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Coup de froid entre Berne et Pékin sur la question des droits humains

Le dialogue Suisse-Chine sur les droits humains est suspendu dans un climat tendu
Le dialogue Suisse-Chine sur les droits humains est suspendu dans un climat tendu / Forum / 2 min. / le 19 décembre 2019
Le dialogue Suisse-Chine sur les droits humains prévu l’été dernier a été suspendu par la Chine, qui aurait ainsi réagi à la publication d'une lettre co-signée par Berne, et appelant Pékin à mettre fin à la détention de Ouïghours au Xinjiang.

C'est la NZZ am Sonntag qui révélait, il y a quelques semaines, ce refroidissement dans les relations entre les deux pays.

La lettre, cosignée par Berne et 22 autres Etats, était adressée au président du Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Datée de juillet dernier, elle appelait le gouvernement chinois à mettre fin à la détention arbitraire de Ouïghours au Xinjiang et à permettre au Haut-Commissaire aux droits de l'homme d’accéder sans restriction à cette région de l’extrême ouest de la Chine, là où le gouvernement est accusé d’avoir enfermé jusqu’à 1 million de membres des minorités musulmanes turcophones dans des camps de rééducation.

Sujets qui fâchent

Contacté, le Département fédéral des affaires étrangères ne précise toutefois pas  les motifs du report du dialogue Suisse-Chine 2019. Le DFAE se contente de mettre en avant la volonté des deux parties de reprendre très prochainement ces discussions.

Pékin ne reprocherait pas directement à la Suisse d’avoir critiqué sa politique au Xinjiang, mais plutôt le fait que Berne affiche publiquement cette inquiétude aux côtés d’autres membres de la communauté internationale.

C'est que le Parti communiste chinois préfère discuter des sujets qui fâchent loin des regards. C’est d'ailleurs la raison d’être du dialogue sur les droits de l’homme: il s’agit de rencontres périodiques où représentants suisses et chinois échangent lors de séances strictement confidentielles

Ce mécanisme bilatéral a été mis en place par la Chine avec la Suisse et plusieurs autres Etats étrangers. Cette stratégie permet à Pékin d’évacuer la problématique des droits humains de la scène publique et d’éviter qu’elle ne pèse sur d’autres sujets de discussion.

De leur côté, de nombreux diplomates y voient une manière d’aborder ouvertement le sujet sans passer pour des donneurs de leçon.

Opacité

Il est toutefois impossible de juger de l'efficacité de ce mécanisme dans la mesure où tout est confidentiel, voire opaque.

Ce manque de transparence est critiqué par les ONG et de nombreux acteurs politiques: La Chine est accusée de mener en bateau les états occidentaux par le biais de ce dialogue, que les occidentaux brandiraient, eux, comme "cache-sexe" permettant de justifier l’absence de dispositions relatives aux droits de l’homme dans leurs relations avec Pékin.

Ainsi a-t-on entendu en 2013 en Suisse - à l'occasion de la signature de l'accord de libre-échange avec la Chine: "Pas besoin d’évoquer à tout bout de champ les droits de l’homme puisque cette problématique a déjà un espace de discussion dédié".

>> Quelles relations la Suisse doit-elle entretenir avec la Chine? Interview de Carlo Sommaruga, conseiller aux Etats socialiste, et Laurent Wehrli, conseiller national PLR et président de l'intergroupe parlementaire Suisse-Chine. :

Quelles relations la Suisse doit-elle entretenir avec la Chine? Interview de Carlo Sommaruga et Laurent Wehrli
Quelles relations la Suisse doit-elle entretenir avec la Chine? Interview de Carlo Sommaruga et Laurent Wehrli / Forum / 7 min. / le 19 décembre 2019

Michaël Peuker

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