La veille déjà, de fortes rafales de vents accompagnées
d'éclairs et de tonnerre ont déraciné des arbres, décoiffé des
toits et coupé routes, voies CFF et courant. Plusieurs blessés sont
signalés. Qualifié dans un premier temps de tempête hivernale,
l'ouragan dégénère vite, dévastant tout sur son passage et
commençant à tuer.
Tout ce qui n'est pas solidement fixé s'envole: tuiles, chaises,
pots de fleur et autres objets constituant autant de dangers pour
quiconque se trouve dehors. La nature est meurtrie. Les hommes
aussi: avec 14 morts durant le plus fort de la tempête et 15 autres
durant les travaux de déblaiement, le bilan de Lothar est très
lourd. En Europe, 110 personnes ont perdu la vie.
Les ravages du vent
Avec des pics atteignant 160 km/h en
plaine et plus de 250 km/h en montagne, les rafales de vent
soulignent l'impuissance de l'homme face aux forces de la nature.
Même protégés à l'intérieur de leur maison, les Suisses sont
témoins de la violence de la tempête: ils entendent les
bourrasques, les murs et les fenêtres craquer ou voient les arbres
ployer quand ils ne se brisent pas.
Les pannes de courant se multiplient. Certains villages sont
isolés, les voies de communication étant coupées. Les autorités
appellent les gens à rester chez eux. Les balades en forêt sont
fortement déconseillées: certains arbres affaiblis peuvent chuter à
tout moment comme le prouvera le bilan des employés morts en
procédant au déblaiement des forêts.
Au final, plus de 10 millions d'arbres sont déracinés ou brisés
par Lothar. Le prix du bois chute de plus de 30% et ne se rétablira
qu'en 2005. Les dégâts aux forêts, aux vergers, aux bâtiments et
aux installations électriques sont estimés à 1,47 milliard de
francs. Dix ans plus tard, toutes les plaies ne sont pas pansées
même si la nature a su se régénérer et se diversifier grâce à la
catastrophe.
ats/dk
Des tempêtes plus fréquentes et plus violentes
Les fortes tempêtes d'hiver sont devenues plus fréquentes en Suisse durant les dernières décennies et les dégâts qu'elles provoquent dans les forêts ont augmenté. Telle est la conclusion de deux études de l'Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (WSL) publiées dix ans après le passage de l'ouragan Lothar à travers la Suisse.
La première montre en effet que la vitesse des rafales a fortement augmenté lors des tempêtes d'hiver depuis 1891 et que les rafales sont de plus en plus nombreuses, peut-on lire dans un compte-rendu publié par la revue "International Journal of Climatology". Cette recherche repose sur une série de mesures de la vitesse du vent, relevées dans le canton de Zurich.
Entre 1958 et 2007, la Suisse a connu 25 fortes tempêtes d'hiver, dont chacune a mis à terre plus de 70'000 m3 de bois. Ces chiffres sont présentés dans une seconde étude du WSL publiée récemment dans la revue "Agricultural and Forest Meteorology". Dans cette période, les fortes tempêtes d'hiver ont été deux fois plus nombreuses qu'au cours des 50 années précédentes. Elles ont causé 22 fois plus de dégâts en forêt qu'au cours des 100 années précédentes.
L'augmentation du nombre de tempêtes d'hiver ne touche pas que la Suisse, mais aussi de nombreuses autres régions d'Europe. Les recherches devront donc se poursuivre pour permettre aux scientifiques de se prononcer sur l'évolution de cette augmentation des tempêtes et des dégâts qu'elles occasionnent en forêt.