Certains producteurs du canton de Vaud et de Fribourg, les plus
touchés, seront donc privés d'une part substantielle de leur
revenus.
«Stupéfaction», «choc» et «incompréhension»: les députés
fribourgeois n'ont pas eu de mots assez forts pour qualifier la
décision de la filiale de la Migros à Courtepin dans le Canton de
Fribourg. Cette dernière vient d'annoncer aux producteurs vouloir
stopper sa filière de production de dindes en Suisse au 30 juin
2007.
Pour des raisons de coût, la Migros importera ce type de viande de
France, d'Allemagne et de Hongrie, pays où la coopérative
s'approvisionne partiellement déjà aujourd'hui. «C'est un véritable
cataclysme qui s'abat sur plus de 50 exploitations agricoles des
cantons de Vaud et surtout de Fribourg», a dit Michel Losey (UDC),
l'un des six auteurs de la résolution.
Dépôts de bilan programmés
Les halles d'engraissement de dindes ont nécessité d'importants
investissements. Leur amortissement court souvent sur 25 ans. Il
sera impossible aux producteurs de trouver rapidement une solution
de remplacement et le dépôt de bilan est programmé, a poursuivi le
député.
Selon lui, ces agriculteurs sont les véritables «esclaves» d'une
économie nouvelle. Ils peuvent difficilement vendre leur production
ailleurs puisque la Migros commercialise actuellement près de 80 %
de la production suisse de dinde.
Décision définitive
Monika Weibel, la porte-parole de la Fédération des coopératives
Migros, a précisé dans La Liberté que la décision du groupe était
définitive. L'avenir des producteurs est incertaine, puisqu'une
reconversion dans l'engraissement des volailles n'est pas
envisageable, au regard du marché déjà saturé. «En annonçant notre
décision une année à l'avance, nous leur permettons de réfléchir à
leur avenir», a-t-elle précisé.
Selon la Migros, il n'y aura pas de licenciements: les 35 employés
concernés seront mutés dans d'autres secteurs de l'entreprise.
Prix des fourrages
Les conditions sur les marchés d'approvisionnement et de
distribution ont eu un effet négatif sur le secteur, selon la
Migros. Le géant orange dénonce notamment la mise aux enchères des
contingents à l'importation, les coûts de la production agricole et
le prix élevé des fourrages en Suisse comparé aux pays de l'Union
européenne.
Sur ce dernier point, il est à noter que la Suisse est un des
seuls pays où la quasi-totalité des producteurs ne nourrissent pas
leurs animaux avec du fourrage contenant des OGM.
Agences/sch
Choix du consommateur... mais pas toujours
Maintenir une production locale permet pourtant d'avoir un meilleur contrôle sur les produits, selon la Fédération romande des consommateurs (FRC).
Les normes de sécurité alimentaire, de détention des bêtes, les traitements médicamenteux sont très contraignantes en Suisse. La FRC souligne que la moitié de la volaille consommée en Suisse est importée.
Le poulet d'Allemagne, de Hongrie ou du Brésil se retrouve surtout dans des plats cuisinés ou en restauration. Or la moitié de la viande consommée l'est en dehors de son domicile.
"Publicité mensongère"
Plusieurs intervenants ont critiqué les pseudo-engagements de la Migros en faveur d'une économie durable. «Ce n'est qu'un argument de marketing», a tonné Louis Duc (sans étiquette), qui rappelle sa visite d'une halle industrielle d'engraissage en France. «De véritables camps de concentration pour animaux», a-t-il fustigé.