Les trois ministres se sont retrouvés au Palais Viana, siège du
ministère espagnol des affaires étrangères à Madrid. Lors d'une
conférence de presse, Miguel Angel Moratinos - dont le pays assure
la présidence de l'Union européenne (UE) - a estimé que la
situation était "difficile", mais qu'il avait constaté des
"progrès" sur le dossier et une "volonté de trouver une
solution".
"L'Espagne a réussi à rapprocher les positions, mais on ne peut
pas résoudre ce contentieux en une matinée ou même 24 heures", a
aussi dit le ministre espagnol. "Nous allons transmettre la
proposition des Suisses aux Libyens. Nous avons réalisé un exercice
de bons offices, mais ceux qui doivent résoudre ce problème sont la
Suisse et la Libye", a-t-il ajouté.
La rencontre de jeudi visait à résoudre la crise diplomatique
entre la Suisse et la Libye, qui a débordé sur les pays européens
depuis que Tripoli a suspendu l'octroi de visas aux citoyens de
l'espace Schengen. Une réponse, selon le régime libyen, au
durcissement de la politique de visas de la Confédération à l'égard
des citoyens libyens.
"Nous avons bien travaillé"
A l'issue des discussions, Micheline Calmy-Rey a déclaré: "Nous
avons bien travaillé". Les entretiens seront poursuivis, a ajouté
la cheffe du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE). La
ministre suisse a tout d'abord rencontré son homologue espagnol.
Celui-ci a ensuite discuté avec le ministre libyen des affaires
étrangères. Une discussion tripartite a eu lieu dans la
foulée.
Selon un communiqué du DFAE, la conseillère fédérale a expliqué
que la Suisse avait durci sa politique de visas à l'encontre de la
Libye à l'automne 2009, après l'enlèvement des deux Suisses retenus
à Tripoli. Mi-septembre 2009, alors qu'ils devaient subir des tests
médicaux, Max Göldi et Rachid Hamdani - retenus en Libye depuis
juillet 2008 - avaient été conduits dans un lieu tenu secret par
Tripoli, avant d'être remis le 9 novembre à leur ambassade. Les
autorités libyennes n'avaient donné aucune explication.
"Souveraine et légale"
Se référant aux mesures prises par
la Suisse concernant les visas délivrés aux Libyens, Miguel Angel
Moratinos a dit espérer que les restrictions soient levées "le plus
vite possible". La décision de la Confédération est "souveraine et
légale", a toutefois tenu à relever le ministre. La crise entre la
Suisse et la Libye a également occupé jeudi les responsables
européens à Bruxelles.
Les ambassadeurs des 27 pays membres de l'UE ainsi que les experts
du groupe visas des Etats associés à l'espace Schengen, dont la
Suisse fait partie, ont évoqué ce contentieux. Plusieurs sources
européennes ont dit espérer un règlement dans les 48 heures. Selon
des sources européennes, une réunion doit avoir lieu ce vendredi à
Berlin entre des représentants des différentes parties. Interrogé
jeudi soir par l'ATS, le DFAE n'était pas en mesure de
confirmer.
"Bassesse politique"
Alors que la diplomatie tourne à plein régime, la Libye a une
nouvelle fois soufflé le froid jeudi, qualifiant de "bassesse
politique" la "liste noire" de personnalités libyennes interdites
d'entrée en Suisse. Un porte-parole du gouvernement a estimé que
Berne veut ainsi "détourner l'attention de l'accord" signé en août
2009 pour régler la crise. Selon une source du Conseil à Bruxelles,
cette fameuse liste comporte 150 noms. Les Libyens ont avancé ces
derniers jours le chiffre de 188.
Photos de Kadhafi: l'enquête continue
Toute cette affaire a débuté avec l'arrestation en juillet 2008 de l'un des fils du colonel Kadhafi, Hannibal, dans un palace genevois.
Des photos d'Hannibal prises par la police peu après cette arrestation ont été publiées quelque temps plus tard dans la "Tribune de Genève", provoquant le courroux de la Libye.
Dans un communiqué publié jeudi, la justice genevoise a indiqué que l'enquête ouverte suite à cette publication suivait son cours dans la plus grande confidentialité.
Dans un communiqué diffusé jeudi, les autorités affirment leur détermination à découvrir le ou les auteurs de ces divulgations.
"De tels agissements sont constitutifs de l'infraction de violation du secret de fonction", juge la justice.
En septembre dernier, la "Tribune de Genève" avait publié 2 photos d'identité du fils Kadhafi prises par la police peu après son arrestation dans un palace genevois.
Sur ces photos, il apparaissait les cheveux en bataille, le regard fatigué et la mine sombre.
La France exige des clarifications
Jeudi, la France a de son côté "demandé des clarifications" à l'ambassadeur de Libye à Paris et exprimé sa "préoccupation". "A notre connaissance, sept ressortissants français ont été refoulés à leur arrivée en Libye", a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Bernard Valero.