus de 1,797 million de citoyens ont finalement considéré que les
derniers tours de vis décidés par le Conseil fédéral permettraient
d'éviter les abus et ont glissé un oui dans l'urne. Plus de 837'000
votants ont au contraire suivi la gauche et soutenu l'interdiction
prônée par l'initiative.
Celle-ci aurait frappé l'exportation et le transit de matériel de
guerre mais aussi de biens militaires spécifiques (comme les avions
d'entraînement ou les simulateurs). Les armes de chasse et de
sport, les appareils servant au déminage humanitaire et les biens
exportés temporairement n'auraient pas été concernés.
"L'argument économique a pesé très lourd"
Le GSsA estime que le résultat de la votation à l'initiative sur
le matériel de guerre constitue un signe de défiance à l'égard de
la politique du Conseil fédéral. Environ un tiers des votants
n'accepte pas que la Suisse alimente en armes les conflits dans le
monde, note le groupe.
"Le taux important de oui est d'autant plus remarquable que les
opposants à l'initiative ont profité de la crise économique pour
susciter des peurs concernant les pertes d'emploi", indique le
Groupe pour une Suisse sans armée dans un communiqué. Le GSsA, qui
n'hésite pas à parler de "grand succès", estime que le résultat
constitue un signe de défiance à l'égard de la politique du Conseil
fédéral. Environ un tiers des votants n'accepte pas que la Suisse
alimente en armes les conflits dans le monde, note le groupe.
LA REACTION DES PARTIS...
Les partis de droite et les milieux économiques sont très
satisfaits du net rejet de l'initiative. Déçue, la gauche exige du
Conseil fédéral une application plus restrictive de la loi en
vigueur.
Le PLR se réjouit surtout de la clarté du
résultat, qui correspond aux attentes des opposants à l'initiative,
a dit le conseiller national bernois Johann Schneider-Ammann.
L'argument des places de travail menacées a certainement été
déterminant, selon lui. Pour le PDC aussi, la
situation conjoncturelle a été décisive et l'initiative du GSsA
"allait trop loin". "Grande satisfaction" aussi du côté de
l'UDC, où le vice-président Yvan Perrin a insisté
sur les deux composantes de l'initiative. Sur le plan économique,
elle aurait entraîné une perte d'emplois et de savoir-faire, et,
sur le plan militaire, elle aurait miné la capacité de montée en
puissance de l'armée et donc le concept Armée XXI, estime le
conseiller national neuchâtelois.
De son côté, le PS est "naturellement déçu" du
rejet de l'initiative sur l'interdiction des exportations de
matériel de guerre. La conseillère nationale bernoise Evi Allemann
a exprimé ses "grands regrets" et demande une application plus
restrictive de la loi. Le président des Verts Ueli
Leuenberger s'est dit déçu du résultat du vote. "Nous regrettons
que la campagne des milieux économiques sur les places de travail
ait amené un score aussi important de refus", a-t-il indiqué.
L'argument des postes de travail menacés a d'ailleurs été largement
exagéré par les opposants.
...ET DES MILIEUX ECONOMIQUES ET DES
SYNDICATS
Les milieux économiques affichent aussi un large sourire. Pour
l'Union patronale suisse (UPS), "cette décision
préserve les emplois ainsi que le précieux savoir-faire
technologique de notre industrie nationale de l'armement et des
sous-traitants, ce qui est profitable à la sécurité de la Suisse et
évite à son armée un affaiblissement ultérieur".
C'est un verdict important du point de vue de l'industrie, a
renchéri Johann Schneider-Ammann, président de l'industrie suisse
des machines, des équipements électriques et des métaux
(Swissmem). "Les exportations de matériel de
guerre ont toujours été soumises à des contrôles rigoureux, et nous
allons continuer dans cette voie, en se basant sur les lois en
vigueur", a-t-il souligné.
Pour RUAG, l'entreprise d'armement en mains de la Confédération,
le résultat est une "bonne nouvelle pour nos employés et leurs
familles". L'entreprise s'engage par ailleurs à s'en tenir au
régime sévère en vigueur en matière d'exportations.
Le syndicat Unia, qui soutenait l'initiative,
s'attendait à un rejet en raison du taux de chômage élevé dans
l'industrie d'exportation. Unia attend aussi du Conseil fédéral une
application plus stricte de la loi en vigueur. L'Union
syndicale suisse (USS), qui laissait la liberté de vote,
n'a pas souhaité réagir au résultat.
ats/mej