"J’ai eu la chance, pendant douze ans, de marquer les axes principaux de mon parti, les grandes orientations. Aujourd’hui, c’est à d’autres de le faire et je les laisserai faire", indique Christian Levrat dans La Matinale.
Fraîchement réélu au Conseil des Etats, il restera présent sur la scène politique. "Je vais continuer à faire mon travail, qui est de défendre les intérêts des Fribourgeoises et des Fribourgeois. Je serai aussi président de la Commission de l’économie pour les deux ans à venir. Je vais continuer à jouer un rôle. Je vais probablement m’effacer un peu, par contre, sur la scène partisane", confie-t-il.
Décision prise il y a quatre ans
En comparaison européenne, Christian Levrat peut avoir le sourire. Alors que les socialistes sont à la peine en Europe, le PS surnage en Suisse. Il est la deuxième force politique du pays et est représenté au gouvernement. Il a réussi ces dernières années à la fois à imposer certains compromis, comme la fiscalité des entreprises liée au financement de l'AVS, mais aussi à contrer certaines réformes trop libérales de la droite.
Mais le Fribourgeois n'a pas su enrayer l'érosion inéluctable de son électorat, notamment populaire. Le PS pesait 19,5% lorsqu'il en a pris les rênes. Le parti est tombé lors des élections fédérales d'il y a trois semaines à son niveau le plus bas depuis 1919, avec 16,8%.
"Ce ne sont pas ces résultats qui ont précipité ma décision. Elle a été prise il y a quatre ans et il était clair que ce seraient les dernières élections que je conduirais comme président du Parti socialiste", révèle le Gruérien.
Election en avril
"Aujourd’hui nous sommes dans une situation particulière, et cela ne concerne pas seulement le PS. Les radicaux ont obtenu leur pire score historique, ils n’ont jamais été aussi bas. L’UDC a quant à elle réalisé son plus mauvais score depuis 1999. Alors oui, il faut analyser les conséquences de notre recul, mais il ne faut pas non plus le dramatiser", livre Christian Levrat.
La concurrence des Verts et des Vert'libéraux, à gauche et à droite du PS, est un nouveau défi pour le parti. Son nouveau président sera élu à Bâle au début du mois d'avril 2020.
"La dernière chose que je vais faire en tant que président sera de me prononcer sur le profil de mon successeur. Plusieurs personnes sont présentées comme étant mes héritiers potentiels, il appartiendra à nos militants d'en décider. Je pourrais citer Flavia Wasserfallen, Nadine Masshardt, Cédric Wermuth, Jon Pult, Barbara Gysi ou encore Beat Jans", déclare Christian Levrat.
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"Handicap" pour les Romands en Suisse alémanique
En tant que Romand, Christian Levrat reconnaît avoir eu quelques difficultés à jouer son rôle de président au niveau national. "Ce que j’ai pu expérimenter, c’est quand même un certain handicap en Suisse alémanique. Même si vous parlez très bien l’allemand, que vous êtes régulièrement invité dans des émissions TV, vous n’avez pas les mêmes références culturelles. Et donc pas les mêmes possibilités de vous adresser au coeur de vos compatriotes alémaniques. J’ai parfois eu le sentiment que je parlais plus à la raison qu’aux tripes en Suisse alémanique", signale-t-il.
Suisse alémanique et Suisse romande sont-elles donc tout simplement en train de se distancer? "Cela me paraît assez clair. Il y a un petit univers médiatique romand qui tourne plus ou moins en vase clos et nous oublions parfois que 80% à 90% de la politique fédérale se fait en Suisse alémanique", répond Christian Levrat.
Pour Andreas Gross, positionner le PS plus à gauche est "un piège"
Pour l'ancien conseiller national socialiste Andreas Gross, orienter le PS plus à gauche est dangereux. "La droite aimerait qu'on le fasse, mais il ne faut pas tomber dans ce piège", a-t-il réagi dans La Matinale de la RTS mercredi.
Selon lui, le transfert du vote d'une partie de l'électorat socialiste vers les Verts aux dernières élections fédérales ne s'explique pas par un positionnement trop centriste du PS, mais par l'incapacité de montrer la compétence du parti en matière de protection de l’environnement. "Nous étions comme les spectateurs d’un cinéma, au lieu d’être sur la scène. Ce n’est pas une erreur de fond, mais une erreur de tactique", estime Andreas Gross.
"Quelqu'un qui rayonne, pas un mécanicien"
Interrogé sur la nécessité de placer une femme alémanique à la tête du parti, il ne fait pas de la question du genre l'élément crucial dans le choix du candidat: "La priorité, c’est la compétence sociale. Il faut quelqu'un qui éclaire, qui rayonne. Pas quelqu’un qui serait le mécanicien du Palais fédéral".
>> Ecouter son interview dans La Matinale: