Alors que le Conseil national doit examiner l'initiative lors de
la session de mars, les manoeuvres en coulisses vont bon train.
Craignant que le peuple accepte le texte, PDC et PLR prônent
désormais l'élaboration d'un contre-projet direct, nettement
atténué, qui serait inscrit dans la Constitution.
L'UDC et le comité de l'initiative "Contre les rémunérations
abusives" ne veulent pas de cette idée: ils se sont mis d'accord
sur une nouvelle conception du droit de la SA cotée en bourse censé
servir de contre-projet indirect.
Minder convaincu
Ce contre-projet est encore meilleur que l'initiative, a assuré
Thomas Minder mercredi devant la presse. Son premier avantage est
de pouvoir être inscrit dans la loi, sans surcharger la
Constitution, d'après lui.
Il reprend les exigences principales telles que le renforcement
des droits des actionnaires, leur droit de vote sur les
rémunérations de la direction et du conseil d'administration,
l'interdiction des parachutes dorés ou l'élection annuelle des
administrateurs.
Mais le contre-projet est complété par des propositions comme
l'obligation de restituer les prestations manifestement
injustifiées ou l'interdiction de vote pour les actionnaires non
inscrits au registre ("nominee"), a souligné Thomas Minder.
Aux yeux du patron de Trybol SA, il y a eu beaucoup trop d'excès
salariaux chez les top managers ces dernières années. Pour éviter
que l'Etat en vienne à régler la question, comme aux Etats-Unis, il
faut renforcer les droits des propriétaires des sociétés, soit les
actionnaires, a-t-il exigé.
Socialistes en embuscade
Si la droite ne s'unit pas pour renforcer le droit de la SA, la
gauche va imposer une intervention étatique, a renchéri le chef du
groupe parlementaire UDC Caspar Baader.
Réagissant au nouveau concept présenté mercredi, les socialistes
se sont quant à eux inquiétés des retards qu'allaient entraîner la
voie du contre-projet. Et de dénoncer les manoeuvres dilatoires de
l'UDC tout en réclamant des mesures plus strictes contre les excès
salariaux, dans un communiqué.
Les jeunes socialistes ont d'ailleurs lancé une initiative visant
à limiter à douze fois l'écart entre le salaire le plus bas et le
plus élevé dans une même société.
Menaces de l'UDC
L'ex-conseiller fédéral Christoph Blocher, qui a participé
étroitement à l'élaboration du contre-projet, a vanté quant à lui
les mérites de la nouvelle solution. "L'initiative Minder est
certes à même de résister à un tsunami et d'être acceptée par le
peuple, mais elle est trop rigide", selon le Zurichois.
Si le contre-projet passe la rampe des Chambres fédérales sans
être trop retouché, Thomas Minder est prêt à retirer l'initiative.
Dans le cas contraire, l'UDC va soutenir le texte lors de la
votation populaire, a menacé Christoph Blocher.
Au Conseil des Etats, la portée de la révision du droit de la SA,
élaborée par le gouvernement alors que Christoph Blocher était
encore en fonction, a été nettement réduite en juin. A l'époque,
l'UDC s'était unie aux radicaux et aux démocrates-chrétiens pour
affaiblir la plupart des dispositions, pourtant nettement moins
strictes que le nouveau contre-projet,
ats/sbo
Ce que demande l'initiative de Thomas Minder
Thomas Minder a lancé son initiative contre les rémunérations abusives en 2006.
Après avoir récolté 120'000 signatures, l'entrepreneur a déposé son texte à la Chancellerie fédérale en février 2008.
Il demande un renforcement de la surveillance des actionnaires sur les salaires des patrons des sociétés suisses cotées en Bourse.
Il exige aussi l'abolition des parachutes dorés ainsi que la fin des rémunérations anticipées.