L'assistance au suicide devrait donc continuer d'être entourée d'une zone grise en droit suisse. Le Conseil fédéral devrait cependant prendre des mesures pour promouvoir la médecine palliative, estiment les services de Christoph Blocher.
L'euthanasie active directe, assimilée à un homicide, est
interdite en Suisse. En revanche, l'euthanasie active indirecte
(soulager les douleurs d'un malade avec des doses de sédatif
susceptibles de raccourcir sa durée de vie) et l'euthanasie passive
(renoncer aux mesures destinées à prolonger la vie du malade) ne
sont pas punissables, sous certaines conditions.
Face à ce «flou juridique», le Parlement a chargé le Conseil
fédéral de lui soumettre des propositions de réglementation légale.
Dans son avant-projet, l'OFJ estime que le noeud du problème réside
dans l'évaluation, pour chaque cas, de l'admissibilité d'une
assistance.
Trop compliqué
Se posent alors les questions de capacité de discernement et
d'action du patient, de droit du mandat, de devoir du médecin
d'informer le patient et des rapports de représentations. Une
nouvelle loi contribuerait certes à une plus grande transparence
mais elle risquerait de ne pas être exhaustive, note l'office. Il
faudrait en effet une réglementation très détaillée pour couvrir
tous les cas de figure et toutes les catégories de patients.
Or la législation doit être formulée de manière suffisamment
souple pour s'appliquer à tous les cas envisageables et s'adapter à
d'éventuels développements de la recherche médicale. "Le
législateur se heurtera donc inévitablement à des limites
pratiques. En outre, il devrait engager sa responsabilité sur des
questions très délicates, notamment du point de vue de
l'éthique".
Directives mieux adpatées
Plutôt que de légiférer, l'OFJ s'en remet aux règles de
déontologie, comme les directives de l'Académie suisse des sciences
médicales. Il y voit un "instrument approprié pour une
réglementation détaillée de situations complexes et diverses".
Aussi longtemps que ces directives sont conformes au droit en
vigueur, elles suffisent à réglementer l'assistance au suicide de
manière satisfaisante, estime l'OFJ.
L'office s'inquiète toutefois de risques d'abus liés aux
développement des organisations d'assistance au suicide ces
derniers 20 ans en Suisse. La protection des patients exige que
l'on prenne des mesures. Mais là encore, l'OFJ, qui appelle cantons
et communes à faire respecter résolument le droit en vigueur et à
adopter des prescriptions pour le secteur des hôpitaux et des
homes, ne voit aucune nécessité de légiférer au niveau fédéral.
Conditions restrictives
Presque toutes les options examinées seraient disproportionnées
ou impropres car elles se traduiraient par une bureaucratisation ou
une institutionnalisation. Tout au plus, la législation sur les
stupéfiants pourrait poser des conditions plus restrictives à la
remise de natrium pentobarbital, produit utilisé pour mettre fin
aux jours du patient.
Mêmes conclusions concernant le "tourisme de la mort", qui peut
ternir l'image de la Suisse et pose des problèmes de poursuite
pénale et de surveillance. "Il est nécessaire de prendre des
mesures" mais pas "autres que celles qui sont d'ores est déjà
possibles s'agissant de l'assistance au suicide".
Soins palliatifs à développer
Enfin, l'OFJ ne voit aucune nécessité de légiférer dans le
domaine de la médecine palliative. Mais, vu que l'offre actuelle
est trop faible, il note que la Confédération pourrait soutenir les
efforts dans ce domaine.
L'avant-projet est le deuxième document que les services de
Christoph Blocher publient au stade de la consultation interne à
l'administration, démarche inhabituelle et justifiée par "l'intérêt
manifeste" du dossier. Le document ne sera présenté formellement au
public que dans sa version adoptée par le Conseil fédéral.
ats/ml
L'euthanasie en Suisse
Dans le droit suisse, il n'est pas illégal d'aider quelqu'un à mourir, pour autant que ce ne soit pas pour des motifs égoïstes.
La Suisse compte ainsi des associations d'aide au suicide (Exit, Dignitas) qui accompagnent des patients incurables qui ont choisi de mettre fin à leurs jours.
Mais cette euthanasie ne peut pas être active. C'est le patient qui doit accomplir lui-même le geste fatal, les associations n'étant là que pour lui prêter assistance.
En matière d'euthanasie, la Suisse est plus libérale que la plupart des pays européens.