Anouk et son mari font partie des quelque 4500 familles qui doivent concilier une activité professionnelle et l'accompagnement de leur enfant gravement malade. Ces Valaisans ont vu leur vie chamboulée il y a deux ans et demi lorsque leur fille cadette de six ans a été diagnostiquée d'un neuroblastome, un type de cancer rare.
"Cela a évidemment été un choc très rude pour toute la famille", rapporte Anouk. Employée à 80% par l'Etat du Valais, la maman a dû cesser son activité d'enseignante: "J'ai été mise à l'arrêt par mon médecin car il était impossible pour moi de gérer l'aspect professionnel et l'accompagnement de ma fille et de mes fils", explique-t-elle.
Une année plus tard, elle a pu recommencer à travailler à temps partiel. "Noélie était encore malade, mais elle avait des traitements moins lourds, avec des chimiothérapies en ambulatoire." Mais après une amélioration temporaire, la situation s'est à nouveau détériorée. "Il y a eu de nouvelles complications et des séjours hospitaliers très longs. J'ai donc dû demander un congé non payé pour pouvoir rester auprès d'elle."
Des journées impossibles à planifier
Concilier travail et suivi de son enfant est actuellement impossible pour la maman: "Lorsque je me lève le matin, je ne sais pas comment la journée va se passer pour ma fille et moi. Elle a parfois des douleurs qui l'empêchent d'aller à l'école par exemple (...) Me rendre sur un lieu de travail et dire que je serai présente de 8h à 18h sans interruption est impossible."
L'aspect financier représente un souci supplémentaire: "C'est une double peine. Car, à la première peine de l'inquiétude extrêmement lourde d'avoir un enfant qui se bat pour sa survie, s'ajoutent des inquiétudes financières car il y a une perte sèche de gain", rapporte-t-elle.
"Les 14 semaines seraient un premier pas"
Que pense-t-elle du congé payé de 14 semaines accordé aux parents d'un enfant atteint d'une maladie grave? "Symboliquement, c'est un premier pas qui est fort et qui serait apprécié de toutes les familles concernées."
Mais cela reste insuffisant: "Dans le meilleur des cas, avec des leucémies qui évoluent bien par exemple, on parle de six mois de traitements intensifs. Or, ma fille se bat depuis deux ans et demi contre son cancer et elle n'est toujours pas en rémission."
L'effort doit venir du public, mais aussi du privé, estime-t-elle. "On ne peut pas tout faire peser sur l'Etat ni sur le monde de l'économie privée. Mais c'est au politique d'envoyer le signal aux entreprises."
Julien Bangerter
Un congé payé de 14 semaines
Les parents bénéficieront d'un congé indemnisé de quatorze semaines pour s'occuper d'un enfant gravement malade. Et un employé pourra s'absenter pour soigner un proche. Après le National, le Conseil des Etats a accepté mercredi sans opposition un projet en ce sens. Il propose toutefois un ajout.
Environ 1,9 million de personnes accompagnent un enfant ou un adulte chaque jour en Suisse. En 2016, cela a représenté 80 millions d'heures de travail, soit 3,7 milliards de francs. Or, seuls deux tiers des entreprises accordent actuellement des congés à leurs employés, en partie rémunérés, en cas d’absence de courte durée pour prodiguer des soins à un proche.
La mesure-phare concerne les parents, dont l'enfant est gravement malade ou accidenté. Ils pourront bénéficier d'un congé de quatorze semaines au plus. Le coût du projet est estimé à 30 millions de francs pour les entreprises et 75 millions pour les allocations perte de gain.
Le Conseil des Etats a par ailleurs tacitement classé une initiative du canton de Berne, demandant l'introduction d'un congé rémunéré par les parents d'enfants gravement malades. Il estime que l'objectif de ce texte est atteint par le projet du Conseil fédéral. Le National avait déjà classé l'objet en juin.