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La nouvelle norme antiraciste incluant aussi l'homophobie soumise au vote

Le grand débat - Homophobie: faut-il pénaliser?
Le grand débat - Homophobie: faut-il pénaliser? / Forum / 20 min. / le 13 novembre 2019
La nouvelle norme pénale criminalisant l'homophobie sera soumise au verdict des urnes le 9 février. Les opposants ont déposé un référendum par crainte d'une atteinte à la liberté d'expression, alors que les partisans saluent une amélioration de la protection des minorités sexuelles.

Le code pénal protège les citoyens contre différentes formes de discrimination, notamment celles liées à l’appartenance raciale, ethnique ou religieuse. Le Parlement a décidé fin 2018 d’améliorer cette protection et d'élargir le champ d’application de la norme antiracisme à toute discrimination fondée sur l’orientation sexuelle. Cette proposition est partie d'une initiative parlementaire du conseiller national Mathias Reynard (PS/VS).

Cet élargissement prévoit l'interdiction des propos et actes publics portant atteinte à la dignité humaine qui visent une personne ou un groupe de personnes en raison de leur orientation sexuelle, et rendra punissable quiconque refuse à une personne, au motif de son orientation sexuelle, une prestation destinée à l’usage public.

La norme pénale ne s’appliquera toutefois pas aux propos ou actes qui prennent place dans le cadre familial ou entre amis. Les débats publics raisonnés ne seront pas non plus concernés par cette norme et resteront possibles. Enfin, le Conseil des États a refusé d’étendre l’article aux discriminations liées à l’identité de genre, et les personnes intersexuées ou transgenres ne bénéficieront pas d’une meilleure protection.

"Une restriction à la liberté d'expression", selon les référendaires

L'Union démocratique fédérale (UDF) a décidé de lancer un référendum contre cette révision de loi, avec le soutien pour la récolte de signatures des Jeunes UDC et du groupe de travail Jeunesse et famille. Selon les référendaires, cette extension constitue une restriction disproportionnée à la liberté d'expression.

De plus, selon eux, il y a bien longtemps que les personnes homosexuelles sont considérées comme des membres à part entière de la société et il ne leur servirait à rien d’être réduites par la loi au rang de minorité supposée faible à protéger. Dans ce cas, expliquent-ils, il faudrait aussi faire des lois spécifiques pour les personnes handicapées, les personnes âgées ou les personnes en surpoids.

Enfin, ils estiment qu'il est difficile de savoir précisément où se situent, juridiquement, les limites à la liberté d’opinion et par conséquent que l’État pourrait interpréter ces limites de manière arbitraire. Et selon le comité référendaire, tout ce qui se rapproche un tant soit peu d’une justice au service d’une pensée unique menace dangereusement la démocratie.

"Ne pas menacer le vivre-ensemble pacifique", pour les partisans

À l’exception de l’UDC, tous les grands partis ainsi que le gouvernement soutiennent le projet du Parlement et souhaitent protéger davantage les minorités sexuelles. Selon eux, à une époque où l’anonymat supposé d’internet abaisse les barrières psychologiques freinant l’expression de propos haineux, il est urgent de renforcer la protection contre cette forme de discrimination, comme l'ont déjà fait d'autres pays européens, comme la France, l’Autriche, le Danemark et les Pays-Bas.

Ils assurent également qu'il restera possible d’exprimer des opinions argumentées, même si elles semblent provocatrices ou excessives. Les tribunaux attachent une grande importance à la liberté d’expression et font preuve de discernement dans l’application de la norme antiracisme. Un comportement respectueux ne sera ainsi jamais sanctionné.

Enfin, les partisans de la révision de la loi rappellent que le respect de la dignité humaine est une valeur fondamentale de notre société. La démocratie vit du traitement respectueux de l’autre. Or, la discrimination menace le vivre-ensemble pacifique.

Victorien Kissling

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