La crise des otages suisses en Libye se rapproche d'un
dénouement. Rachid Hamdani a été blanchi ce week- end de
l'accusation d'activités économiques illégales.
"Rachid Hamdani a bénéficié d'un non-lieu", a indiqué son avocat
Me Salah Zahaf, précisant que le procureur pourrait faire appel à
ce jugement.
Le DFAE confirme le non-lieu
Interrogé sur le fait de savoir si Rachid Hamdani pourrait
désormais quitter le territoire libyen, l'avocat a déclaré: "selon
la loi, oui il le peut", sans préciser si son client avait
l'intention de quitter le pays où il est retenu depuis juillet
2008, comme Max Göldi.
"Le DFAE confirme le non-lieu, mais ne fait aucun commentaire", a
déclaré le porte-parole du Département fédéral des affaires
étrangères Andreas Stauffer. L'organisation humanitaire Amnesty
International a également confirmé l'information. Plus rien
n'empêche la sortie de Libye de Rachid Hamdani, a souligné le
porte-parole d'Amnesty International (AI) Daniel Graf. "Nous
attendons maintenant des autorités libyennes qu'elles lui rendent
immédiatement son passeport, et qu'elles lui fournissent un visa de
sortie", a-t-il ajouté.
L'avocat de Rachid Hamdani a toutefois précisé que le procureur
peut encore faire appel à ce jugement. Toutes les charges contre
Rachid Hamdani sont maintenant écartées. Il y a une semaine, dans
un premier procès en appel, Rachid Hamdani avait déjà été acquitté
de l'accusation de séjour illégal en Libye. Il avait dans un
premier temps écopé d'une peine sévère de seize mois
d'emprisonnement.
L'avenir de Max Göldi encore incertain
Poursuivi également pour exercice
d'activités économiques illégales, Max Göldi a de son côté écopé
samedi d'une amende de 800 dollars. Mais, contrairement à Rachid
Hamdani, il doit encore attendre le verdict dans son autre procès
pour "séjour illégal", ajourné jeudi dernier au 11 février.
Réfugiés dans l'ambassade suisse à Tripoli, Rachid Hamdami,
responsable d'une PME suisse, et Max Göldi, chef de la filiale en
Libye du groupe ABB, avaient été condamnés par contumace le 30
novembre 2009 à 16 mois ferme pour "séjour illégal" dans ce pays.
Ils avaient été arrêtés le 19 juillet 2008 en Libye, peu après
l'interpellation à Genève de Hannibal Kadhafi et de son épouse, sur
une plainte de deux domestiques accusant leur employeur de mauvais
traitements.
Une affaire longue et épineuse
Ils avaient été remis en liberté le 28 juillet 2008 et
résidaient depuis à l'ambassade de Suisse avec interdiction de
quitter le territoire libyen. Mi-septembre 2009, alors qu'ils
devaient subir des tests médicaux, les deux hommes avaient été
conduits dans un lieu tenu secret par Tripoli - opération qualifiée
de "kidnapping" par Berne -, avant d'être remis le 9 novembre 2009
à leur ambassade.
Les procès des deux hommes, qui craignaient d'être arrêtés à leur
sortie de l'ambassade, avaient été reportés à plusieurs reprises en
raison de leur absence aux audiences. Il y a deux semaines, ils ont
décidé de quitter la représentation helvétique et de comparaître
devant la justice, après avoir obtenu au préalable des "garanties"
de la part de la Fondation Kadhafi, de ne pas être arrêtés à leur
sortie ou à leur retour à l'ambassade, selon Me Zahaf.
Outre l'intervention de la Fondation présidée par Seif Al-Islam,
fils du numéro un libyen Mouammar Kadhafi, l'avocat avait fait état
également d'une médiation allemande. L'affaire Kadhafi a envenimé
les relations entre Tripoli et Berne qui ont pris des mesures de
rétorsion: retrait d'avoirs bancaires des banques suisses et départ
des sociétés helvétiques du côté libyen, adoption d'une politique
restrictive de visas Schengen envers les ressortissants libyens
côté suisse.
agences/cer
Une bonne nouvelle pour Max Göldi, estime Habidi
Rachid Hamdani devrait bientôt recouvrer la liberté, estime un expert du monde arabe. Le sort du second Suisse retenu pourrait connaître bientôt le même dénouement, si toutefois Tripoli obtient un geste de Berne.
Théoriquement rien ne s'oppose à une libération de Rachid Hamdani, car il n'est pas obligé d'attendre les décisions de justice concernant l'autre Suisse retenu, les cas étant séparés, a expliqué Hasni Abidi, directeur du Centre d'études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen (CERNAM).
Le procureur libyen peut faire appel de cette relaxe, certes, mais il n'est pas dans l'intérêt des autorités judiciaires et politiques de s'opposer à cette décision, poursuit Hasni Abidi "Car pour eux (les Libyens) le but est atteint: la justice a travaillé jusqu'au bout (...), montrant bien que, selon Tripoli, les procès intentés aux deux Suisses n'ont rien à faire avec l'arrestation d'Hannibal Kadhafi à Genève en juillet 2008", ajoute le chercheur.
"Maintenant, les Libyens attendent un geste suisse, pour ne pas dire genevois, concernant les conditions de l'arrestation d'Hannibal Kadhafi", souligne Hasni Abidi.
Toutefois, si Rachid Hamdani, qui est suisse mais également originaire d'un pays arabe, est relâché et que Max Göldi est retenu, l'opinion publique va le percevoir comme un discrimination, et Tripoli n'y a pas intérêt, analyse le directeur du CERNAM.
"La double relaxe de Rachid Hamdani ne peut donc qu'encourager le moral de Max Göldi, conclut Hasni Abidi.